L'âge de la retraite recule. L'inclusion et la diversité sont des enjeux majeurs. Et avec une pyramide des âges inversée dans le secteur de tech où la majorité des effectifs ont moins de 40 ans, le déséquilibre dans la représentation des “séniors” au sein de l'écosystème technologique est encore plus marqué.

En effet, seulement 7,7 % des salariés du secteur de la tech ont plus de 45 ans, et seulement 2,4 % ont plus de 55 ans. Soucieux de comprendre et de pallier ce phénomène, La French Tech Grand Paris a entrepris deux enquêtes approfondies, interrogeant d’une part les entreprises de l’écosystème et d’autre part les professionnels expérimentés, pour identifier les freins au recrutement et les raisons qui poussent ces profils à hésiter à intégrer le monde de la technologie.

Les salaires et un manque de digitalisation comme obstacles

Premier enseignement, l'âge auquel on qualifie les professionnels comme « sénior » varie considérablement, illustrant la notion floue de l'âge dans le monde professionnel. Plus de 20 % des répondants estiment qu'au-delà de 45 ans, une personne est considérée comme sénior, soulignant la diversité des perceptions. Pour tenter d’y remédier, Alexandra André, Directrice Générale de la French Tech Grand Paris, a imaginé une évolution sémantique : « L’un de nos premiers engagements au sein de la French Tech Grand Paris sera d’ailleurs de limiter au maximum la désignation de sénior, considéré comme trop péjoratif par les entreprises et les professionnels, mais plutôt d’utiliser le terme “personne expérimentée” et de lui apporter une définition claire en définissant notamment un âge précis. »

L’enquête révèle par ailleurs les deux arguments principaux avancés par les entreprises tech pour expliquer le manque de considération envers les profils expérimentés : le niveau de leur rémunération, jugé trop élevé, et un supposé manque d'adaptabilité aux outils digitaux.

Cependant, l'enquête révèle que ces préjugés ne correspondent pas à la réalité, car la majorité des professionnels expérimentés ont une expérience significative avec les outils numériques. « Partant du principe que ces publics ne sont pas des digital natives, les entreprises craignent qu’ils ne soient pas en mesure de prendre en main les outils métier ou les outils digitaux au sens large. De fait, ils voient leur intégration comme quelque chose de chronophage et compliqué », explique Alexandra André.

Malgré cela, certaines entreprises du secteur tech demeurent disposées à embaucher des professionnels expérimentés, cherchant ainsi à bénéficier de leur sagesse et de leur expérience au sein d'équipes plus jeunes. Cependant, l'enquête souligne une difficulté à harmoniser l'offre et la demande. « C’est l’avantage de la double étude qui permet de comparer la vision des uns et des autres. Les séniors aimeraient intégrer ces secteurs mais ne savent pas où trouver les offres. Quant aux entreprises, elles sont soucieuses d’adresser ces publics, mais elles ne savent pas comment », explique Alexandra André.

Du reverse mentoring et de la sensibilisation

Pour favoriser le recrutement de personnes expérimentées, les entreprises réclament des dispositifs d'aide à l'insertion de l'État, des outils plus efficaces pour le sourcing et la mise en place de formations. Du côté des professionnels expérimentés, 2/3 d'entre eux souhaiteraient bénéficier d'une immersion professionnelle dans le secteur tech, mais se heurtent à un réseau limité.

La création de nouveaux outils de sourcing, de recherche d'offres et de programmes d'alternance pour les seniors serait donc cruciale pour faciliter leur intégration dans le secteur. « Globalement, il faut mettre l’accent sur le reverse mentoring, augmenter les aides financières dédiées et améliorer l’accès à la formation. Mais ce qu’il faut avant tout c’est sensibiliser les jeunes générations d’entrepreneurs quant à la valeur ajoutée de ces profils expérimentés. Ils n’imaginent pas à quel point ils ont une expertise métier et/ou sectorielle à leur apporter », explique Alexandra André.