Republication d’un article paru le 13 avril 2021.
Une opportunité de structuration de la HealthTech — qui rassemble les jeunes entreprises technologiques aux activités liées à la santé — se dessine en France. Alors que la crise sanitaire du Covid-19 a changé l’état d’esprit quant à l’enjeu stratégique que représente le secteur en matière de souveraineté, un conseil stratégique des industries de santé (CSIS) s’est tenu au mois de juin 2021. Emmanuel Macron a fixé l’objectif de ce sommet à plus ou moins long terme : « Faire de la France une nation leader en matière d’industrie et d’innovation en santé. » Et annoncé une enveloppe de 7 milliards d’euros pour y parvenir.
Pour contribuer à la réflexion, un rapport avait été présenté par Bpifrance en lien avec le BCG, France Biotech et Bio-Up dès la mi-avril. L’ambition : décliner un plan d’actions concrètes à mettre en place sans attendre pour permettre aux BioTech et MedTech de passer à l’échelle. « La France ne compte aucune licorne, quand 6 existent en Allemagne » , relèvait ainsi Marie Humblot-Ferrero, directrice associée au BCG, prenant en exemple le fait que des BioTech telles que Valneva et Cellectis parviennent à franchir la barre du milliard de dollars de valorisation « temporairement, pas durablement ».
Trois axes d’action prioritaires
Le plan présenté par les quatre partenaires est le fruit de la consultation de 36 expert·e·s, dirigeant·e·s et responsables publics engagés dans la HealthTech. Il vise à lever les divers obstacles qui font qu’aujourd’hui « la probabilité de succès pour les entreprises menant des essais cliniques s’élève à 2 % » . La faute à une durée et des coûts de développement très importants, mais également à la rareté des expertises nécessaires.
Pour autant, « 72 % de l’innovation en santé en France a lieu au sein de ces startups » . D’où le besoin d’appuyer leur développement selon le BCG, qui pointe le fait que le paysage tend à se renforcer car « le nombre de produits en essai clinique a doublé depuis 2015 » et que « la France est le deuxième pays d’Europe, après le Royaume-Uni, en matière de financement » de la HealthTech. Bpifrance affirme ainsi que les fonds spécialisés qu’il a abondés – tels que Sofinnova et ArchiMed –représentent, à eux tous, une capacité d’investissement de « 4 milliards d’euros ».
Aussi, sur la base de ses enseignements, le rapport s’articule en trois axes :
- Attirer les talents et développer l’accompagnement : les rapporteurs de ce document avancent qu’il est impératif de s’assurer qu’un solide niveau d’expertise est présent au sein des entreprises. « On a besoin de gens qui ont déjà réussi par le passé. Leur expérience permet parfois d’éviter de petites erreurs qui provoquent l’arrêt des essais cliniques » , estime Elsy Boglioli-Hofman, fondatrice de Bio-Up, qui affirme que BioTech et MedTech doivent ainsi « s’aligner en matière de salaires pour débaucher » les personnes compétentes. Il est aussi question d’inciter à la diversité des profils dans les conseils d’administration et fonds d’investissement, ainsi que renforcer les mesures sectorielles afin de mettre les bonnes pratiques en commun.
- Structurer la politique industrielle en santé : les auteurs et autrices mettent en avant la nécessité de sélectionner des « hubs » prioritaires pour concentrer les chances de réussite et bénéficier des effets de proximité avec les acteurs locaux. « On pourrait en imaginer une dizaine, en s’appuyant sur des structures existantes telles que les Institut hospitalo-universitaires (IHU). Ils devront renforcer les capacités françaises en bioproduction, accompagner la transition numérique de la santé et faciliter la collecte et l’accès aux données » , pointe Paul-François Fournier, directeur exécutif innovation de Bpifrance, qui plaide en faveur d’un « échange étroit et continu entre le système de santé et les filières de production » avec l’État pour intermédiaire.
- Simplifier le cadre administratif : parmi les priorités figurent, selon le rapport, des efforts visant à faciliter le transfert de technologies ou encore l’accès au marché. « Il faut qu’une acculturation du domaine privé s’opère vers le public » , avance Franck Mouthon, président de France Biotech, selon qui la collaboration entre ces acteurs est une condition sine qua non de la réussite. Un renforcement de l’attractivité de la France en matière d’essais cliniques devra aussi avoir lieu selon le spécialiste, tout comme une remise à plat des différentes règles qui entourent les conflits d’intérêts.