Les startups et entreprises innovantes françaises sont encore peu nombreuses à faire part de leur intention d’entrer en Bourse. C’est pourtant l’étape clé pour démontrer la puissance d’un écosystème biberonné aux levées de fonds « records » et aux labels gouvernementaux. Dans l’air du temps, Doctolib, ManoMano ou Mirakl ont le profil de l’emploi mais pour l’instant, leurs dirigeants n’ont dévoilé aucune intention en ce sens. OVHcloud a mis son projet en stand by.
Dans les pas d’Ekwateur, mais avec des ambitions bien plus importantes, Believe a pris les devants. Créée en 2005, Believe n’est plus une startup. Mais bien une entreprise mature en forte croissance. À la croisée des labels des majors de l’industrie musicale – Universal, Warner et Sony – et experts de la diffusion en streaming, elle a ainsi annoncé il y a quelques jours avoir reçu l’aval de l’Autorité des marchés financiers (AMF) pour mener cette opération qui pourrait avoir lieu d’ici à la fin de l’année 2021. « La question d’une IPO a commencé à se poser lorsque trois feux sont passés au vert, explique à Maddyness Joy Sioufi, partner chez GP Bullhound, une banque d’investissement britannique qui conseille Believe depuis 2014. D’abord, l’entreprise fait état d’un profil de croissance rentable. Ensuite, elle a restructuré sa gouvernance et procédé à une dizaine d’acquisitions. Et enfin, elle est en très bonne posture. »
Les actionnaires ont aligné leurs agendas
Avant cette annonce, plusieurs acquéreurs s’étaient préalablement positionnés. Une solution écartée car les actionnaires de la scaleup avaient des divergences de calendrier en matière d’exit. Selon le document officiel d’homologation de l’opération par l’AMF, le capital de Believe se répartit entre le fonds californien Technology Crossover Ventures (49,64 %) — qui a financé Spotify ou Netflix — Ventech (20,34 %) le fondateur Denis Ladegaillerie (15,04 %), XAnge (8,06 %), GP Bullhound (2,57 %) et les autres actionnaires, tels que des family offices (4,35 %).
Une levée de fonds en interne, menée en 2019, a permis de « rééquilibrer les agendas » des uns et des autres, selon Joy Sioufi. Ce qui a permis d’envisager dès la fin 2020 une introduction en Bourse. « Cette option permet à l’entreprise de garder sa totale indépendance, contrairement à une vente à des fonds d’equity qui comporte une notion de dette » , relève-t-il également, indiquant qu’il s’agit d’un « cheminement qui a pris plusieurs années » . Il a fallu, pour Believe, se préparer en établissant des statistiques claires. Le top management de l’entreprise a évolué au gré de promotions et de recrutement de profils expérimentés, afin d’être suffisamment mature pour être en capacité de « converser avec les divers acteurs institutionnels ». Une étape indissociable de toute introduction en Bourse.
Selon Joy Sioufi, Denis Ladegaillerie « a, bien sûr, les épaules » pour rester à la tête de son entreprise dans cette prochaine étape de développement. Le fondateur de Believe, qui a précédemment été Chief Strategy & Financial Officer de la division numérique de Vivendi Universal aux États-Unis (2001-2004), s’est dès le départ entouré d’experts pour cibler les artistes indépendants avec son label et offrir toute une galaxie de services numériques. « Grâce à sa vision, qui a consisté à bâtir un système pyramidal permettant de brancher les musiciens aux plateformes mondiales [telles que Spotify, NDLR] ou locales [Deezer, NDLR] suite à ces divers rachats, il a obtenu de belles exclusivités » , estime le conseiller, citant l’exemple des chanteurs Yseult et Vianney. Ces multiples acquisitions ont permis à la scaleup d’étendre sa présence géographique et ses catalogues musicaux. « Le fondateur de TuneCore, un service d’édition musicale fondé la même année que Believe et racheté depuis par cette dernière, a aussi apporté son expertise à l’équipe dirigeante. »