Le 1er février dernier, la Maddy Keynote réunissait plus de 4 500 participants autour de la Cité du futur. L’occasion de débattre des enjeux de la ville de demain et plus particulièrement des questions de vivre ensemble dans celle-ci. Entre les risques de cyberattaques majeures et l'essor des fake news, difficile de rester optimiste.

Vivons heureux, vivons cachés

Il est certain que des menaces pèsent déjà et pèseront encore sur la vie privée dans cette cité du futur qui sera hyper connectée et ouverte, que ce soit en termes de protection ou de traitement des données. "C'est un vrai challengeIl faut accompagner les acteurs de manière pédagogique, notamment sur la technologie pour que tout soit sécurisé, surtout en termes d'anonymat", confie Nicolas Bohy, Pointnext General Manager chez HPE. Même son de cloche chez Olivier Desbiey, Innovation & Foresight Manager à la CNIL : "On ne peut pas laisser les gens dire qu'ils n'ont rien à cacher. D'autant que ce qui est légal aujourd'hui pourrait très bien ne pas l'être demain. La donnée ne doit pas être utilisée pour amener la société vers le totalitarisme", explique-t-il.

À relire : Comment la RGPD va vous empêcher de growth hacker tranquille

Pour Delphine Woussen, directrice SmartCity chez Orange, la clé, c'est la transparence : s'en tenir au consentement du "opt-in/opt-out", permettre l'anonymat... Or, pour tout ça, il y a des lois qui existent et qui doivent permettre d'avoir la bonne éthique. L'enjeu c'est aussi d'assurer la sécurité des données, même en cas de cyberattaque. "Il y a quelques années on pouvait imaginer construire une muraille de Chine autour de l'entreprise, mais aujourd'hui ce n'est plus envisageable car tout est connecté, donc hackable" rappelle Nicolas Bohy. Aujourd'hui les enjeux sont du côté de la rapidité de la réaction et des réponses à apporter pour limiter les dégâts, grâce notamment à la cryptographie.

andre-francois-518771

Mais le maillon faible aujourd'hui, c'est nous : que ce soit en tant que citoyens quand nous ne mettons pas à jour nos applications, ou en tant qu'employés quand nous consultons les données de l'entreprise hors des serveurs sécurisés. Or sur ces questions, de sécurité ou de traitement des données, il faut réellement un volet éducatif, sans quoi rien ne pourra réellement changer.

Ensemble, plus créatifs

Il faut aussi instaurer une véritable culture de la collaboration, sans quoi il sera impossible de répondre aux enjeux de la ville de demain, surtout concernant les données. Mais comment faire collaborer un grand groupe aux process très verrouillés avec une startup qui va vite ? "Chez DataCity, pour y parvenir, on adopte des méthodes agiles en les appliquant aux temps plus longs des marchés publics par exemple" confie Emmanuel Léger, directeur général du programme DataCity au Numa.

À relire : Comprendre la relation startups/grands groupes en 6 chiffres clés

La collaboration comme solution pour dépasser les frictions qui peuvent naître des différences d'échelle donc, mais pas seulement : "On est souvent contactés par les équipes qui gèrent l'innovation dans des entreprises dans le même secteur que nous, et non pas par les directions financières. Donc ça dépasse la dichotomie public/privé, il y a d'autres formes de collaboration à tenter" analyse Jean-Marc Nourel, Country Manager France de Mangopay.

"C'est loin d'être un simple discours, acquiesce Christine Grezes, directrice développements immobiliers au Numa. La collaboration est essentielle pour parvenir à avancer, et notamment la collaboration avec les citoyens : il faut les intégrer dans les process de décision à un moment ou un autre." Travailler collectivement en bonne intelligence, pour que tous les acteurs soient en mesure de faire face aux enjeux de la ville de demain.

Tous citoyens, tous connectés

Et si la technologie était l'outil parfait pour cela ? Quelle place pour Internet à l'heure des débats sur la citoyenneté, la gouvernance et l'inclusion, mais aussi des fake news ? Des questions auxquelles Sébastien Liebus, fondateur du Gorafi, a été obligé de répondre, un peu malgré lui, "alors qu'on n'est pas un danger, on n'est que satirique et à ce sens on est pas supposés être concernés par une éventuelle loi sur les fake news".

visuel le gorafi 2

Ce n'est pas pour autant qu'il n'y a pas un vrai travail à faire, notamment chez les jeunes, pour les éduquer à repérer les manipulations dont ils peuvent être victimes. "C'est tout l'objet de la loi protection numérique qui a permis de redonner du pouvoir aux citoyens, en instituant le droit à l'oubli automatique pour les mineurs par exemple" détaille Luc Belot, ancien député du Maine-et-Loire. Ce qui demande a priori que les citoyens connaissent leurs droits, et que les représentations soient plus nuancées, notamment dans les médias.

"C'est vrai qu'il y a des questions à se poser autour des technologies et de leurs usages. Il y a une vraie anxiété autour du progrès technique, pourtant il peut aussi avoir du bon. Reprendre la main sur celui-ci est même souhaitable, car il peut être une vraie source d'optimisme" plaide Camille Pène, directrice de Futur.e.s chez Cap Digital. "Ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de dérives ou de progrès à faire, mais c'est vrai que les usages doivent être au centre de ces technologies" conclut Luc Belot.