Valoriser les sciences humaines et sociales dans les entreprises

Dans leur quête de durabilité, les entreprises mènent chaque jour des expérimentations qui trouvent leurs fondements dans le champ des sciences humaines et sociales, sans forcément y associer le socle indispensable de la rigueur scientifique.

La recherche en Sciences humaines et sociales (SHS) se distingue par son approche profondément ancrée dans la compréhension des comportements humains et des dynamiques culturelles, ce qui la rend indispensable pour naviguer dans le paysage complexe de la durabilité. Elle offre des éclairages cruciaux sur des questions comme l’éthique, l'inclusion sociale et les évolutions comportementales. Des éclairages nécessaires pour adopter des pratiques durables.

La mesure d’impact n’est pas la mesure de l’engagement. L’innovation sociale n’est pas simplement un complément à la stratégie d'entreprise ; elle est un catalyseur essentiel pour leur compétitivité, rentabilité et transformation.

Imaginons une entreprise qui intègre pleinement une politique de Recherche & Innovation basée sur les SHS dans sa stratégie de performance durable. Cela pourrait signifier de redéfinir et d’expérimenter régulièrement de nouvelles pratiques relatives aux ressources humaines pour favoriser l'équité et le bien-être au travail, des campagnes de marketing qui respectent et valorisent la diversité culturelle, ou encore des innovations produit qui répondent de manière éthique aux besoins des consommateurs et enjeux de société actuels rappelés par la CSRD.

Évaluer l’impact, ne pas réinventer la roue

Il ne s’agit pas seulement d’éviter les pratiques “d’impact washing” mais plutôt comme dit l’AVISE, “de ne pas réinventer la roue”.

L'adoption de l'échelle Societal Readiness Level (SRL) qui est venue compléter l'échelle de maturité technologique (TRL), a enrichi notre approche sur les projets en sciences humaines et sociales, permettant ainsi à des projets de transformation sociale de progresser depuis les laboratoires jusqu'à la réalité sociétale.

Les sciences humaines et sociales (SHS) jouent - au même titre que les technologies - un rôle clé dans le renforcement de la performance durable des entreprises, et la méthode pour mesurer efficacement leur impact existe.

Premièrement, l'adoption d'indicateurs qualitatifs, comme les études de cas et les témoignages, peut aider à capturer l'impact des initiatives en SHS sur le comportement organisationnel et les normes sociales. Ces méthodes narratives permettent une compréhension plus profonde des changements induits par les recherches en SHS.

Deuxièmement, les enquêtes de perception et les évaluations de satisfaction auprès des employés et des clients peuvent fournir des données précieuses sur l'impact des politiques inspirées par les SHS sur le bien-être au travail et la satisfaction client. Ces outils sont essentiels pour mesurer les aspects "humains" de la performance organisationnelle.

Troisièmement, les collaborations interdisciplinaires pourraient être encouragées, permettant de combiner les méthodologies des SHS avec celles des sciences exactes pour développer des outils d'évaluation hybrides. Cela pourrait inclure l'utilisation de l'analyse des données pour quantifier les impacts des politiques globales de recherche et innovation.

Quatrièmement, les indices de performance durable personnalisés, qui intègrent des indicateurs spécifiques liés aux objectifs de durabilité de chaque entreprise, pourraient être développés. C’est l’approche que nous défendons. Ces indices offriraient une évaluation sur mesure de la manière dont les initiatives basées sur les SHS contribuent à la réalisation des objectifs de performance économique, sociale et environnementale de l'entreprise.

Enfin, les opportunités fiscales permettent également de structurer cette évaluation en définissant et objectivant le cadre de la R&D.

En mettant en œuvre ces pistes, les startups - et toute entreprise normalement constituée - pourraient non seulement répondre aux exigences de la CSRD, mais aussi prendre une longueur d'avance dans l'évaluation de leur véritable impact sur la société appelé des voeux de tous comme le rappelle l’organisation du dernier Sommet de la mesure de l’impact le 18 avril dernier par Impact Tank au CESE.

Nous ne sommes qu'au début dans la compréhension et la pleine mesure de l'ampleur réelle de cet impact. Mais une chose est claire : l'entreprise évolutive est au premier plan de cette exploration.

L'entreprise moderne est sans doute le meilleur baromètre pour évaluer l'impact de l’innovation sociale. La rencontre des intérêts économiques, de la responsabilité sociale et sociétale et de la méthode scientifique représente l’occasion d’améliorer la transférabilité de ces mesures d’impact. C’est l’aventure de la R&D.