Joël-Alexis Bialkiewicz ne devait pas être banquier. En effet, cet ingénieur génie logiciel possédant un master en algorithmique se préparait à faire de la R&D pour une entreprise américaine. Un drame familial va en décider autrement. Son petit frère devait rejoindre la banque familiale, mais disparaît subitement dans un accident de voiture. Le père de Joël-Alexis Bialkiewicz est catégorique : soit il rejoint la banque familiale, soit il la revend.

C’est ainsi qu’il est devenu associé gérant de la Banque Delubac & Cie en 2012. Dix ans plus tard, l’entrepreneur revient à ses premiers amours en créant Delupay, un asset technologique sous la forme d’un spin-off, avec l’ambition de révolutionner le paiement. Sans hésitation, Joël-Alexis Bialkiewicz s’imagine pouvoir dépasser un acteur comme Mastercard.

La souveraineté au coeur du projet Delupay

« Si vous allez dans un magasin de votre rue avec votre carte française, émise par une banque française, il y a de grandes chances pour que le paiement fasse un aller-retour par les États-Unis, explique Joël-Alexis Bialkiewicz, président fondateur de Delupay. Je ne sais pas si vous vous rendez compte, mais cela veut dire que les Américains ont accès à vos petites habitudes. C’est un peu embêtant quand même ! » Pour l’entrepreneur, il s’agit d’un enjeu de souveraineté majeur qui est au cœur de la raison d’être de sa startup.

« Les acteurs américains restent des gens relativement de confiance… même si leurs intérêts ne sont pas les nôtres. Mais la Chine, c’est une autre histoire, avec une dictature qui est extrêmement dure. Et l’hypothèse où l’on passerait d’une domination américaine à une domination chinoise m’a un peu effrayé. » Joël-Alexis Bialkiewicz a en effet constaté l’avance prise par les systèmes de paiement en Chine, à Singapour ou encore en Thaïlande lors d’un voyage en Asie.

Delupay fait donc le choix de ne pas construire un simple wallet. La startup ne veut pas être seulement un intermédiaire qui va communiquer vos informations bancaires aux marchands. « On maîtrise le processus et cela nous permet de protéger le consommateur tout en proposant une meilleure expérience, explique Joël-Alexis Bialkiewicz. Et, contrairement à des acteurs qui se disent français mais qui utilisent des outils américains pour toutes leurs opérations, nous avons fait le choix de bannir les systèmes américains. Ce n’est pas parce que l’on ne les aime pas, mais pour des questions de souveraineté. »

Une philosophie qu’il compte reproduire le jour où il s’exportera à l’international avec la promesse de créer des filiales dans chaque pays qui vont mettre en place des serveurs, en se pliant à la juridiction locale : « C’est important pour nous de respecter la souveraineté de chaque pays, et pas juste du nôtre. On est un intermédiaire de confiance. »

Il faut “arrêter le racket des commerçants”

Delupay se présente sous la forme d’une application pour iPhone ou Android qui, une fois un compte créé (notamment après avoir fourni une pièce d’identité et un mandat de prélèvement), va permettre de payer auprès des commerçants par NFC ou le scan d’un code QR.

Pour le client, l’expérience est fluide et le paiement est plus rapide qu’avec des solutions actuelles de paiement sans contact. Pour le commerçant, Delupay s’avère moins cher que toutes les solutions équivalentes puisque les commissions sont plafonnées à 0,5 % pour le commerce physique et 1 % pour le e-commerce, sans frais fixes, et Delupay ne prend pas de commission sur les transactions de moins de deux euros.

« C’est l’une des raisons pour lesquelles j’ai créé Delupay, insiste Joël-Alexis Bialkiewicz. C’est pour arrêter le racket des commerçants qui payent des commissions beaucoup trop chères. Ce n’est pas possible d’avoir 0,10€ de commission sur une baguette vendue à 1,20€. Du coup, ils refusent la carte bancaire pour les petits montants. L’expérience est atroce pour tout le monde. Et je tiens à le dire : cette offre n’est pas une offre de lancement. Nous n’allons pas augmenter nos tarifs. Au contraire, quand on aura du succès, on aura des économies d’échelle qui nous permettront de les baisser encore. »

Delupay prépare une levée de fonds

Avec 2.500 commerçants équipés, Delupay reconnaît pourtant ne pas avoir atteint la masse critique. La startup est d’ailleurs en pleine levée de fonds pour investir sur ses forces commerciales.

Joël-Alexis Bialkiewicz multiplie les marques de confiance en l’avenir, persuadé de la supériorité de son produit sur la concurrence des géants tels que Visa ou Mastercard. Il ne souhaite pourtant pas s’arrêter là. Delupay possède un deuxième brevet sur le paiement par Bluetooth Low Energy.

« C’est en pré-production et on va le lancer bientôt. Ce sera parfait pour les parcs d’attractions. Quand les possesseurs de l’application seront à moins de 10 mètres des bornes d’achat de tickets, ils recevront une notification leur permettant de payer leur billet en quelques secondes et ils n’auront plus qu’à le présenter. On a inventé le télépéage pour les parcs d’attractions, les musées, les stades … »

L’équipe de Delupay rappelle que le paiement mobile connaît une croissance de 140 % par an qui est en train de ronger les parts des autres moyens de paiement. Un nouveau monde est en train de se dessiner et Delupay veut s’assurer d’en être un acteur majeur.