Après des levées de fonds en 2016 et 2019, elle vient de lever à nouveau 2 millions d'euros auprès d’ISAI et lance une campagne de crowdfunding auprès de ses membres (MAJ 4 juillet 2023 : la campagne de crowdfunding aura permis de dérocher 3,5 millions d'euros supplémentaires).

Un parrain à l’origine, puis deux, et enfin trois, depuis 2016. Pour créer son profil sur Gens de Confiance, il faut être coopté par trois membres du réseau… Une barrière à l’entrée qui limite, de fait, la croissance de l’entreprise. “Certes, c'est contre-intuitif de rajouter une telle friction, mais cela a deux vertus : cette exclusivité crée de l’envie, et permet de garantir une bonne expérience pour les membres” explique Ulric Le Grand, le cofondateur de la startup, pendant qu'il fait visiter ses bureaux nantais.

Une scale-up sans le culte de l’hypercroissance

Depuis son lancement, Gens de Confiance s’est en effet construit comme “l’anti-boncoin”, une solution face aux arnaques et mauvaises expériences des utilisateurs sur les sites de petites annonces. Développé grâce au bouche-à-oreille, le "side-project" des trois associés (Ulric Le Grand, Enguerrand Léger et Nicolas Davoust) s'est structuré pour devenir une vraie startup, qui affiche aujourd'hui des croissances de 80% en moyenne chaque année. "On est une forme de scale-up, mais sans hypercroissance", estime le cofondateur de l’entreprise.

En 2016, l'entrée du fonds Partech au capital a marqué une première accélération. Puis le fonds ISAI a investi lors de la Série A, en 2019. "Tous les deux ont bien compris que le 'slow growth', ça fonctionne et ça crée de la valeur à long terme", explique-t-il. Ces investisseurs n'ont semble-t-il pas été détrompés : avec 1,6 million de membres, dont 550 000 actifs chaque mois, la startup approche désormais de l'équilibre économique, avec des Ebitda positifs en 2021 et 2022 et une rentabilité prévue pour 2024.

Réinvestissement d’ISAI et crowdfunding pour les membres

ISAI vient d’ailleurs de renouveler sa confiance à l’entreprise, en réinvestissant 2 millions d’euros. En parallèle, Gens de Confiance ouvre une campagne de crowdfunding sur la plateforme Caption pour permettre à ses membres d’entrer à son capital " via une holding, pour une part au moins équivalente à celle d’ISAI ", avec une décote de 5% par rapport au prix de la levée.

Aujourd’hui, les annonces immobilières (achat/vente, location, locations saisonnières) représentent l'essentiel des revenus du site, tandis que les dons des membres et la publicité viennent compléter le modèle. Depuis 2022, la plateforme ne se contente pas de répertorier des annonces : elle opère aussi les transactions pour les locations saisonnières, à la manière d'un Airbnb, et se positionne en tiers de confiance.

“Quartier de Confiance”, pour recréer du lien social

Alors que le réseau continue à croître de façon organique - Ulric Le Grand estime que Gens de Confiance a le potentiel pour rassembler 20 millions d'utilisateurs en France - l'objectif premier des équipes est désormais de développer les usages et les liens entre membres de la communauté, tout en maintenant la qualité des échanges.

Pour cela, "l'équipe du service client - la “team bonheur” comme elle est nommée en interne (environ 10 personnes) est chargée de régler les litiges et conflits : l’an dernier, 107 membres indélicats ont été exclus de la plateforme. Mais cette décision n’intervient qu’en dernier recours : “9 problèmes sur 10 sont résolus lorsqu’on fait appel aux parrains des membres”, souligne l’entrepreneur.

Pour développer les usages, la startup développe un annuaire professionnel et teste depuis peu une nouvelle fonctionnalité : "Quartier de Confiance". Ce service local n'est pas monétisé et vise avant tout à créer des liens et de l'entraide entre voisins, sans pour autant tomber dans les travers des réseaux sociaux. "L'idée est de recréer du vrai lien social à côté de chez soi, grâce à des services comme le prêt d'objets," explique Ulric Le Grand. Trois villes servent actuellement de terrain d’expérimentation pour ce nouveau service : Versailles, Angers et Nantes.

L’enjeu du moment : attirer les talents

C’est d’ailleurs à Nantes que Gens de Confiance a choisi de rassembler tous ses effectifs. Un choix fièrement assumé : “Nantes est un super écosystème pour développer sa startup, il y a une vraie solidarité entre entrepreneurs et des réseaux d’entraide, avec la Cantine en chef d’orchestre et le Web2day en événement phare. Tout notre enjeu est maintenant d’y faire venir un maximum de talents !”

Cette question des talents est clé, alors que Gens de Confiance s’apprête à dépasser la centaine d’employés d’ici à la fin de l’année. Pour recruter ses collaborateurs, la startup entend se montrer aussi sélective qu’avec ses membres : si le parrainage n’est pas indispensable, l’adhésion aux valeurs cardinales de l’entreprise (“success is collective”, “think bold and deliver”, “be accountable for everything you do” et “give without expectation”, en anglais dans le texte) est un point essentiel. Comme le souligne Ulric Le Grand, “quand on a des valeurs aussi fortes, si tout le monde en interne n’est pas aligné avec, cela ne fonctionne pas sur le long terme”.