C'est une forme de rédemption pour Yubo. Après avoir été montrée du doigt pour ses dérives, l'application de discussion entre ados annonce ce jeudi avoir levé 11,2 millions d'euros auprès d'Iris Capital, Idinvest Partners, Alven, Sweet Capital et Village Global. Utilisée par quelque 25 millions d'adolescents ou jeunes adultes âgés pour la plupart de 15 à 20 ans, elle a trouvé son public majoritairement dans les pays anglophones, aux États-Unis, au Royaume-Uni mais aussi en Australie. Cette opération financière doit lui permettre de s'étendre, notamment au Japon et au Brésil.

Une expansion géographique qui sera réalisée depuis Paris, où la startup a rapatrié ses bureaux et son siège social après sa naissance à Londres. "L'écosystème parisien se développe, la France a vu des applications sociales et consumer se lancer récemment et avoir de belles trajectoires, comme Zenly ou Voodoo, plaide Sacha Lazimi, cofondateur de Yubo. De nombreux business angels, des fonds français et européens mais aussi de nouveaux entrepreneurs qui ont réussi et peuvent prodiguer des conseils sont désormais actifs en France. Nous avons pensé que c'était le bon moment pour revenir et bénéficier des synergies qu'offre ce qui est en train de devenir le nouveau hub européen majeur."

Convaincre les ados...

Cette nouvelle opération financière - Yubo avait déjà réuni un total de 10 millions d'euros auprès de business angels depuis sa création en 2015 - est un gage de confiance des investisseurs dans un secteur hautement concurrentiel. " Attirer, réunir et fédérer la Génération Z sur une application ou un site est un challenge pour tout
l’écosystème numérique et la réussite mondiale de Yubo nous a tout de suite convaincus du potentiel de
l’équipe et de leur produit ", s'enthousiasme Gil Doukhan d'Iris Capital. En effet, face à Twitch, Snapchat et autres TikTok, s'imposer dans les smartphones des ados relève du tour de force.

C'est pourquoi Yubo a souhaité se différencier du modèle classique de transposition de son réseau d'amis dans la sphère numérique. "Notre concept est à l'opposé des réseaux sociaux qui existent actuellement, défend Sacha Lazimi. Nous permettons à la génération Z de créer des amitiés, pas de se connecter à ceux qui sont déjà leurs amis. Nous répondons à leur besoin de sociabilisation, qui s'exprime notamment en ligne pour cette nouvelle génération. Il s'agit de dupliquer en ligne les interactions qu'ils peuvent avoir dans la vraie vie."

... tout en rassurant les parents

C'est après avoir mis au point deux applications durant leurs études que les trois cofondateurs ont fini par imaginer Yubo. L'appli rassemble ses utilisateurs au sein de groupes thématiques de discussion d'une dizaine de personnes en moyenne. Les "leaders" de la discussion interviennent en vidéo ou audio tandis que les autres participants réagissent à l'écrit. Les utilisateurs sont libres de choisir avec qui ils décident de converser, s'inspirant ainsi de la vie réelle comme l'évoque Sacha Lazimi.

Autant de fonctionnalités innovantes qui n'empêchent pas Yubo d'être menacé par les mêmes problématiques que Twitch ou TikTok, à commencer par les risques de harcèlement entre utilisateurs. Afin de devenir "la plateforme la plus sûre du monde", l'application a donc misé gros sur une modération combinant des algorithmes de reconnaissance sémantique et visuelle (afin d'éviter la diffusion de nudes, entre autres) et une vérification manuelle. Avec plus de 50 000 discussions vidéo par jour qui durent plus de cinq minutes, les modérateurs ont fort à faire. Yubo ne révèle pas leur nombre, simplement qu'ils ne font pas partie des 50 salariés que comptera l'entreprise d'ici quelques mois et qu'ils sont installés tout autour du globe "pour que la modération puisse être effective 7 jours sur 7".

En outre, Yubo a également mis en place un système de vérification d'identité à plusieurs niveaux. L'algorithme de reconnaissance visuelle est là aussi sollicité pour détecter si la photo soumise à l'inscription provient d'une banque d'images et si l'âge de la personne photographiée correspond aux conditions d'utilisation du réseau social. En cas de doute, Yubo exige une pièce d'identité pour procéder à la création du compte. Autant de garde-fous que les actionnaires ont choisi de saluer financièrement. " Yubo offre un espace de grande liberté d’expression, tout en veillant à la sécurité de ses utilisateurs. Notre participation à ce nouveau tour de table atteste de notre confiance dans le développement de cette success story française ", appuie ainsi Nicolas Debock d'Idinvest Partners.