À travers le programme DEMAIN, le projet qui met en avant les grandes ruptures à venir, Bpifrance revient sur le phénomène du métavers aux côtés de Epic Games.

Le Métavers dans sa version la plus aboutie, c’est-à-dire une vision d’un avenir numérique interconnecté est encore un projet en construction qui soulève de nombreux défis et incertitudes. Et pourtant, alors qu’il n’existe pas encore, certains annoncent déjà sa fin. « La vérité est que le Métavers n’est pas mort, parce que le Métavers n’est pas encore là, du moins tel qu’on nous l’a vendu durant la phase de hype de 2021 et 2022. Savoir si ce sera une évolution ou une révolution, dépendra grandement de notre capacité à relever les défis technologiques et sociétaux et à améliorer de façon concrète la vie des utilisateurs », partage Guillaume Simonaire, directeur d’investissements au sein du pôle des industries créatives chez Bpifrance.

Bien que cette version n’existe pas encore, la France se positionne déjà en tant que leader dans certains domaines. Sa participation active aux différents organismes de standardisation et de gouvernance internationale est nécessaire afin de lui permettre d’affirmer sa position à l’international. 

Mais qu’est-ce que le Métavers ?

Pour Guillaume Simonaire, il n’existe pas, à ce jour, de définition universelle du Métavers. Le concept est difficile à définir, non seulement, car le Métavers est encore en train de se construire, mais aussi parce que le terme a déjà bien souvent été utilisé à mauvais escient. « Le Métavers ne se résume pas au Web 3, ni à la blockchain et encore moins au contenu immersif. Le Métavers, c’est l’internet, incluant le web, qui embrasse la technologie interactive 3D », précise Marc Petit, directeur général d’Unreal Engine chez Epic Games

« À ce stade, un bon proxy du Métavers de demain, et donc ce qu’il est aujourd’hui, peut se résumer à l’industrie du jeu vidéo fusionnant avec les réseaux sociaux, permettant aux utilisateurs de s’exprimer, de socialiser, de créer des communautés et de se divertir en utilisant leur identité digitale », avance Guillaume Simonaire. Le Métavers va donc se construire grâce au savoir-faire du jeu vidéo, qui, pour Marc Petit, a 25 ans d’avance sur le sujet. « Le multi-joueur vient du jeu vidéo où l’on fait toujours les choses à plusieurs.  L’image et la vidéo numérique ont profondément transformé l'internet, ce qui est maintenant en train de se produire est un bouleversement similaire sinon plus important avec la technologie 3D. Après YouTube et les vidéoconférences, c’est l’émergence d’un nouveau médium 3D, un nouveau moyen de communication, cette fois-ci interactif, collaboratif et participatif », précise Marc Petit.

Pour Guillaume Simonaire, comme pour Marc Petit, le Métavers, dans sa forme la plus aboutie, va donc devenir une réalité. « La question est de savoir quand, afin de ne pas être trop en avance ou pire de rater le train », souligne Marc Petit.

Le Métavers : des champs d’applications variés

Loin des craintes qu’il suscite chez certains, le Métavers pourrait en réalité apporter des réponses à des problématiques d’entreprises ou même à des problématiques sociales, sur des sujets comme la santé ou l’isolement. « Il ne faut pas craindre ces technologies, mais au contraire les embrasser et les contrôler », insiste Marc Petit. 

Avec les jumeaux numériques, il pourra par exemple faciliter la communication dans l’entreprise. « Les gains de productivité associés à la simulation et à la collaboration permise par les jumeaux numériques pourront être énormes. On en voit déjà, par exemple, dans les processus de fabrication de voiture », précise Marc Petit.

Pour les marques, c’est l’opportunité de toucher la GenZ ou la GenAlpha en proposant des contenus engageants centrés sur leur univers. La Société Générale a par exemple créé une expérience immersive de rugby dans Fortnite à l’occasion de la coupe du monde de rugby en France. Des marques de divertissement créent aussi des expériences autour de leur IP pour multiplier les points de contacts et les expériences et ainsi augmenter l’engagement.

L’éducation aussi pourrait tirer d’importants bénéfices. « On a bien vu avec la pandémie que des solutions comme zoom ne fonctionnent pas. À l’inverse, ce qui existe déjà dans les jeux vidéo, a prouvé une capacité à embarquer les enfants et les adolescents », commente Marc Petit.

Répondre aux inquiétudes liées à la sécurité et à la protection de la vie privée

La communauté européenne a réalisé un important travail autour de ce qu’elle a appelé le Web 4 et qui est en réalité le Métavers. « J’ai été agréablement surpris par leurs conclusions, qui représentent bien les opportunités et les enjeux. La communauté européenne acte que ce changement est inévitable et qu’il peut être très bénéfique, tout en insistant sur les enjeux de régulation et de sécurité », commente Marc Petit.

Quand on parle de Métavers, les enjeux de sécurité et de protection de la vie privée se posent en effet. « Dans un univers 3D, on va collecter encore plus de données. Dans le Métavers, beaucoup d’échanges seront oraux et non plus textuels. Il faut sensibiliser et recréer les mécaniques de protection du quotidien. Les lois du monde réel doivent s’appliquer, mais tout l’enjeu est de savoir où sont les frontières », explique Marc Petit.

Pour lui, l’un des pré-requis est l’utilisation de plateformes ouvertes. « Si l’Europe veut sortir de l’hégémonie américaine, il faut adopter des standards ouverts. On ne veut pas que la nouvelle version de l’internet soit à nouveau aux mains de cinq sociétés. C’est une opportunité incroyable pour l’Europe et les acteurs souverains, car dans les prochaines années, tout va changer. Ce type de transfert de technologie n’arrive pas fréquemment. Aujourd’hui, nous pouvons tirer des leçons de l’internet mobile et décider ce que nous voulons ou pas », conclut Marc Petit.