« Quitte ton boulot, ouvre un bistrot. » Ce slogan, et quantité d’autres, étaient visibles au salon Foodorama sur de grandes affiches colorées qui font échos aux posters de motivation que l’on retrouve dans les startups américaines. Cet événement était une évidence pour Service Compris qui a lancé le premier accélérateur de restaurants : il était temps de mettre en place le premier salon dédié aux entrepreneurs de la restauration.

Les tables rondes se sont donc succédé ce mardi 6 février, avant de laisser la place à un concours de pitch, en parallèle de sessions de « speed dating » avec des experts venant d’acteurs du secteur comme Transgourmet ou Brémart. Pour tout entrepreneur ayant vu l’émergence de l’écosystème tech en France, il y avait comme un sentiment de déjà-vu.

On prend les mêmes ingrédients, et on recommence

Le parallèle n’est pourtant pas totalement un hasard. Derrière Foodorama, il y a Romain Amblard, qui a dirigé l’activité d’accélération de Numa de 2015 à 2018. « On retrouve tous les ingrédients de la tech d’il y a dix ans : c’est-à-dire une énorme envie entrepreneuriale, des financements qui évoluent, et un métier qui gagne à être décrypté, mieux analysé et mieux transmis. J’ai donc à cœur d’essayer de prendre le meilleur des dix dernières années dans la tech pour l’appliquer à la restauration. »

Il ne fallait donc pas être surpris de découvrir un programme qui, à peu de choses près, aurait pu être celui d’un événement tech. Même les intervenants auraient pu presque être interchangeables, avec la participation d’un expert de Bpifrance sur une table ronde concernant la question du financement, ou de l’ancienne COO et cofondatrice de la startup FoodChéri, présente pour parler de l’importance de développer une marque employeur attractive.

Il faut dire que le secteur a énormément évolué sur ces dernières années, profitant d’une grande digitalisation apportée par des startups de la FoodTech qui sont particulièrement actives en France.
« Et puis le COVID est passé par là avec ce que les Américains appellent la Grande Démission, cette quête de sens et ce besoin de retourner sur des métiers qui privilégient le contact humain », explique Romain Amblard.

L’ancien de Numa n’est pourtant pas le seul à avoir sauté le pas pour passer des startups tech à la restauration. Il voit d’ailleurs de plus en plus d’investisseurs qui se sont lassés de la tech et qui viennent investir ponctuellement dans la restauration.

Vers un Station F de la restauration ?

Une nouvelle génération de restaurateurs semble donc être arrivée en France. Parmi les exemples marquants, il y a Big Mamma, ce groupe lancé par deux anciens HEC qui compte aujourd’hui 2.000 salariés avec 23 trattorias dans 5 pays. Lors de l’événement Foodorama, c’est Dauphine Piot, la DRH de Big Mamma France, qui a souligné les nombreuses particularités de cette entreprise. Cette entreprise à mission (« change people’s lives with pizza ») est le premier groupe de restauration à être devenu B Corp. Big Mamma a ainsi fait un énorme travail sur la mise en place de sa marque employeur et des valeurs de l’entreprise.

Dans les belles histoires partagées, il y avait aussi celle de Graffi Rathamohan, cofondatrice de PNY Burger qui, avec l’ambition de créer un seul restaurant qui devait être l’institution du burger à Paris, s’est retrouvé à lancer un deuxième, un troisième, jusqu’au quatorzième restaurant aujourd’hui. « Quand je suis arrivé dans l’écosystème tech en 2014, il y a pile 10 ans, il y avait des lieux pour parler, des salons, des vidéos, mais aussi des “roles models” qui donnaient envie de se lancer dans la tech. Je ressens vraiment ça aujourd’hui dans le monde de la restauration… cette même énergie ! »

Alors, bien sûr, le parallèle entre l’écosystème tech et la restauration a ses limites. La vitesse d’exécution n’est pas la même, les modèles sont moins scalables et les investissements seront toujours plus modestes, mais le secteur de la food est en train de bénéficier d’une accélération importée par d’anciens de l’écosystème tech.

Pour sa part, Romain Amblard rêve encore d’un lieu emblématique qui serait l’équivalent d’un Station F pour la Frenchtech. « Il faudrait encore plus d’investisseurs et de parties prenantes, mais la trajectoire est là. »