Avec presque 20% des émissions de gaz à effet de serre françaises, l’agriculture est le deuxième secteur le plus émetteur en France, après les transports. C’est une particularité de notre pays : à l’échelle européenne, l’approvisionnement en énergie, les transports et l’industrie conservent le podium.

De nombreux entrepreneurs français tentent de réinventer la filière agricole, en maillant toute la chaîne de production : du champ à l’assiette ! Ils apportent des solutions au problème de pollution bien sûr, mais aussi aux défis sociétaux liés au vieillissement des agriculteurs et à leur faible niveau de revenus, ainsi qu’à la problématique ancienne d’accessibilité des terres.

Réduire l’empreinte carbone

Fondée à Bordeaux en 2019, la startup Les Nouvelles Fermes vient de lever 5 millions d’euros pour bâtir la plus grande ferme d’aquaponie d’Europe, à 17 km de Paris. Une serre de deux hectares qui produira chaque année jusqu’à 250 tonnes de fruits et légumes et 60 tonnes de truite arc-en-ciel.

Les Nouvelles Fermes promettent de réduire l’empreinte carbone, avec  « deux fois moins d’émissions que l’agriculture classique. »

Thomas Boisserie, cofondateur, souligne combien la démarche allie le bon sens du « Low Tech » à des technologies récentes en matière de robotisation, IoT et Big Data. « L’aquaponie existe depuis longtemps, il s’agit de remettre au goût du jour une méthode de culture ancestrale, où les déchets des uns - les déjections des poissons - sont la ressource des autres : les légumes. » C’est ainsi que l’on peut voir des salades, des tomates et des herbes aromatiques flotter sur de petits radeaux, racines dans l’eau - une eau en circuit fermé, puisqu’elle retournera aux poissons après distillation.


Améliorer les conditions de travail

Le modèle des Nouvelles Fermes coche plusieurs cases de l’agriculture de demain : il répond aux enjeux de pollution on l’a vu, mais aussi au défi social que représentent les faibles revenus de la profession et de leurs départs en retraite massifs annoncés pour 2030. « Le salaire moyen était de 600 euros en 2023, poursuit Thomas Boisserie.”

Le modèle des Nouvelles Fermes fait la part belle aux humains : il a besoin pour fonctionner de dix salariés à l’hectare. Vingt nouveaux collaborateurs seront embauchés au printemps 2026.

Résoudre la problématique du foncier

L’accès au foncier reste un enjeu majeur pour qui veut s’installer. Dans cette optique, la startup Le Printemps des Terres (2020) s’est positionnée comme une « foncière responsable », qui achète des terres agricoles appauvries et des forêts en mauvais état, pour les restaurer puis les louer à de jeunes agriculteurs.

Thomas Boisserie et ses associés répondent eux aussi à cette problématique, puisque leurs « nouvelles fermes », très loin de l’image d’Epinal, s’implantent volontairement sur des « délaissés de foncier », en pente, bruyants, pollués…

Consommer moins d’eau

Autre sujet important, l’eau : la ressource se raréfie. Les Nouvelles Fermes consomment « sept fois moins d’eau » que l’agriculture classique.  

Toopi Organics, une autre entreprise de l'écosystème agritech qui collecte et recycle l’urine humaine, a imaginé  une « ressource inépuisable », pour en faire des solutions agronomiques et fournir aux agriculteurs des alternatives aux engrais chimiques. En récupérant l’urine plutôt que de l’assainir dans des stations d’épuration, de lourdes économies d’eau peuvent être réalisées : environ 6 000 milliards de litres d’eau potable sont utilisés en Europe pour l’urine, soit 25 à 35 % de l’eau potable consommée par les ménages européens).

Réduire la pollution des sols et soutenir la biodiversité

Le Printemps des Terres investit dans la valorisation écologique des terrains qu’il prend sous son aile : reboisement, diversification de cultures et des essences, agroforesterie, plantation et restauration de haies… En accompagnant les nouveaux agriculteurs vers une transition, l’entreprise s’engage pour la préservation des sols.

Elle tente aussi à sa mesure de sauvegarder la biodiversité, grâce à la (re)création de continuités écologiques, dits « corridors » : « elles servent à assurer les déplacements des espèces entre les réservoirs de biodiversité, qu’il s’agisse de déplacements routiniers, de dispersion, d’habitat, d’alimentation ou de migration. » Cela peut se traduire par la replantation de haies ou de ripisylves (végétation bordant les milieux aquatiques, cours d’eau…). La startup propose aussi aux entreprises de financer la restauration d’une surface de biodiversité égale à la surface de leurs bureaux.

En aval : circuit court et packaging

Thomas Boisserie évoque volontiers « les maraîchers d’antan » installés autour des villes. Ses Nouvelles Fermes se trouvent elles aussi en périphérie urbaine, à proximité des consommateurs - moins de 30 km !

Dernier exemple, côté distribution : le Drive Tout Nu a levé cet été 7 millions d’euros pour ouvrir 25 nouveaux drives et supermarchés partout en France. Ici contrairement au modèle classique, les produits sont vendus sans emballages, en vrac ou dans des bocaux que le consommateur rapporte lors de la commande suivante. Ils favorisent également des fournisseurs locaux, engagés sur des chartes responsables.

Maif Impact a choisi de soutenir les startups citées ci-dessous. Carla Pomes, chargée d’affaires au sein du fonds,  souligne qu’elle choisit d’épauler les entrepreneurs « en fonction de leur impact réel sur l’environnement et la biodiversité. C’est notre tout premier critère de sélection : un impact tangible et mesurable. Nous accordons également de la valeur au fait que les produits soient accessibles financièrement au plus grand nombre. »