Êtes-vous payé·e à votre juste valeur ? Répondez honnêtement. Je vais répondre le premier et, si je suis tout à fait honnête, en plus de 20 ans de startup, j'ai été sous-payé plus souvent que trop payé. Je suis prêt à parier que votre réponse est similaire. Je pensais que le salaire n'avait pas d'importance, parce que j'aime ce que je fais. Mais, en chemin, j'ai appris qu'il est essentiel d'obtenir dès le départ le salaire qui nous semble juste.

Alors, comment faire ? C’est simple. Nous payons à nos employés de startup ce qu'ils valent, en évaluant leur motivation, en créant de la valeur et en évitant quelques erreurs élémentaires. Mais ne me méprenez pas. Cela ne correspond pas toujours aux attentes réelles de nos startups. Nous devrons donc commencer par poser les bases.

Ne pas enchaîner les petites erreurs

En tant que leaders, nous devons évaluer nos employés correctement ; et en tant qu’employés, nous devons évaluer nos emplois correctement. Cela nécessite d'avoir un rôle d'équilibre lorsque nous recrutons de nouvelles personnes, et quelques appréciations aberrantes ici et là peuvent finir par mettre tout un système à plat.

Oui, c'est sûr, peut-être que nous offrons à cette employée rock star un salaire de départ un peu plus élevé pour l'arracher à la concurrence ; ou peut-être que nous avons à faire à un développeur qui ne réalise pas l'ampleur de son talent. Nous pouvons faire ces erreurs une fois ou deux mais cela peut rapidement aboutir à une crise majeure à mesure que nous nous développons. Chaque startup réussie arrive à un tournant, et à ce moment-là, nous sommes confrontés à une hausse ou une baisse des salaires pour s'adapter au marché.

L’ancienne solution : les fourchettes de salaires

Il y a environ 10 ans, j'ai cessé de mettre des fourchettes salariales sur les offres d'emploi, parce que cela crée une fausse attente. J'estime qu'il y a de vilains écarts dans le salaire des employés pour de mauvaises raisons, à commencer par les biais de genre jusqu'à la hype de l'école dont le candidat sort. Mais les échelles salariales et les échelons de salaire sont une mauvaise solution à un mauvais problème.

Ce qui se passe, c'est que nous finissons par rémunérer chaque employé sur la base de l'expérience — ce qui équivaut généralement au temps passé — et au niveau d'éducation — qui est souvent amélioré par des certifications foireuses. C'est très difficile d'évaluer cela de manière équitable, alors c'est plus simple de payer tout le monde de la même manière : pour un·e salarié·e entre trois et cinq ans d'expérience et un Bac+5, disons entre 50 000 et 75 000 euros brut annuels. Voilà, ça réduit l'incertitude à une fourchette de 15 000 euros. C'est mieux mais ce n'est toujours pas bien.

La bonne option est de rémunérer nos employés en fonction de leur valeur individuelle — ce qu'ils apportent au résultat net — et de la motivation individuelle — ce dont ils ont besoin, dans une certaine mesure.

Évaluer la valeur et la motivation

Nous devrons rapidement évaluer la motivation des candidats recrutés, idéalement lors de l'entretien téléphonique avant le premier entretien physique. J’aime utiliser ces deux questions dans cet ordre :

  • Combien voudriez-vous être payé lors de votre prochain emploi ?
  • Quel est le salaire minimum pour lequel vous viendriez travailler en étant heureux ?

La première question est toujours longue, avec peut-être un chiffre ou une fourchette. La deuxième question est maladroite parce qu'une fois qu'ils ont répondu à la première question, la deuxième réponse devient un signal de ce que le candidat veut vraiment. Ils savent que s'ils annoncent un chiffre trop bas, ils minorent leur enthousiasme quant au poste et à l'entreprise. S'ils sont trop gourmands, ils passent pour des mercenaires. La plupart du temps, ils finissent par répondre honnêtement à la deuxième question.

Si le chiffre qu'ils annoncent dans leur deuxième réponse est dans notre fourchette, nous n’aurons plus qu’à exclure les candidats qui ne correspondent pas à nos valeurs.

Première exception : rémunérer l'expérience, pas l’ancienneté

Voici pourquoi l'expérience est importante : nous allons vouloir des gens autour de nous qui savent de débrouiller de A à Z, quels que soient les outils ou les méthodes que nous utilisons pour y parvenir. Travailler dans une startup avec des collègues qui ont 20 ans et travailler dans une startup avec " les vieux jeunes " sont deux expériences différentes. La deuxième situation est beaucoup plus facile à gérer, à la fois pour réaliser les projets et dans la façon de gérer les choses lorsqu'elles tournent mal. " Oui, nous venons de perdre notre plus gros client. Voici ce que nous allons faire. "

Les personnes expérimentées sont nos ancres, et chaque startup en a besoin d'au moins une, sinon plus. Ces gens-là sont chers parce que leurs besoins et leur motivation sont différents. Ils ont des prêts à rembourser, des enfants, une retraite complémentaire qui les accaparent et ils ont probablement appris des leçons de vie coûteuses en chemin.

Embauchez des personnes expérimentées, de préférence celles qui ont des cicatrices et subi des échecs. Mais ne payez pas trop cher pour le senior qui a passé 20 ans à faire la même chose dans une seule entreprise sans rien qui ressorte sur son CV. S'il a toujours fait la même chose de la même manière, il ne comprendra jamais pourquoi nous faisons ce que nous faisons.

