BlaBlaCar accélère sur le rail. En effet, le fer de lance de la French Tech dans la mobilité, connue pour son application de covoiturage, ajoute une corde à son arc en ce printemps 2025 en donnant la possibilité à ses utilisateurs d’acheter des billets de train de la SNCF.

Disponible dès aujourd’hui dans l’application BlaBlaCar, cette offre ferroviaire couvrira dans un premier temps 350 gares, soit 200 villes et agglomérations dans l'Hexagone. Mais BlaBlaCar entend rapidement étendre son maillage pour proposer des trajets sur la totalité du réseau desservi par la SNCF.

Une longue histoire entre BlaBlaCar et la SNCF

Pour l’heure, les cartes de réduction lors de l’achat d’un billet ne sont pas prises en charge, mais cette fonctionnalité devrait être ajoutée dans le courant de l’été. Une manière pour BlaBlaCar de répondre aux attentes de ses clients : les utilisateurs de la plateforme prennent le train en moyenne 13 fois par an, et deux sur trois se disent prêts à réserver leurs trajets ferroviaires directement depuis l’application BlaBlaCar.

Pour rappel, la compagnie ferroviaire et la licorne tricolore se connaissent très bien : BlaBlaCar avait mis la main fin 2018 sur Ouibus, l’activité de cars longue distance de la SNCF, qui en échange était entrée à son capital via une levée de 101 millions d’euros. Aujourd’hui, la SNCF détient moins de 5 % du capital, précise BlaBlaCar.

«Pour connecter un opérateur de trains, il faut une équipe technique d’une dizaine de personnes»

Si les billets de la SNCF sont désormais proposés sur l’application, il y a encore quelques trous dans la raquette, dans la mesure les trajets avec des trains Ouigo ou Eurostar ne sont pas encore disponibles à l’achat, mais BlaBlaCar assure que l’offre sera étoffée à mesure que les différents opérateurs sont intégrés.

Cette phase prend du temps car connecter l’infrastructure d’un opération à celle de BlaBlaCar est une procédure plus complexe qu’il n’y paraît. «C’est un grand dépoussiérage qui nécessite beaucoup de lignes de code. Cela demande un effort technique assez colossal. Pour connecter un opérateur de trains, il faut une équipe technique d’une dizaine de personnes», souligne Nicolas Brusson, co-fondateur et directeur général de l’entreprise française. «Ce qui rend la tâche difficile à nos équipes, c’est aussi le fait qu’il y a beaucoup de mises à jour effectuées par les opérateurs, quasiment toutes les semaines. Et on doit forcément les prendre en compte pour connecter leurs systèmes», ajoute Adrien Tahon, qui gère l’Europe de l’Ouest et l’application BlaBlaCar Daily, dédiée au covoiturage domicile-travail, au sein de la licorne.

«Nous sommes l’équivalent d’un Booking ou d’un Expedia sur les mobilités terrestres»

L’arrivée des billets de train de la SNCF sur BlaBlaCar vient concrétiser une réflexion entamée en 2022 sur le sujet. Il faut dire que l’ouverture du rail français à la concurrence en décembre 2020 a changé la donne. «Le marché du train est en train de se libéraliser et donc de se fragmenter. D’ici quelques années, il y aura de plus en plus d’opérateurs. Pour l’utilisateur qui se déplace en France, cela va devenir un peu compliqué d’avoir accès à toute l’offre. Il va y avoir une bataille de la distribution», estime Nicolas Brusson, alors que SNCF Connect, l’application de la compagnie ferroviaire tricolore, écrase pour l’instant le marché, et que d’autres acteurs comme Trainline et Kombo se sont également lancés dans le secteur.

Même le géant des VTC Uber s’est lancé dans la vente de billets de train en Espagne. C’est d’ailleurs de l’autre côté des Pyrénées que BlaBlaCar a d’abord testé l’intégration du rail à son application depuis l’an passé. «Il y a une dynamique hyper favorable là-bas avec la libéralisation du marché. L’Espagne est assez mature dans ce domaine», observe Adrien Tahon. Avant d’ajouter : «L’enjeu est de dompter l’offre en Espagne et en France, avant de s’étendre dans d’autres pays européen. Cela sera sûrement en Allemagne et en Italie.» En attendant, BlaBlaCar s’attend à vendre plus de billets de train que de trajets en bus ou en covoiturage sur les axes clés comme Paris-Lyon.

Avec l’intégration des billets de train de la SNCF, BlaBlaCar fait un pas de plus pour devenir une véritable plateforme multimodale de transport. Objectif à terme : proposer des trajets porte-à-porte, soit le «Graal de la mobilité» aux yeux de BlaBlaCar. «En juxtaposant les moyens de transport que sont le covoiturage, le bus et le train, on se rapproche de ce but», estime Nicolas Brusson. «Nous sommes l’équivalent d’un Booking ou d’un Expedia sur les mobilités terrestres», ajoute-t-il. Et avec son approche et solide base de clients (29 millions de membres actifs dans 21 pays), BlaBlaCar entend bien jouer les premiers rôles dans la bataille de la distribution de ces mobilités.