Sur un marché moins euphorique, les fusions-acquisitions (M&A) se multiplient, notamment dans la fintech. Toutefois, la réussite ne se mesure pas uniquement à l'aune des transactions conclues, mais aussi à celle des intégrations réussies. Une étude récente d'Eight Advisory, cabinet de conseil financier, opérationnel et stratégique, met en lumière les raisons pour lesquelles de nombreuses opérations de M&A ne parviennent pas à atteindre leurs objectifs et révèle les défis majeurs dans la gestion post-acquisition.

Le rapport, basé sur les réponses de 92 entreprises de toutes tailles et de tous secteurs et de fonds de private equity européens responsables de plus de 700 opérations de M&A, révèle un imposant chiffre d'affaires cumulé de 820 milliards d'euros. Or, dans ce même rapport, on lit que seulement 40% des opérations de M&A en Europe réalisent les synergies attendues, malgré une perception initiale de réussite pour 71% d'entre elles. 

Intégration culturelle et conduite du changement : des enjeux sous-estimés et pourtant cruciaux

L’étude d'Eight Advisory souligne l'importance d'une approche holistique et méticuleusement planifiée dans les opérations de M&A. Elle insiste sur le fait que le succès ne réside pas seulement dans la planification financière et stratégique, mais aussi dans l'attention portée à des enjeux cruciaux tels que l'intégration culturelle et la gestion du changement. 

Le rapport souligne que, bien que la culture et la gestion du changement ne soient pas systématiquement des facteurs de réussite, ils sont très souvent la raison principale des échecs d'intégration. Or, d’après le rapport, ces aspects sont sous-estimés par 67% des répondants. Cette négligence se traduit par des difficultés à harmoniser les cultures d'entreprise distinctes, un processus essentiel pour une intégration réussie. Et cela peut créer des dommages collatéraux, telle que des difficultés pour les salariés à collaborer sur le long terme ou une augmentation du taux d’attrition, autrement dit la proportion de clients perdus.

Paradoxalement, malgré ces défis, les entreprises continuent de sous-estimer l'importance d'une gestion du changement efficace. Moins de 50% des entreprises sondées avaient mis en place un chantier dédié à la gestion du changement dans leurs démarches d'intégration. « La plupart des sociétés ne sont pas suffisamment bien équipées en termes de grilles d’analyses sur l’intégration culturelle. Lors de l’étude, certaines sociétés, notamment industrielles, nous ont confié qu’il s’agissait pour elle d’un sujet plus que secondaire. Or, dans les best practices, il faut traiter cela avec sérieux et dans le détail sur chacun des trois types de culture : pays, entreprise et management », partage William Berger, associé chez Eight Advisory.

L'intégration entraîne une charge de travail plus importante que prévu

Autre facteur, mis en avant par 35% des entreprises : une disruption plus importante de la continuité de l’activité. « En d’autres termes, la charge ainsi que la durée de travail liées à l’intégration sont plus importantes qu’attendu », explique William Berger. D’après le rapport, seuls 29% des répondants indiquent que leur projet d’intégration dure moins de six mois. Or, pour William Berger, le rythme de l’intégration n’est pas toujours soutenable sur une plus longue période. « Il faut une clôture rapide du projet, même si cela doit mobiliser plus intensément certaines personnes clé de l’entreprise au début », souligne-t-il.

Enfin, des investigations insuffisantes lors de la due diligence (27%) et une supervision défaillante du processus d’intégration (24%) sont également pointées du doigt comme causes d'échec. « Cela signifie qu’il y a souvent des failles dans la compréhension du modèle opérationnel de la cible et des synergies attendues dans le cadre du projet. Une fois que l’acheteur a accès à l’ensemble des informations, il peut découvrir que la société ne ressemble pas à ce qu’il avait cru acheter », analyse William Berger.