Actus par Maddyness, avec Leonard
27 septembre 2021
27 septembre 2021
Temps de lecture : 5 minutes
5 min
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Contech : quand le secteur de la construction fait sa transition environnementale

Poussé par la transformation numérique et la transition énergétique, le secteur de la construction accélère en matière d’innovation. Il y est aidé par une myriade de startups spécialisées. Présentation de trois d'entre elles accélérées par Leonard, l'incubateur du groupe Vinci.
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Vous connaissez la Fintech ou la Legaltech qui qualifient les startups spécialisées dans les services financiers et le droit. En revanche, le mot-valise de Contech (pour Construction Tech) est moins connu. Il désigne les jeunes pousses qui entendent dépoussiérer le secteur traditionnel de la construction. En associant l'intelligence artificielle à l'Internet des Objets (IoT), le concept de bâtiment intelligent (smart building) permet notamment de gagner en efficience énergétique tout en améliorant le confort de ses occupants.

Selon une étude sur la Contech, conduite par Sifted avec Leonard, l'incubateur du groupe Vinci, la marge de manœuvre est importante. "Si la construction en Europe pèse 2 000 milliards d’euros, cette industrie n’a pas dépassé 1% de gain de productivité sur les vingt dernières années".

Pour Guillaume Bazouin, responsable des programmes startup et intrapreneurs de Leonard, "le potentiel de transformation de la construction est d'une ampleur comparable à celle des services financiers par les FinTech" Pour lui, l'alignement des planètes est actuellement favorable à la Contech. "Nous arrivons à la rencontre entre un besoin extraordinaire et des possibilités technologiques qui le sont tout autant."

La transition écologique constitue un puissant levier d'accélération pour l'innovation. Deuxième activité la plus polluante dans le monde après l'exploitation des énergies fossiles, "le secteur de la construction n'a pas d'autre choix que de se réformer en profondeur, ne serait-ce que pour des critères d'acceptation sociale et des enjeux de conformité réglementaire" , poursuit Guillaume Bazouin.

La France a, selon lui, adopté la légalisation la plus restrictive au monde en prenant en compte les émissions en CO2 et l'efficacité énergétique du bâtiment mais aussi l'empreinte carbone des matériaux qui le composent. "Ce qui suppose de réutiliser des matériaux de bâtiments détruits et de faire appel à l'économie circulaire."

Un décret de la loi Elan impose notamment aux bâtiments tertiaires de plus de 1 000 m2 une réduction d'au moins 40% de leur consommation d’énergie en 2030 (comparée à 2010), de 50 % en 2040 et de 60 % en 2050.

Places de marché et intelligence artificielle

Laboratoire d'innovation et de prospective de Vinci, Leonard travaille depuis quatre ans sur ce défi de la transition écologique mais aussi sur l'optimisation des coûts et la sécurité sur les chantiers. À la Maddy Keynote 2021, il présentait trois startups bénéficiant de son programme d'accélération SEED.

Rockease propose une marketplace BtoB qui optimise la gestion des matériaux de construction de la commande à la facturation en passant par la livraison. Une gestion qui se fait encore beaucoup sur papier, voire par fax. "Les professionnels du BTP obtiennent de meilleurs tarifs et les fournisseurs réduisent le nombre de camions qui tournent à vide" , avance Guillaume Richer, PDG et cofondateur.

La startup Lokimo s'adresse, elle, aux professionnels de l'immobilier, à la recherche permanente de données en ligne pour réaliser des études de marché ou un état de la concurrence. "Notre plateforme de data scientist à la demande agrège et analyse ces données pour proposer des informations fiables et toujours à jour, explique Binta Gamassa, CTO et cofondatrice. Les experts de l'immobilier disposent ainsi d'une vision précise du marché locatif, du neuf ou des résidences spécialisées" . Meneur de Groupe incontournable de l'évaluation immobilière, CBRE passe ainsi par Lokimo pour automatiser ses rapports d'expertise. La startup travaille aussi sur le volet prédictif, ses algorithmes dégageant des tendances en termes d'évolution des prix et des demandes.

Dernière plateforme, Build2B met en relation les entreprises de la construction et les experts indépendants. "Les sociétés passent près d'un jour par semaine à trouver des spécialistes, constate Karim Tamarzist, COO et cofondateur. De leur côté, les 360 000 freelances du secteur connaissent des problèmes administratifs ou de paiement."

Build2B va assurer la rencontre des deux mondes tout en aidant les freelances dans leur gestion administrative - génération automatique de contrats, devis, factures - le suivi de comptabilité ou via une avance de trésorerie.

Encore des freins à lever

Les trois entrepreneurs reconnaissent que le secteur de la construction n'est pas facile à convertir à l'innovation. "L'acquisition de nouveaux clients n'est pas chose aisée, observe Karim Tamarzist. Les professionnels travaillent dans l'urgence, ils n'ont pas le temps de tester de nouvelles solutions. En revanche, une fois le pas franchi, la rétention est forte" . Il mise aussi sur la nouvelle génération – "40 % des acteurs ont moins 35 ans" - plus ouverte à la digitalisation.

Guillaume Richer est, lui, confronté aux rapports parfois difficiles entre startups et grands groupes. Ces derniers font beaucoup de tests, ne prennent pas de risques. Quant aux PME, elles manquent de compétences en interne pour déployer des solutions innovantes.

Binta Gamassa doit, elle, évangéliser sur les apports de la technologie. "Les acteurs sont conscients de l'importance de la donnée mais ils manquent de cas d'usage concrets. Il faut leur expliquer comment l'algorithme fonctionne et quelle est la création de valeur" . Par ailleurs, une difficulté dans le BtoB est, selon elle, non pas de convaincre les utilisateurs finaux mais les décideurs qui tiennent les cordons de la bourse.

En parlant justement d'argent, Build2B et Lokimo ont fait appel à des business angels du secteur qui ont apporté aux deux startups leur carnet d'adresses et leur connaissance du marché. Rockease a, elle, levé 250 000 euros grâce à son réseau. Pour sa prochaine levée, la jeune pousse craint malheureusement de devoir faire appel à des fonds d'investissement étrangers, plus appétant aux risques.

Maddyness, partenaire média de Leonard