1973. C’est le nombre de startups actives du secteur deeptech en France actuellement, selon le site lesdeeptech.fr. Et ce chiffre pourrait bien augmenter puisqu’il s’agit d’un domaine en constante évolution et particulièrement dynamique.

Le mot “deeptech” est omniprésent dans le monde de l’innovation. Son ambition : proposer des solutions innovantes et durables face aux problématiques et défis du XXIème siècle afin de modifier considérablement notre façon de communiquer, de consommer, voire de nous soigner. Pour ce faire, les entreprises de la deeptech utilisent les technologies les plus disruptives de notre époque en s’appuyant sur les centres de recherche, et repoussant quotidiennement les limites de la technologie.

Répondre aux enjeux gouvernementaux

Les entreprises deeptech sont aujourd’hui au centre des stratégies gouvernementales et la France n’y échappe pas avec, notamment, le lancement par le gouvernement du Plan Deeptech en 2019. D’autant plus que la France mène un vrai projet de réindustrialisation grâce aux startups, y compris les startups deeptech. En février 2023, Emmanuel Macron a annoncé, lors de la révélation des lauréats 2022 de la French Tech Next40/FT120, vouloir faire de la French Tech le bras armé de la réindustrialisation. Un engagement de la République donc.

27 nouvelles entreprises ont ainsi fait leur entrée dans le palmarès, dont 8 deeptech !
Ce cru 2023 a mis en avant les startups industrielles telles que Verkor, Innovafeed ou encore Flying Whales, qui font partie des 18 usines implantées dans le territoire, et contribuent à créer de l’emploi. L’Etat veut cependant porter ce chiffre à 100 d’ici à 2025 : une ambition majeure.

Il est donc des domaines vers lesquels les fonds d’investissement préfèreront se diriger.

"Nous conseillons à ceux qui veulent se lancer dans la deeptech de se renseigner sur les enjeux gouvernementaux et les stratégies économiques gouvernementales. Pourquoi ? Parce que cela va générer des subventions publiques. Certains fonds d’investissement qui se risquent à investir dans des startups deeptech choisissent des thématiques qui font également partie des enjeux du gouvernement (tensions géopolitiques, crises sanitaires, changement climatique…). Cela signifie que ces startups auront abondé un premier financement de leur côté et que la technologie devrait être amenée à durer", explique Nadia Benallal, déléguée générale de la French Tech Paris Saclay.

Libérer leur plein potentiel

Répondre aux problématiques gouvernementales telles que les tensions géopolitiques, les crises sanitaires, le changement climatique, ou encore le newspace - comme c’est le cas de startups accompagnées par Grant Thornton - est donc une bonne stratégie. D’autant plus que le gouvernement a également annoncé vouloir la création de 500 startups deeptech par an d’ici à 2030 ! En 2022, le nombre de startusp deeptech créées dans l’Hexagone était de 320. Un chiffre multiplié par 2 depuis 2018, notamment grâce à "la montée en puissance d'un continuum de financement spécifique pour les startups deeptech", selon Bpifrance.

Cette même année, les startups deeptech ont levé 2,6 milliards d’euros de capital. Un montant multiplié par 2,4 depuis le lancement du Plan Deeptech, synonyme, d’après Bpifrance d’une “dynamique d’investissement favorable”.

Profiter de cette “dynamique d’investissement favorable” peut être complexe pour des porteurs de projets venus du monde universitaire. Le chemin vers la recherche d’investissement commence donc par l’accompagnement. Si les porteurs de projets deeptech sont spécialistes de leur sujet, ils manquent parfois de compétences sur d’autres points essentiels comme la finance.

"Ils ont donc besoin de s’accompagner de spécialistes pour mettre en musique le tout et faire la passerelle entre eux et le fonds d’investissement", assure Gilles Hoareau, Associé chez Grant Thornton, qui a d’ailleurs récemment tissé un partenariat avec la French Tech Paris Saclay.

Le but de Grant Thornton ? Proposer une offre sur le pilotage financier, comptable & social pour libérer pleinement le potentiel des porteurs de projet. "Nous accompagnons les startups sur tout ce qui concerne la modélisation du business plan, les travaux quotidiens, la tenue de la comptabilité, l’élaboration et le suivi budgétaire, les outils permettant d’établir un reporting ou encore la recherche de financements mais aussi la préparation des pitchs.".

Ce coaching complet a pour objectif d’aider les entrepreneurs à convaincre de futurs investisseurs.

Être cohérent avec les attentes des fonds d’investissement

Les attentes d’un fonds deeptech sont spécifiques.

Afin de préparer au mieux les porteurs de projet, Gilles Hoareau, associé de Grant Thornton et ses équipes sélectionnent les startups à accompagner, via les mêmes critères que les fonds d’investissement. "Les fonds deeptech ont des ingénieurs dans leurs équipes. Ils sont donc à même de porter un regard critique sur la technologie présentée par l’entrepreneur. Ils comprennent son langage, la technologie et le marché. S’ils ont donc moins de freins à investir, ils ont cependant une appréhension du risque plus fine qu’un fonds généraliste", souligne Gilles Hoareau.

Le fonds analyse donc trois critères principaux :
- L’équipe : "A-t-elle les expériences académiques et professionnelles adéquates pour porter le projet ?"
- La technologie : "Est-elle facilement duplicable ?"
- Le marché : "Est-ce que la technologie sera un “must have“ ou un “nice to have” ?"

Et Guilhem de Vregille, directeur d’investissement spécialisé dans la deeptech chez XAnge d’ajouter : "Certains n’ont en effet pas les codes. Il y a certaines questions auxquelles ils n’ont pas le droit de ne pas connaître la réponse telles que : à date, quel est votre chiffre d’affaires ? Ne pas savoir répondre à ça ou à des questions de RH est un signe de mauvaise préparation.".

Un profil “hors norme”

Gilles Hoareau confirme : "Les startups ne sont pas toujours bien armées : elles ne savent pas comment se présentent certains outils comptables tels que le compte de résultats ou encore le tableau de trésorerie, à titre d’exemple. Cela demande des compétences financières que des profils très “tech” ne possèdent pas forcément.".

Un profil peut justement se démarquer lors d’une levée de fonds. "Nous n’aimons pas forcément investir dans un binôme entre un scientifique et un commercial", admet Guilhem de Vregille. Lui, préfère se diriger vers un porteur de projet à la fois scientifique et CEO. "Il s’agit d’un profil complet : il doit non seulement maîtriser sa science mais aussi être un excellent commercial et un très bon manager. Il est ainsi capable d’exprimer une vision long terme, d’emmener tout un écosystème dans cette vision, une culture d’entreprise, d’être minutieux et capable de détailler précisément ses prévisions.". Il l’avoue lui-même : réunir toutes ces qualités est “un peu hors norme, voire exceptionnel.”.

"Il ne faut pas simplement choisir un fonds parce qu’il estampille “deeptech” sur son site internet", prévient Nadia Benallal, déléguée générale de la French Tech Paris Saclay. Cette dernière conseille de mener un mapping des fonds tangiblement intéressés par la filière de la startup et en cohérence avec ses valeurs. "Pour cela, il faut comprendre leur portefeuille - s’ils investissent auprès de solutions concurrentes - pour comprendre leur stratégie. Par exemple, si la startup souhaite s’implanter à l’étranger, il est inutile de se présenter à un fonds qui n’investit jamais dans des startups qui s’étendent à l’international.".