Deuxième exception : ne payez pas l'intelligence trop cher

Ne confondez pas intelligence et vision. Il y a des années, nous avons embauché ce développeur super intelligent alors que nous avions désespérément besoin d'un système plus rapide avec moins d'erreurs. Dès le départ, je n'ai pas senti ce gars et je me suis élevé contre son embauche. J'en avais vu des dizaines de types comme lui. Il a donné l'impression de pouvoir faire de grandes choses mais quand il a été temps de créer de nouvelles choses qui fonctionnaient correctement et dans les délais, il n'a pas su gérer la pression. C'était une catastrophe. Un coût aussi. Leçon apprise : l’intelligence n’est pas un bon indicateur de la capacité à exécuter.

Nous ne devrions pas non plus être les marionnettes des prétentions salariales des étudiants tout juste sortis des universités et des écoles d'ingénieur ou de code. Nous allons signer avec quelqu'un qui a une solide formation, de bons résultats, est très intelligent... mais n'a jamais produit quoi que ce soit pour un client. Ils viendront avec des exigences de salaire à six chiffres et l'obtiendront probablement quelque part. Laissez quelqu'un d'autre faire cette erreur.

Troisième exception : ne sous-payez pas les talents silencieux

Lorsque nous mettons un point d'honneur à engager des gens qui seront de vraies valeurs ajoutées à l'entreprise, nous devons insister pour ne jamais sous-payer les talents qui ne demandent pas à être payés ce qu'ils valent vraiment. Le candidat qui vaut 75 000 euros bruts annuels et veut 100 000 euros voudra 125 000 euros l’année prochaine. Le candidat qui vaut 75 000 euros bruts annuels et en acceptera 50 000 sera probablement d’accord pour être payé 50 000 euros l’année prochaine.

Mais si nous sommes les premiers à leur proposer 75 000 euros bruts annuels, ils n'iront jamais ailleurs parce que nous avons vu leur valeur quand personne d'autre ne l'a fait.
C'est ce qui est important pour eux, pas l'argent. Nous devons donc intensifier nos efforts, même lorsqu’il est douloureux de les dépasser à court terme.

Une réponse possible : les contrats, les primes et les calendriers

Un des fondateurs de ma startup a toujours voulu embaucher des salariés comme vous embauchez des athlètes, avec des contrats et des avenants, un salaire fixe, des parts variables... J'ai toujours été surpris de voir que nous envoyons un contrat de travail de 10 pages qui ressemble à tous les autres contrats de travail de 10 pages, mais qui n'aborde ni ce que les employés apportent à l'entreprise ni leur motivation.

C’est un des points qu'il faut changer. Lorsqu'un dirigeant négocie un contrat, ce contrat comprend le salaire, les parts de l'entreprise et toutes les choses "normales", mais il doit aussi aborder les mécanismes variables, les primes et même les étapes importantes. En d'autres termes, il spécifie payer à l'employé ce qu'il vaut avec l'argent qu'il va générer pour la startup : comment, quand et combien.

De cette manière, des cadres expérimentés et talentueux peuvent travailler pour le minimum qui va les rendre heureux chaque jour - ma deuxième question salariale - et encore être en mesure d'obtenir ce qu'ils souhaitaient gagner - ma première question salariale. Tout le monde est gagnant. L'employé obtient ce dont il a besoin et les startups obtiennent des talents qu'elles n'auraient pas pu se permettre sans que ces derniers contribuent à leur propre rémunération !

Cependant, ce type de contrat atteint un pic ridicule lorsqu'un PDG obtient des millions de dollars parce qu'il a augmenté le chiffre d'affaires d'un grand groupe alors que les employés de ce groupe, eux, n'obtiennent rien, même si ces milliards ne pourraient pas être faits sans eux. Je vous demande donc : pourquoi n'est-ce pas une norme de pratique des contrats de travail pour chaque employé ? Une des réponses à cette question est que si nous commençons à payer sur la base de la motivation, nous finissons par conditionner toute une série d'objectifs différents. Mais n’est-ce pas ce que nous faisons déjà ?

Lorsque nous décidons d'une rémunération à partir de fourchettes, en utilisant l'ancienneté et le niveau de diplôme, nous supposons simplement que la motivation de chacun est l'argent et qu'il existe un véritable chemin vers la réussite. Une fois que nous remplaçons ces deux critères par la valeur apportée par le futur employé, nous avons la flexibilité de remplacer les fourchettes de salaire par la motivation.

Une deuxième objection est qu'une grande entreprise établie de longue date - comme le sont les grands groupes - ne peut pas faire ce changement sans voir leur masse salariale exploser ni perturber leur politique RH. Oui, ils peuvent en assumer le coût mais les clients et les investisseurs vont payer la facture.

Mais les startups sont censées créer une nouvelle norme. Valeur et motivation, jalons et incitations... Lorsque nous faisons les choses de cette manière, nous obtenons ce dont nous avons besoin de la part de chaque employé et chaque employé obtient ce dont il a besoin de notre part. C'est aussi une belle façon de remettre en question les employés déjà présents dans l'entreprise. Ils sont ainsi obligés de devenir des talents à forte valeur ajoutée parce qu'ils ne peuvent pas évoluer assez vite pour s'adapter.

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Retrouvez l'article original en anglais sur la page Medium de Joe Procopio

Joe Procopio est un entrepreneur " multi-exit " et " multi-échecs ". Il développe actuellement Spiffy, une plateforme dédiée à la maintenance de véhicules " on-demand ". Auparavant, Joe a fondé et vendu Automated Insights à Vista Equity Partners et lancé puis vendu ExitEvent à Capitol Broadcasting Corporation. Vous pouvez obtenir des conseils auprès de Joe sur son site internet dédié.