12 janvier 2022
12 janvier 2022
Temps de lecture : 4 minutes
4 min
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Buster.Ai et ses algorithmes luttent contre les fausses informations

Véritable fléau pour la démocratie, la liberté et l’économie, les désinformations pullulent dans notre quotidien. Avec sa méthode couplant machine learning, deep learning et algorithmes, Buster.Ai analyse une multitude de sources sur un fait pour apporter une autre vision de l’information. Explications avec Julien Mardas, son cofondateur, fou de mathématiques appliquées et de data science passé par Criteo.
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Crédit : Markus Winkler

Insidieuses, très réalistes et complexes à détecter, les fausses informations n’épargnent personne. Surtout pas les entreprises et les marchés financiers. Selon une étude réalisée par Cheq et l’université de Baltimore en 2019, les marchés financiers américains auraient payé la lourde somme de 39 milliards de dollars de pertes à cause d’elles. L’orchestration de ces fameuses fake news a fait l'objet de plusieurs documentaires - comme Propagande ou Fake news, la machine à fric. C’est à ce complexe sujet que souhaite s’attaquer Buster.Ai grâce à une méthodologie basée sur les algorithmes, le machine learning et le deep learning, en collaboration avec plusieurs sociétés (TF1, LCI, VivaTechnology, AWS).

Réfutation ou soutien

Grâce à sa méthode, Buster.Ai souhaite aider les journalistes et les entreprises à mieux analyser l’information qui leur est proposée. Concrètement, l’utilisateur va demander à Buster.Ai d’analyser le passage d’un article comprenant une information. La solution développée va aller scruter plusieurs sources d’informations - officielles, académiques, encyclopédiques, statistiques, des agences de presse, des médias. Une fois ce travail réalisé, nous allons présenter les sources qui soutiennent et celles qui réfutent l’information sous forme de listes. Pour chacune des sources, on va produire le passage qui soutient ou le passage qui réfute cette information. On explique ainsi pourquoi notre algorithme se prononce comme ça. Nous n’allons pas dire si une information est vraie ou fausse” , tempère l’entrepreneur.

Il ne s’agit là que d’une première brique pour Julien Mardas qui estime que le choix final de considérer une information comme vraie ou non revient à l'utilisateur et son libre arbitre. “On va permettre à l’utilisateur final de prendre sa décision, de lire les sources, d’aller creuser auprès des personnes citées, de corroborer plus rapidement les informations. L’important, c’est la collaboration et le partage des données.”

Donner du relief à la diversité des sources 

La qualité de l’information va dépendre du volume de sources que l’on possède et de la manière dont nous allons effectuer la vérification” , débute Julien Mardas. Tout est faux, tout est relatif. Une source fiable comme l’AFP s’est trompée sur la mort de Martin Bouygues. Les erreurs humaines ne sont pas forcément liées à la source. Quand une information est une grosse actualité, les journalistes ont peu de temps pour traiter le sujet, c’est normal qu’il y ait des erreurs. Il n’y a pas un métier dans le monde où personne ne fait d’erreur” , met en exergue l’entrepreneur.

C’est pour cette raison que seule la multiplication des sources permet de mieux cerner un sujet, surtout s’il est délicat et complexe. “Si on prend l’exemple du chômage, on peut avoir deux interprétations différentes selon la catégorie qu’on prend. Si on multiplie les sources et qu’on met en exergue les passages qui supportent ou réfutent une version, on peut rapidement comprendre la nuance de l’information.”

Le choix des sources est réalisé par les salariés de la société mais aussi les suggestions des utilisateurs. “Nous n’avons pas de religion sur les sources, on en prend un maximum. Ce qui est important, c’est d’avoir une vue globale, avec différentes sources pour que l’utilisateur comprenne quelle source supporte et laquelle réfute. On ne fait pas d’omission.”

La finance et le CAC40 comme cible 

Développée pendant deux ans, la solution est aujourd’hui prête à être proposée à ses futurs clients. C'est pour réussir à sortir sa technologie de son laboratoire qu'elle vient de lever 2 millions d'euros en seed auprès de OneRagtime, Takara Capital, et de business angels. “Nous allons lancer une version bêta fin janvier qui sera disponible gratuitement pour un panel de journalistes. Nous analyserons leurs feedback, leurs avis, leurs besoins pour continuer à faire évoluer notre produit” , développe Julien Mardas.

En parallèle, l’entreprise commencera à présenter et vendre sa solution aux principaux intéressés. “Nous visons les corporates, les marchés financiers, les traders mais aussi les entreprises cotées qui ont des obligations légales et s’intéressent de près à ce qui est dit sur elles” . Rappelons qu’en 2016, Vinci avait vu son cours de Bourse chuter suite à de fausses informations relayées par Bloomberg qui avait alors écopé d’une belle amende auprès de l’AMF. De quoi pousser les entreprises à se doter d’outils pour les aider à réagir au plus vite aux informations relatives au marché comme à leur propre réputation. Pour réussir à changer d’échelle, Buster.Ai, qui compte une petite vingtaine de salariés, compte réaliser quelques recrutements - au niveau commercial et marketing mais aussi technologique.

À terme, la jeune startup vise le déploiement d’une solution ne nécessitant plus d’interaction humaine. “L’utilisateur naviguera sur un site et les paragraphes apparaitront en rouge ou vert pour lui indiquer si telle ou telle information est davantage soutenue ou réfutée” . Mais il lui faudra encore un peu de travail et peut-être une série A pour arriver jusque-là.