15 décembre 2023
15 décembre 2023
Temps de lecture : 6 minutes
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En immersion chez... 900.care, la marque qui veut réinventer la cosmétique

Les gels douche, shampooings ou lessives classiques contiennent tous 90 % d’eau. Une aberration pour 900.care qui a décidé de changer la donne il y a trois ans. Maddyness s'est rendu dans les locaux parisiens de la startup tricolore pour découvrir sa recette innovante.
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900.care élabore les formules de ses produits dans son propre laboratoire. Crédit : Maxence Fabrion/Maddyness.

Derrière une porte anodine de la rue Amelot, entre Bastille et République, 900.care a élu domicile au milieu d’une résidence qui héberge de nombreux logements Airbnb. Dans ce cadre apaisant, il n’est pas question de tourisme, mais de produits d’hygiène et d’entretien d’un nouveau genre.

En effet, la société a vu le jour en 2020 en partant du constat que les gels douche, shampooings ou lessive classiques contiennent tous 90 % d’eau. Par conséquent, Aymeric Grange et son équipe se sont mis en tête de commercialiser sous forme d’abonnement des produits rechargeables (gels douche, shampooings, dentifrice, déodorant, lessive, liquide vaisselle…), en se concentrant uniquement sur les 10 % du produit actif nécessaire à leur usage. Le tout à un prix raisonnable pour ne pas faire fuir des consommateurs déjà éprouvés par l’inflation qui étouffe leur pouvoir d’achat depuis de nombreux mois. A ce jour, cette approche a permis de séduire 85 000 clients, avec un impact positif sur la planète : 400 000 litres d’eau et 3 millions de déchets plastique économisés.

«C’est la cosmétique du futur»

Pour faire de cette ambition une réalité, 900.care s’est doté de son propre laboratoire. Sur les 25 personnes de la startup, 5 travaillent dans cet espace où sont élaborées les formules pour donner vie aux produits de la marque tricolore. Pour ce faire, les chercheurs de l’entreprise, sous la goulette de Paula Montano, la responsable du pôle recherche et développement, ont recours à une palette d’outils réaliser divers tests permettant d’arriver au produit désiré. «On s’inspire des méthode de développement logiciel», résume Aymeric Grange, qui a créé la société avec Thomas Arnaudo.

Évidemment, créer un produit d’hygiène ou d’entretien rechargeable ne se fait pas en un jour. Il faut ainsi compter un an pour la mise sur le marché. «Pour la création d’une formule, il faut 5 à 8 mois. Quant à la partie réglementaire, cela prend environ 3 mois. C’est la phase où l’on prépare le produit pour lancer la fabrication», explique Paula Montano. Avant d’ajouter : «Pour trouver une formule, il faut faire une cinquantaine d’essais en laboratoire.» Comme une dizaine de produits sont lancés chaque année en moyenne, cela représente ainsi près de 500 essais sur une année entière. «Internaliser la R&D permet d’innover plus facilement. L’ensemble du processus est ainsi plus rapide qu’au sein des grands groupes. C’est la cosmétique du futur», lance avec le sourire la pharmacienne spécialisée dans la formulation de produits cosmétiques.

Dans l’élaboration de cette cosmétique nouvelle génération, trouver la bonne formule s’apparente à créer une recette pour les papilles. La salle de préparation du laboratoire a ainsi de faux airs de cuisine, avec une balance et des récipients pour aboutir un bon dosage. Mais le véritable atout secret se cache dans deux machines du laboratoire : des enceintes thermiques pour simuler le vieillissement du produit dans le temps et une machine pour compacter les pastilles. Celle-ci est capable de fabriquer 6 000 cachets par heure, ce qui permet de préparer à petite échelle le lancement de la phase industrielle du produit pour tester sa stabilité. Si le test est concluant, la fabrication du produit pourra être lancée dans l’une des 5 usines partenaires de 900.care dans l’Hexagone.

Les clients impliqués dans le processus de validation des nouveaux produits

Mais avant d’en arriver là et coller le plus possible aux attentes des consommateurs, la marque a fait le choix de les impliquer directement dans le processus de conception. Ainsi, si la première étape pour valider l’atome et le parfum est réalisée en interne, notamment avec un test sensoriel qui met directement les collaborateurs à contribution, la jeune pousse demande ensuite directement l’avis aux clients pour rectifier le tir le cas échéant.

Mais pour cela, le produit doit d’abord récolter la note de 4,2 sur 5 en interne avant d’être soumis à l’approbation des consommateurs. «Tous les mois, nous procédons à l’analyse des notes des clients. Si la note n’est pas bonne, on les appelle pour comprendre ce qui ne va pas. Pour un déodorant à bille par exemple, le problème se situait sur la manière dont il fuyait. Ce n’était pas la formule qui était mise en cause», explique Aymeric Grange.

En fonction de ces retours, 900.care peut rapidement faire évoluer ses produits, y compris ses formules, puisque le service client est situé juste à côté du laboratoire dans les locaux de l’entreprise. Une agilité idéale pour optimiser le temps et se distinguer de grands groupes qui fonctionnent en silos et peuvent donc perdre beaucoup de temps le temps que les processus soient transmis entre les divers services impliqués. «C’est hyper pratique», reconnaît volontiers le patron de la marque de cosmétiques.

Cap vers la rentabilité et l’international

Avec cette approche, 900.care s’est fixé 5 objectifs majeurs qui sont affichés sur les murs de ses locaux : augmenter le nombre d’abonnements par abonné, créer une expérience client géniale, élever la rétention client, créer les conditions financières d’une croissance durable et et acquérir toujours plus de clients. En respectant ces 5 préceptes, la société espère atteindre la rentabilité sur le marché français en 2024. Et plutôt que de miser sur un tour de table d’envergure pour accélérer son développement, la jeune pousse a préféré opté pour le financement participatif il y a un an. Près de 3 000 investisseurs ont ainsi été au rendez-vous pour lever plus d’un million d'euros en 24 heures sur la plateforme Crowdcube.

Au-delà d’avoir un positionnement différenciant avec ses cosmétiques solides, 900.care peut aussi capitaliser sur son impact écologique avec ses produits zéro déchet. «Nous sommes green à l’extérieur, mais nous essayons également de construire une entreprise green à l’intérieur», précise Aymeric Grange. «Cette notion d’impact est dans notre ADN et on essaie de l’intégrer à tous nos décisions», ajoute-t-il.

Désormais, l’approche de la startup va être mise à l’épreuve du passage à l’échelle puisqu’une expansion plus large à l’international est à l’étude alors que la société réalise déjà 10 % de ses ventes en Suisse et en Belgique. «Nous visons tous les pays transfrontaliers avec une approche itérative», indique le co-fondateur de la marque tricolore. Pour conquérir l’Europe et poursuivre sa montée en puissance en France, elle prévoit aussi d’étoffer sa gamme de produits, notamment en développant des shampoings pour cheveux gras ou secs. «Nous voulons avoir tous les essentiels du quotidien à un seul endroit avec des formules saines», résume Aymeric Grange. Mais l’entrepreneur ne veut pas aller plus vite que la musique, surtout dans le contexte économique actuel, et compte bien profiter pour l’instant de la quiétude de ses locaux à taille humaine à Paris, où certains acteurs de la French Tech ont parfois vu trop grand trop rapidement pour leurs bureaux.

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