Et si, de la même manière que les tickets-restaurant permettent aux collaborateurs d’une entreprise de bien se nourrir, il y avait une offre pour permettre aux salariés de prendre soin de leur santé en ayant accès à de nombreuses activités sportives ? C’est la mission que s’était donnée la startup française Gymlib en proposant un abonnement que les entreprises peuvent offrir à leurs collaborateurs.

Après une difficulté à trouver son go-to-market, une période d’hypercroissance et un passage près du gouffre, Gymlib s’est rapproché de son grand frère allemand EGYM. Un acteur qui ne manque pas d’ambition avec la récente annonce d’une levée supérieure à 200 millions d’euros, la moitié de celle-ci étant dédiée à de nouvelles opérations de fusion et acquisition pour passer d’un leader européen à un leader mondial.

La création de Gymlib

Mohamed Tazi et Sébastien Bequart se sont rencontrés chez Deloitte où ils faisaient régulièrement du sport ensemble. En regardant la liste des 100 startups londoniennes les plus prometteuses, Mohamed Tazi découvre l’existence d’une plateforme d’intermédiation pour le sport. Une autre est en train de se créer au Brésil, mais c’est le calme plat en France alors que cette intermédiation est déjà arrivée dans de nombreuses industries, de la musique à l’hôtellerie.

Il en parle à Sébastien Bequart et ils décident tous deux de se lancer en 2013. Les deux entrepreneurs commencent donc par créer leur site internet ainsi qu’un réseau de salles de sport partenaires. Ils officialisent Gymlib en janvier 2014 et découvrent que trois autres acteurs se lancent également avec une offre similaire sur ce même mois.

« Les quatre premières années, de 2013 à 2017, ont été un long chemin de croix, explique Sébastien Bequart. Nous n’avions pas encore compris que c’était avec le BtoB que l’on allait trouver notre marché. La vente aux particuliers demandait beaucoup d’énergie et de ressources financières. Le coût d’acquisition était important : un client nous coûtait environ 30 euros et il fallait le garder à peu près dix-huit mois pour qu’il nous rapporte 30 euros en marge. Ce n’était pas un business viable. »

Pendant l’étape suivante, Gymlib va effectuer un double pivot. Celui vers une offre BtoB d’abord, mais aussi celle vers la vente d’abonnements. La croissance, et même l’hypercroissance, est au rendez-vous, mais le business model n’est pas maîtrisé pour autant. Avec la proposition d’un abonnement illimité dans l’ensemble des structures de sport partenaire, Gymlib reversait entre 10 à 11 euros aux salles de sport par abonnés à la formule à 10 euros. « On se développait très fort, partage le CEO de Gymlib. Mais plus on se développait et plus on s’éloignait de la rentabilité. »

Du product-market-fit à l’acquisition

La pandémie de 2020 arrive et met un coup d’arrêt au business à la minute où les salles de sport ferment. Les fondateurs de Gymlib décident alors qu’ils ne réouvriront pas avec le même modèle. « C’était une période très grisante, l’application rencontrait un énorme succès, mais nous avions le sentiment de devoir écoper de tous les côtés pour ne pas couler. »

À la fin du confinement, le service a été totalement refondu : l’illimité disparaît pour aller sur un système de crédits utilisables par les utilisateurs qui permet à Gymlib de s’assurer une marge de 30 %. Les années 2021 et 2022 permettent à l’entreprise de renouer avec la croissance, mais elle n’est pas encore rentable malgré ses 15 millions d’euros de revenu annuel récurrent.

Les actionnaires de Gymlib lui présentent deux options : lever à nouveau ou s’ouvrir à la concurrence. Les fondateurs décident de lancer les deux processus en même temps. Ils se rendent vite compte de la complexité de lever 50 millions d’euros dans le contexte du moment. Ils font alors la rencontre des fondateurs de EGYM, l’acteur allemand qui développe la même activité sur ce territoire, tout en commercialisant des machines perfectionnées aux salles de sport, un acteur qui pèse plusieurs centaines de millions de revenus annuels récurrents.

« Parfois on dit que l’on a vendu l’entreprise, et parfois on dit que l’on a fusionné… parce que les deux sont un peu vrais. Les actionnaires de Gymlib sont toujours actionnaires du nouvel ensemble et l’opération est assez proche d’une fusion. Mais dans le même temps, on peut considérer avoir vendu Gymlib puisque l’on était beaucoup plus petit qu’EGYM. »

Une opération réalisée à la fois en cash et en titre pour Gymlib qui a depuis doublé ses revenus annuels récurrents pour atteindre les 30 millions d’euros. Le groupe nouvellement formé se positionne donc comme un leader européen, sans pour autant freiner ses ambitions. Une récente levée de 200 millions d’euros va lui permettre de réaliser de nouvelles acquisitions pour étendre plus largement son influence.