Republication du 7 avril 2021

Selon l’Autorité des marchés financiers (AMF), plus de 400 000 Français ont emprunté le chemin de la Bourse en 2020. Un nombre important expliqué en partie par l’introduction en Bourse de la Française des Jeux qui a suscité la curiosité de nombreux néophytes, et par les opportunités offertes par le marché lors du premier confinement. Une couverture médiatique des marchés financiers plus large, associée à un capital disponible plus important et à un temps de loisir accru pour emmagasiner des connaissances financières pendant ce dernier a permis à de nombreux particuliers de découvrir les marchés financiers en 2020.

Pourtant, il est encore trop tôt pour observer un véritable changement de tendance. Car les Français épargnent toujours, et même plus qu’auparavant. En 2020, la collecte du Livret A a atteint des sommets : ces derniers y ont placé 26,4 milliards d'euros, soit plus de deux fois plus qu’en 2019. C’est tout le paradoxe français, si emblématique de notre pays. Alors que le taux de rendement du Livret A est inférieur à la hausse du coût de la vie (celui-ci a été abaissé à 0,5 % en février 2020), provoquant une perte du pouvoir d’achat pour les 55 millions de détenteurs, ces derniers continuent d’y flécher leur épargne.

Diversifier ses placements pour une stratégie d’investissement long-termiste

Pourtant, diversifier ses placements sur des supports plus rémunérateurs est une pratique permettant d’espérer du rendement. Car ni les 0,5 % versés par le Livret A, ni le Livret de développement durable et solidaire (LLDS), ni les fonds en euros, n’offrent de perspectives aussi intéressantes. Bien sûr, la crise sanitaire a renforcé une culture de l’épargne déjà très prégnante. Mais comme l’a observé Eric Lombard, directeur général de la Caisse des Dépôts, cette épargne est devenue "forcée, contrainte" . Les Français se sont tournés vers le Livret A quand ils ne pouvaient pas consommer pendant les confinements en raison de la fermeture des magasins. Las de ce manque cruel d'attractivité des placements sûrs, les 400 000 nouveaux investisseurs identifiés par l’AMF ont souhaité reprendre le contrôle de leurs fonds. Et illustrer, à l’occasion, une réelle évolution du comportement boursier des Français.

Selon le dernier Observatoire de l'épargne, 33% des 25-34 ans disent envisager d'investir dans les prochains mois, contre 17% des personnes de 45 ans et plus. Dans un contexte de crise plein d’incertitudes pour les jeunes générations, notamment au niveau professionnel, ces dernières ont compris qu’elles pouvaient s’appuyer sur d’autres ressources. Mais aussi donner du sens à leurs placements, et à cette quête de rendement. Car prendre le chemin de la Bourse signifie pouvoir contribuer au développement économique d’entreprises partageant nos valeurs. Et pouvoir soutenir les causes les plus chères à nos yeux, de l’écologie à la bonne santé économique des firmes françaises en passant par l’expansion des technologies de demain.

Mais pour que cette révolution du comportement boursier des Français perdure en 2021 et même bien au-delà, ces derniers devront s’épanouir financièrement dans un environnement favorable.

Appuyons nous sur toutes les énergies possibles

Les différents confinements nous ont appris à être plus à l’aise que nous l’étions déjà avec les outils digitaux. Cette nouvelle maîtrise de la tech, nous pouvons la mettre à profit en faveur de l’investissement car de multiples acteurs, issus des nouveaux services financiers, plus modernes, plus ergonomiques, ont émergé. Intuitifs, ils donnent une nouvelle dimension à cette pratique et à l’accès aux connaissances financières. En parallèle, le gouvernement a déjà commencé à initier des actions pour encourager les Français à se lancer dans l’aventure financière. À l’image de la ministre déléguée chargée de l'Industrie, Agnès Pannier-Runacher, qui avait appelé les Français à investir en bourse en mars dernier au début de la crise sanitaire et économique afin de soutenir l’économie française.

Cependant, de simples encouragements, aussi louables soient-ils, nécessitent d’être accentués. Les pouvoirs publics doivent proposer des mécanismes de soutien à l’investissement sur le long-terme pour opérer un changement de paradigme. À ce sujet, le lancement du “Label Relance” en octobre dernier a envoyé un signal positif. Son objectif d’orienter l’épargne des Français vers des placements répondant aux besoins de financements de l’économie française va dans le bon sens : celui d’un investissement utile, impliquant l’ensemble des particuliers.

Nous y sommes. 2020 a permis de laisser entrevoir le début d’un changement d’attitude des Français vis-à-vis des marchés boursiers, malgré une culture de l’épargne encore trop prégnante. Avec le soutien des nouveaux services financiers, et un accompagnement plus concret des pouvoirs publics, 2021 pourrait être l’année de la confirmation. Et mettre fin au paradoxe français ?

Valérie Kalifa, directrice marketing France d’eToro, plateforme de trading en ligne