5 septembre 2018
5 septembre 2018
Temps de lecture : 6 minutes
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Lille, une métropole entre passé industriel et futur numérique

Après avoir été le fer de lance de l'économie française pendant la révolution industrielle, Lille s'est heurtée à une crise de l'emploi qui a mis à mal son tissu économique. Mais c'était sans compter sur le train de la French Tech dans lequel elle a su grimper dès le départ. Aujourd'hui, elle mise sur des technologies de pointe sans pour autant tourner le dos à son héritage industriel.
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De Lille, certains ne connaissent que les hauts fourneaux et les terrils, ces collines artificielles construites par accumulation de résidus miniers. Une image d'Épinal à mille lieues du dynamisme actuel de la métropole, capitale de la culture en 2004 et porte d'entrée de l'Europe du Nord. Labellisée "Coeur de la FrenchTech" dès la première vague en 2014. La métropole n'a depuis cessé de s'illustrer par la richesse de son écosystème. D'après les chiffres de la direction attractivité et innovation de la Métropole Européenne de Lille (MEL), qui regroupe plus de 90 villes autour de l'agglomération (dont Roubaix et Tourcoing), elle totaliserait ainsi plus de 3500 entreprises du numérique et 10 fois plus d'emplois dans le secteur.

Parmi elles, des géants comme OVH, l'un des leaders mondiaux de l'hébergement internet, installé depuis près de 20 ans à Roubaix et qui n'a jamais envisagé de quitter la région, même en pleine hypercroissance ; mais aussi des jeunes pousses plus confidentielles et tout aussi prometteuses : Mapwize, un GPS d'intérieur utilisé par les participants au WebSummit ou Vaxinano et ses nouveaux vaccins innovants contre les maladies infectieuses.

L'éducation au service de la détection des talents

Mais Lille n'a pas attendu d'obtenir son macaron pour organiser l'écosystème de la région : depuis 2009, elle accueille EuraTechnologies, un pôle d’excellence et d’innovation implanté sur 80 000 mètres carrés à l'initiative de Raouti Chehih et Pierre de Saintignon. EuraTechnologies était d'ailleurs le premier incubateur et accélérateur de France avec 300 incubés avant de se faire dépasser par Station F. L'objectif de ce véritable bras armé de l'innovation à Lille ? Accompagner la mutation d’un territoire industriel vers l’économie du futur.

On cherche à penser global en agissant local, à valoriser ce savoir-faire qui n'était pas optimisé, faute de synergies

Raouti Chehih, cofondateur et directeur d'EuraTechnologies

Avec un premier défi : résister à la captation des talents du territoire par les métropoles alentour (Paris, Londres, Bruxelles) mais aussi le voisin outre-Atlantique. Pour limiter cela, "EuraTech" n'a eu de cesse de mener un vrai travail de repérage des talents pour les amener à se fixer dans la région le plus tôt possible - sans oublier d’attirer les cerveaux européens et mondiaux, notamment via un partenriat avec l'université de Stanford. "C’est notre plus grande ambition : pour y arriver on s’est dit qu’il fallait aller les chercher le plus tôt possible", explique Raouti Chehih.

Une mission qui a motivé le lancement du projet Winov, un espace de 25 000 mètres carrés dédié à l’entrepreneuriat et à l’éducation, ouvert aux curieux de 7 à 77 ans. À chaque tranche d’âge correspondra un programme qui devra permettre aux participants d'acquérir les bases dans plusieurs domaines, de s’orienter et se réorienter. Ce programme viendra s’ajouter à EuraTech Kids, qui forme tous les ans un millier d'enfants à la robotique et au code. "Chaque année on visite jusqu'à 300 collèges et lycées pour sensibiliser les enfants aux enjeux du numérique. L’objectif, c’est aussi d’emprunter de nouveaux chemins pour sortir de l’élitisme qui caractérise encore trop souvent le numérique", assène cet enfant d'ouvrier né dans le Nord, qui a découvert internet dans les années 1990 avant de visiter un incubateur de la Sillicon Valley, convaincu de l'avenir de l'entrepreneuriat.

Un territoire protéiforme entre passé et avenir

Pour y arriver, Raouti Chehih a très vite compris l’intérêt de mailler tout le territoire grâce à une stratégie d’essaimage, notamment à Roubaix (BlancheMaille) avec un écosystème de 13 000m² dédié à l’accueil et au développement de champions du commerce connecté et à Willems avec son nouvel incubateur collaboratif et expérimental de 1000m² exclusivement dédié aux porteurs de projets AgTech. Car si le territoire se projette vers l'avenir, il ne renie pas son passé, bien au contraire : à EuraTech, les startups du retail, du textile et de l'agriculture, secteurs traditionnels de la région et fers de lance de l'économie française pendant des années, sont au moins aussi nombreuses que leurs consoeurs de la blockchain, de l'EdTech ou du hardware.

On veut favoriser l’émergence d’ouvriers spécialisés dans le numérique, sans tourner le dos à notre histoire mais pour entrer dans le futur. C’est ça l’économie de demain

Raouti Chehih

Quatrième agglomération par sa taille après Paris, Lyon et Marseille, la Métropole Européenne de Lille est la deuxième ville la plus dense de France. Elle peut aussi compter sur un environnement particulièrement favorable, avec un vivier de centres universitaires et de laboratoires de recherches (250 dont 6 d'excellence), plusieurs grandes écoles de renom (l'EDHEC, l'HEI, l'IEP de Science Po...) et une situation géographique que beaucoup lui envient, à quelques kilomètres des grandes capitales européennes de la tech que sont Londres, Bruxelles et Amsterdam.

Cette proximité, la métropole de Lille a très vite voulu en tirer parti via la signature de partenariats avec la capitale belge pour faire la promotion commune de leurs écosystèmes respectifs et permettre les synergies. Mais aussi avec les Pays-Bas, dans le cadre duquel a été organisé un hackathon sur le design à l’occasion de Lille 2020 capitale du design. "Les agences de la MEL et de la ville de Londres travaillent depuis novembre dernier à favoriser les synergies, notamment autour des scaleups. La région a même ouvert un bureau à la Chambre de commerce franco-britannique", se félicite-t-on à la direction attractivité et innovation de la MEL.

Et pour pallier le manque d'investisseurs, encore trop concentrés à Paris, la MEL mise sur l'accompagnement, en communiquant activement sur les opportunités de financement de la région et de Bpifrance, tout en soutenant l'organisation d'événements de mise en relation entre startups et VCs. C'était notamment le cas de la quatrième édition de l'Euratech'Day Summer, qui se tenait le 21 juin dernier sur le campus d'EuraTechnologies. L'occasion pour 40 jeunes pousses de faire la démonstration de leurs produits et de rencontrer les investisseurs en marge des keynotes du spécialiste de l'intelligence artificielle Laurent Alexandre et du fondateur de Talensoft, Alexandre Pachulski.

Et parmi elles, Permettez-moi de construire, dont le chief brand officer, Marc-Antoine Calzada, chante les louanges du programme d'accélération d'EuraTechnologies : " ça a vraiment été une super expérience sur tous les points, l’accompagnement est bon, on a même eu la chance d’aller à Lisbonne. Et on a gardé contact bien après avoir quitté le programme ". Pour cause, quasiment tous les collaborateurs de Permettez-moi de construire sont de la région et, avec la signature d’un partenariat avec Leroy-Merlin, ils ne se voyaient pas déménager.

Et puis, ici, on a tout ce dont on a besoin. Lille est réellement en mesure de concurrencer Paris, même si on a plus de mal à obtenir de la visibilité. Voilà pourquoi il faut venir nous rendre visite !

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