2025 s’annonce comme une année cruciale pour Latitude. La pépite du New Space, qui travaille sur des lanceurs réutilisables destinés aux petits satellites, a encore quelques mois pour préparer le premier vol du Zéphyr. Une étape importante pour atteindre l’objectif de Latitude de produire jusqu’à 50 lanceurs Zéphyr par an d’ici 2028. 

Cette année, un nouvel élan devrait également se dessiner à la tête de la startup : Stanislas Maximin, cofondateur et jusqu’alors CEO, a récemment cédé sa place à Aurélie Bressollette. Enfin, 2025 sera également marquée par une nouvelle levée de fonds alors que Latitude avait déjà annoncé une opération de 27 millions d’euros en 2024. Kevin Monvoisin, cofondateur et directeur des services globaux, a fait le point avec Maddyness à quelques jours de l’ouverture du Salon du Bourget.

Maddyness : Comment s’annonce le lancement de Zéphyr ?

Kevin Monvoisin : Le premier vol est prévu en 2026. On avait parlé auparavant d’un premier vol cette année mais c'était très challengeant. Nous avons eu quelques petites difficultés sur le moteur, sur la chambre de combustion notamment. Nos prochains jalons seront d’abord des essais moteurs avec la turbopompe intégrée d'ici l'automne. Ensuite, ce qu'on appelle les essais à étage, c'est-à-dire des essais avec la fusée complète sans décoller. Et puis le premier vol l'année prochaine.

Vous êtes confiant ?

Confiant sur le fait de faire ce vol en 2026, oui plutôt. Confiant sur le fait de réussir ce vol, pas forcément parce nous testerons énormément de choses lors de ce premier vol, c’est le but. La probabilité qu'il arrive en orbite et qu'il puisse délivrer une charge utile est assez faible. Mais en tout cas, nous sommes bien sûr confiants sur le fait d'avancer, de démontrer de belles choses prochainement.

Vous envisagiez une nouvelle levée de fonds cette année, vous êtes en roadshow actuellement ?

Oui, c'est en cours, nous visons entre 40 et 60 millions d’euros en série C. Ça s'annonce plutôt bien, malgré le contexte actuel qui n'est pas le plus propice à lever des fonds. Nous avons une grande confiance de nos investisseurs historiques, ce qui est un point extrêmement positif pour la suite. Il y a un intérêt pour le spatial qui est grandissant. 

Vous préparez également votre déménagement ?

Effectivement, tout est sécurisé pour le futur site sur lequel on souhaite s'installer. Il restera proche de Reims, où nous sommes implantés actuellement. C’est un site de 25000 m², capable d'absorber la montée en cadence de production pour atteindre notre objectif de 50 lanceurs par an. Donc ça demandait beaucoup d'espace correspondant. On envisage un déménagement au premier semestre 2026.

Comment vous engagez-vous pour préserver l'accès à l'espace et réduire l'encombrement ?

C'est un sujet que l'on a pris très à cœur dès le début du développement de Latitude. À l'époque, on pouvait encore laisser nos déchets en orbite pendant 25 ans. Mais nous, nous avons fait le choix, dès le développement du lanceur, d'avoir un deuxième étage qui est réallumable et qui se désorbite, qui revient brûler dans l'atmosphère. Il ne reste donc que de la poussière, dès la fin de la mission. Donc, grosso modo, quelques heures après avoir déployé les satellites, il n'y a plus d'autres traces de notre lanceur dans l'espace.

Après, bien sûr, plus on va mettre de choses en orbite, plus ça va encombrer l'espace. Néanmoins, l'intérêt de ces satellites est aussi d’améliorer la vie sur Terre. Aujourd'hui, 70% des informations qu'on a sur le réchauffement climatique sont issues du spatial. C'est un équilibre à trouver.

Quels sont vos atouts pour vous imposer face à vos concurrents en Europe et dans le monde ?

C’est simplement d'avoir un produit qui soit vraiment dédié au marché que l’on vise. Nous cherchons à être très compétitif sur les petits satellites pour pouvoir faire du vol dédié. Si on fait un comparatif par rapport au transport routier, ce qui existe aujourd’hui, c'est des bus. Vous prenez un bus pour faire Paris-Marseille, vous ne choisissez pas l'heure à laquelle il part et vous ne choisissez pas la rue exacte dans laquelle il va vous déposer. 

SpaceX fait ce qu’on appelle du ride share, ils vont envoyer plein de satellites à un seul endroit. Le problème, c’est que la donnée peut être dégradée si le satellite est un peu trop haut, il sera peut-être nécessaire d’envoyer plus de satellites s'ils ne sont pas au bon endroit et ne couvrent pas la zone qui était prévue… Et puis les clients subissent un temps d’attente extrêmement long, compris entre 18 et 24 mois. Sur un satellite qui a une espérance de vie de 5 à 8 ans, c’est énorme.

Pour reprendre l’analogie, nous, nous sommes en train de développer un Uber ou un taxi, en quelque sorte.