Lever des fonds, c’est bien. Avoir des clients, c’est mieux. Un an après, où en sont les startups qui ont bouclé un tour de table ou connu des difficultés ? Développement, recrutement, financement, Maddyness fait le bilan. Nicolas Gueugnier, fondateur de Big Moustache, partage son expérience, un an après avoir frôlé le dépôt de bilan.

En octobre 2016, Big Moustache, expert du rasage et des soins pour la barbe, était au bord de l'asphyxie. Nicolas Gueugnier, son fondateur, se fendait d'un billet LinkedIn au vitriol dans lequel il n'épargnait personne : ni son banquier qui a décidé unilatéralement de mettre fin à l'autorisation (vitale) de découvert de l'entreprise, ni l'investisseur avec lequel il avait engagé des négociations pour lever des fonds et qui l'a planté au dernier moment. Ni lui-même, reconnaissant dans un long mea culpa ses erreurs d'entrepreneur.

Quelques jours plus tard, l'espoir renaît pourtant. Le billet, viral, est passé dans le radar d'un autre investisseur : Sia Partners, qui cherche alors à investir dans des jeunes pousses via son nouveau fonds, Studio. Ambition concrétisée en janvier 2017, avec un ticket de 500 000 euros placé au capital de Big Moustache.

À quoi ont servi les fonds levés ?

Il nous a d'abord fallu reconstruire notre outil principal, notre plateforme e-commerce. Nous avons donc entamé une grande refonte du site, dont la nouvelle version est sortie en milieu d'année. Nous voulions mettre en avant nos membres, alors qu'on ne percevait pas assez auparavant la différence entre les abonnés et les acheteurs d'un jour. Aujourd'hui, les membres de la communauté bénéficient de fonctionnalités spécifiques, d'une réduction de 10% sur les produits mais aussi de contenus spécifiques comme des conseils ou des tutoriels vidéo.

Nous avons aussi revu notre réseau de distribution : nos produits sont aujourd'hui dans les rayons de Franprix et bientôt chez Monoprix, avec lequel nous sommes en train de finaliser un accord. Cela nous permet de toucher un public plus large mais aussi de pouvoir proposer des expériences directement en points de vente. Les distributeurs cherchent des services pour concurrencer Amazon et les animations de Big Moustache avec des barbiers correspondent parfaitement à cette stratégie.

Enfin, non pas que ce soit le projet qui nous tenait le moins à coeur mais plutôt celui qui nous a pris le plus de temps, nous avons ouvert notre espace dédié, la Moustacherie, qui donne sur les rues Beaumarchais et Amelot dans le 11ème arrondissement de Paris. Nous ne voulions pas rester 100% en ligne, parce que les clients ont besoin de tester les produits, de les voir... tout comme pour nos barbiers ! Avoir un magasin physique, c'est un gage de crédibilité pour eux. Notre espace a été pensé au-delà du simple salon de barbier : il y a un espace display pour les produits, le salon de barbier, un concept-store où nous présentons les produits d'autres marques que nous voulons mettre en avant et puis... nos bureaux. Cela nous permet d'échanger avec nos clients, d'avoir leurs retours très facilement et très directement.

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Qu’est-ce que la levée de l’année dernière a changé pour Big Moustache ?

Avant la levée et l'arrivée de Sia Partners au capital, nous étions une marque en construction : nous avions besoin de ressources humaines et de compétences. 2017 a vraiment été une année de transition où nous avons oeuvré pour repositionner notre marque et atteindre la rentabilité sur notre partie e-commerce. Aujourd'hui, Big Moustache est une marque installée dans le paysage.

Comment avez-vous appréhendé les relations avec les investisseurs ?

Quand Matthieu Courtecuisse, le fondateur de Sia Partners, m'a contacté après avoir lu mon billet, il m'avait dit que la valeur ajoutée du fonds était l'expertise de ses consultants. Depuis l'arrivée du fonds au capital, j'ai une consultante attitrée, que je vois une fois par semaine et avec laquelle je suis quasi quotidiennement au téléphone. Cela m'a permis de prioriser et de faire le tri entre les actions vraiment pertinentes... et les autres. Nous avons repensé tout le modèle de Big Moustache et Sia a été presque comme un associé opérationnel en la matière.

Si c’était à refaire, y-a-t-il quelque chose que vous changeriez ?

Mon erreur de départ, c'était d'entamer seul l'aventure de la levée de fonds [le cofondateur de Big Moustache a quitté la startup en 2015, NDLR]. C'était une grosse erreur et c'était la mienne, j'en prends l'entière responsabilité. Je ne pouvais pas partager mes idées avec d'éventuels associés, être challengé... Personne ne pouvait m'aider à trancher et j'étais pollué par des projets sur lesquels je n'aurais jamais dû passer autant de temps.

Big Moustache

Quels sont les axes de développement pour les prochains mois ?

Nous allons déjà développer la vente en ligne et l'abonnement parce que nous savons que des concurrents pourraient arriver sur le marché et nous voulons avoir une longueur d'avance.

Nous allons également développer notre réseau physique, à la fois en propre et sous forme de franchise. Nous visons 5 à 10 ouvertures de boutiques en France en 2018. Ce réseau sera complété par une offre ambulante, que nous testons en ce moment à la gare Saint-Lazare, pour deux mois. Nos barbiers s'installeront de façon éphémère dans des gares, aéroports et centres commerciaux, que nous avons identifié comme des lieux de passage dans lesquels l'offre peut se déployer.

Aujourd'hui, notre équipe compte une petite dizaine de personnes et nous cherchons à lever à nouveau des fonds pour pouvoir recruter des profils seniors.