Pour Wandercraft, l’année 2025 marquera un tournant. Quelques jours après l’annonce d’un partenariat stratégique avec Renault, doublé d’une participation minoritaire du constructeur automobile, le spécialiste tricolore des exosquelettes vient de boucler une série D de 75 millions de dollars.
Le groupe Renault est donc de la partie, tout comme le fonds PSIM, géré par Bpifrance pour le compte de l’État dans le cadre du plan France 2030, la Banque européenne d’investissement (BEI), Teampact Ventures et Quadrant Management. LBO France, XAnge, Cemag Invest, Martagon Capital et AG2R La Mondiale ont également participé à l’opération. Celle-ci intervient trois ans après une série C de 40 millions d’euros. Entre temps, la société avait également reçu un financement de 25 millions d’euros de la BEI au printemps 2024.
Ces dernières années, la croissance de Wandercraft a principalement été tirée par Atalante X, son exosquelette de rééducation pour épauler les personnes dans le réapprentissage de la marche tout en soulageant la charge de travail du personnel médical. C’est l’une des composantes qui permet à l’entreprise française d’aborder l’avenir avec ambition et optimisme. «Wandercraft a eu une sorte d’alignement géant des planètes ces 12 derniers mois», se réjouit ainsi Jean-Louis Constanza, co-fondateur de Wandercraft. Outre le succès d’Atalante X, la mise sur le marché d’Eve, le premier exoquelette personnel auto-équilibré au monde, l’an prochain et le développement de Calvin-40, son robot humanoïde actuellement en fin d’étude clinique avant son homologation par la FDA aux États-Unis, constituent des éléments déterminants pour faire entrer l’entreprise tricolore dans une nouvelle dimension.
«Renault va être notre producteur»
Surtout, c’est le récent partenariat avec Renault qui va changer la donne. En effet, c’est Calvin-40 qui sera au cœur de cette alliance qui permettra ainsi à Wandercraft d’accélérer la production de son robot humanoïde, amené à incarner la gamme d’avenir des produits de la société. «Cela fait quatre ans que l’on travaille en arrière-plan sur les robots humanoïdes. Et dans ce cadre, la rencontre avec Renault devait arriver un jour ou l’autre. Avoir ce groupe à notre capital et comme premier client sur les robots humanoïdes va changer beaucoup de choses. Ce n’est pas facile d’engager un premier client, surtout quand on doit être comparé aux Américains et aux Chinois, mais cela veut dire que nous avons passé le test avec succès», souligne Jean-Louis Constanza.
Au-delà d’avoir la confiance du groupe dirigé par Luca de Meo, ce dernier devrait jouer un rôle plus majeur pour Wandercraft d’ici peu. «A terme, Renault va être notre producteur. Dès que l’on va passer à un volume important, c’est Renault qui produira et c’est quelque chose de fondamental. Depuis 120 ans, l’automobile a réussi à créer de la magie en créant des machines incroyablement complexes à 10 euros le kilo pour sortir une voiture par minute. C’est moins cher que des produits alimentaires comme le yaourt. Ça dépasse l’entendement et c’est l’assurance que nos coûts vont être sur une pente descendante très rapidement. Avec Eve et les robots humanoïdes, on va changer de braquet. Finalement, la robotique est une prolongation de notre ADN», assure le co-fondateur de l'entreprise française.
Calvin-40 : «On l’a développé en 40 jours et on veut qu’il soit dans les usines de Renault dans 40 semaines»
En s’engageant pleinement sur le marché de la robotique humanoïde à échelle industrielle, Wandercaft va se retrouver face à des acteurs comme Boston Dynamics qui appartient désormais à Hyundai, Apptronik qui collabore avec Mercedes, ou encore Tesla. «C’est un club très fermé avec quatre ou cinq acteurs», savoure Jean-Louis Constanza. «Avec Calvin-40, nous nous associons pour introduire la robotique humanoïde dans l’environnement industriel, en commençant par les tâches pénibles et non ergonomiques qui ne devraient jamais être confiées à des humains. C’est une étape décisive vers une automatisation durable et centrée sur l’humain», estime de son côté Thierry Charvet, directeur industrie et qualité du groupe Renault. D’ailleurs, pourquoi ce nom Calvin-40 ? «On l’a développé en 40 jours et on veut qu’il soit dans les usines de Renault dans 40 semaines», sourit Jean-Louis Constanza.
Avec l’un des plus gros constructeurs du monde dans le secteur automobile à ses côtés, Wandercraft s’offre un soutien de taille qui ne peut que faire grandir ses ambitions pour l’avenir. «On produit toujours chez nous Rue de Rivoli, où l’on peut sortir une centaine d’unités par an. Mais on va bientôt chercher un autre site plus grand, avant de peut-être songer à un site dédié avec Renault. Si notre partenariat se poursuit, on va essayer de jouer à fond la carte de production avec eux. Cela nous permettrait d’aboutir à des coûts de production des robots à des niveaux similaires à ceux en Chine. Cela veut dire que l’on va pouvoir relocaliser ce qui a été délocalisé en Chine à cause des coups de main d’oeuvre. Ça va être complètement révolutionnaire», s’enthousiasme Jean-Louis Constanza.
«Un pays qui n’est pas dans la conception de robots sera en deuxième division»
Le dirigeant espère que l’exemple de Wandercraft incitera d’autres acteurs à renforcer l’écosystème hardware en France. «Il y a 10 ans, les investisseurs étaient effrayés par le hardware, mais les nôtres nous ont suivis. On a prouvé à Renault et aux autres qu’on savait faire du hardware. Nous sommes contents d’être là où nous sommes avec des investisseurs qui continuent à nous suivre. On porte une partie de la robotique en France et en Europe, mais il faut vraiment qu’on constitue une équipe de France. Il faut qu’on se regroupe pour faire monter la robotique française sur le podium mondial. Un pays qui n’est pas dans la conception de robots sera en deuxième division», prévient Jean-Louis Constanza.
Dans ce contexte, l’entrepreneur estime qu’il ne faut surtout pas ralentir. «Il faut lever de l’argent pour aller vite. Il y a une véritable fenêtre d’opportunité pour les robots, et si on ne la saisit pas, d’autres le feront. Aujourd’hui, si on serrait les boulons, on pourrait vivre avec nos ventes, mais les marchés ne vont pas nous attendre. Notre production doit être souveraine et européenne pour ne pas dépendre de négociations difficiles dans le climat actuel», estime le co-fondateur de Wandercraft.