L’Union européenne a acté, mi-juin 2022, l’interdiction de la vente de véhicules neufs à énergie fossile à partir de 2035 sur son territoire. Une annonce qui va continuer à doper la vente de véhicules électriques - déjà en hausse de 46 % en 2021 par rapport à 2020 selon le CCFA - dans les années à venir. A condition que les infrastructures de charge - déjà insuffisantes - se développent. Le marché mondial des services de recharge devrait augmenter d’environ 35 % par an d’ici à 2030, pour atteindre les 12 milliards de dollars selon le cabinet Oliver Wyman.

C’est sur ce marché florissant qu’Aurélien Meaux s’est lancé - après Cheerz - avec Electra. Son crédo : installer et opérer des bornes de recharge ultra-rapide (20 à 30 minutes) dans les grandes agglomérations, compatibles avec tous les véhicules et réservables via une app et une web app.

Construire les fondements

Grâce à sa dernière levée de fonds de 15 millions d’euros, réalisée il y a tout juste un an, la société a travaillé sur trois sur trois principaux chantiers :

  • Sécuriser des sites pour installer les bornes de recharge. Elle a réussi à en acquérir 300 ;
  • Développer son produit en améliorant et en simplifiant l'expérience client. "Nous avons développé une app et une web app qui permettent de réserver à distance sa borne, de suivre la charge et même de payer, développe Aurélien de Meaux. Nous avons développé une brique logicielle de supervision, qui est la colonne vertébrale du système de pilotage des bornes" ;
  • Construire ses premières stations de recharge qui offrent 50 points de recharge à l’heure actuelle. Un chiffre qui devrait monter à 300 d’ici à la fin de l’année. 

"Notre idée est de construire une offre qui soit vraiment enthousiasmante pour le conducteur, afin qu’il ait envie de conduire une voiture électrique" , met en exergue Aurélien de Meaux, convaincu que la transition passera par la création d’un désir plutôt que la seule réglementation.

Les partenaires fonciers d’Electra, eux, sont demandeurs. Pour rappel, la startup installe ces produits sur des parkings privés ouverts au public (hotel, supermarché). "Nos partenaires fonciers sont soumis à la loi LOM qui les obligent à consacrer 5 % de leurs places de parking à la recharge de véhicules électriques" , rappelle l’entrepreneur. Avec sa solution, Electra leur permet de faire d’une pierre deux coups. "Ils bénéficient d’un revenu avec le loyer foncier et offrent un service supplémentaire à leurs clients." Résultat : la startup installe une station par semaine aujourd’hui, deux à partir de septembre.

Une contexte compliqué

Si 2021 s’est passée sous les meilleurs auspices possibles, l’échiquier géopolitique européen a changé et le prix des énergies a flambé. Pas de quoi inquiéter outre mesure l’entrepreneur. "Nous avons conclu un contrat d’électricité avec notre partenaire pour toute l’année 2022 donc nos prix resteront stables. Nous devrons le renégocier en 2023 et nous verrons à ce moment-là si une petite hausse doit être effectué. Mais notre ambition reste de proposer un prix compétitif pour engager les conducteurs à passer à l’électrique."

Concernant la construction de ses bornes, là encore, Electra a également anticipé les difficultés. "Auparavant, nous mettions 4 mois à avoir une borne, maintenant il en faut 8, reconnaît-il. Nous avons passé une grosse commande l’an dernier et nous en avons passé une autre au début de l’année. A ce stade, cela ne nous handicape pas."

Au cours de l’année passée, Electra a posé les fondations et les bases de son projet, mais tout reste encore à faire. Pour s’imposer comme un acteur majeur, elle entend bien redoubler d’efforts sans toutefois tomber dans le piège de l’hypercroissance au mépris de la qualité.

Mailler le territoire de bornes 

Un an tout juste après un premier tour de table de 15 millions d’euros, Electra annonce une augmentation de son capital de 160 millions d’euros réalisée auprès d’Eurazeo, qui mène ce tour, RGREEN Invest, RIVE Private Investment, Serena, le Groupe Chopard, le groupe SNCF et RATP Group. Son ambition est claire : devenir une championne de son secteur. Et pour y arriver, elle doit accélérer. Ses fonds lui permettront de poursuivre le déploiement de ses bornes - un objectif de 8 000 points de recharge opérationnels est annoncé pour 2030. Pour satisfaire à tous les besoins, Electra a déjà ouvert sa gamme de recharge en intégrant des solutions de recharge plus longues, avec des bornes de charge de 22kWh à plus de 300kWh.

La qualité du service client et de l’interface continueront également à évoluer. "Une voiture est connectée, nos bornes sont connectées, il y a tout un tas de services à imaginer" , confie Aurélien de Meaux. En parallèle, Electra, débute son internationalisation en ouvrant un bureau à Bruxelles (Belgique). Pourquoi ce choix géographique ? "Nous cherchions un pays où l’intérêt pour la voiture électrique monte mais où les infrastructures sont encore insuffisantes" et la capitale belge remplissait ses conditions par rapport à d’autres pays, plus avancés. Si le CEO admet envisager une ouverture prochaine dans un autre pays d’Europe, il tempère sa volonté d’expansion. "Nous n’allons pas ouvrir 15 pays en même temps, nous allons faire les choses petit à petit." Et pour l’aider à mener à bien ses projets, l’entrepreneur compte sur l’accompagnement de ses investisseurs, choisis avec attention.

"Nous avons deux types de fonds qui ont investi dans ce tour : des fonds d’infrastructures et des fonds corporate. Les premiers comme Eurazeo savent investir sur du long terme, Rgreen Invest et Rive Private possèdent des compétences dans les domaines de l’énergie" qui lui seront bien utiles. Quant au groupe SNCF et à la RATP, ce sont des experts du transport avec lesquels Electra envisage clairement des synergies pour développer les offres de multi-modalité dans les villes.