Le transport est l’activité qui contribue le plus aux émissions de gaz à effet de serre (GES) de la France. En 2019, il représentait 31 % des émissions, selon le ministère de la Transition Écologique et Solidaire. Le secteur de la distribution et de la logistique, éminemment polluant, doit donc se réinventer pour réduire son impact. France Boissons, qui réalise « un million de livraisons par an », planche notamment sur différents projets « pour s’adapter aux contraintes et aux enjeux du secteur », souligne Laurent Théodore, son président. Son objectif : transformer toute sa flotte de véhicules pour rouler en 100 % électrique à horizon 2040. «  Dès aujourd’hui, nous utilisons du biodiesel, issu de graisses recyclées, pour faire circuler nos camions. » Avec, à la clé, une réduction de « 85 % de nos émissions de CO2 », assure le dirigeant de France Boissons.

Ses premiers camions électriques circulent pour le moment dans les zones à faibles émissions (ZFE). Et la société s’intéresse au transport fluvial pour livrer ses clients à Paris, à partir de sa plateforme de Bonneuil-sur-Marne. « Un premier test a eu lieu pour livrer plusieurs arrondissements de Paris, divisant par deux le nombre de camions engagés sur la période. Nous referons un test sur une plus longue durée et à plus grande échelle en 2024 avec l’idée, à terme, de pouvoir intégrer ce mode de transport à notre système logistique. »  Pour optimiser ses livraisons et réduire le nombre de kilomètres parcourus, France Boissons s’appuie en parallèle sur des solutions numériques et digitales. « Cela nous permet de calculer le meilleur itinéraire et d’optimiser les tournées et le chargement des camions. »

De nombreux acteurs utilisent également des vélos cargos pour le dernier kilomètre. Mais pour Edouard Chabrol, le dirigeant de Cubyn, spécialisé dans la logistique e-commerce, cela a ses limites. « Les périmètres desservis restent restreints, ce n’est pas toujours possible d’utiliser ce type de solutions », nous explique-t-il.

« La chaîne logistique intermédiaire représente 75 % des émissions »

Le transport n’est d’ailleurs pas le seul domaine sur lequel planche les acteurs du secteur. « La chaîne logistique intermédiaire représente 75 % des émissions. Même si le transport concentre un quart des rejets de carbone, on ne peut pas oublier le reste », estime Edouard Chabrol.

La gestion des stocks, les emballages ont aussi leur importance. « Les émissions de gaz à effet de serre se concentrent surtout au niveau de la production. D’où l’importance de bien choisir les marques avec qui on travaille », poursuit le dirigeant de Cubyn. Surtout, le choix des emballages est crucial. C’est sur ce point que s’est notamment concentré la startup LivingPackets. Depuis 2016, elle se focalise sur le développement d’un emballage pliable, connecté et réutilisable jusqu’à 1000 fois. «C’est un des postes les plus consommateurs d’énergie », indique Edouard Chabrol, qui s’est doté d’un logiciel pour « réduire les taux de vide » et supprimer tous les emballages en plastique.

Son outil recommande les meilleurs emballages en fonction de la taille des marchandises. « Cela permet de limiter la quantité de carton et nous essayons d’utiliser des emballages assez étroits pour que les produits puissent être déposés dans les boîtes aux lettres. »

Le secteur face à une pénurie de chauffeurs-livreurs

Car l’autre problématique de la logistique est la multiplication des livraisons pour un seul et même produit. « Parfois, nous sommes obligés de livrer quatre fois un client », poursuit Edouard Chabrol. Pour limiter les déplacements, Cubyn travaille avec des points relais en milieu urbain et choisit ses transporteurs en fonction de leur performance effective.

« Nous sommes sur un secteur qui n’est pas encore trop en avance. L’une des premières choses à faire est de bien mesurer son impact. » D’autant que le secteur a besoin de se renouveler. « La logistique va coûter de plus en plus cher, estime Laurent Théodore. Et nous faisons face à une forte pénurie de chauffeurs-livreurs. Nous sommes obligés de nous réorganiser pour être plus performants. »

Et si le e-commerce a explosé au moment de la crise sanitaire, les volumes ont depuis bien diminué. « Nous sommes plutôt dans une décroissance actuellement, souligne Edouard Chabrol. Les gens commandent moins en ligne du fait de l’inflation. Et leurs dépensent se reportent davantage sur les services ou les voyages. »