Pendant longtemps, l’Italie a été perçue comme une périphérie de l’innovation européenne. Peu identifiée comme un terrain naturel pour les investisseurs en capital-risque, encore moins comme une source régulière de scale-ups technologiques. Pourtant, les lignes bougent.
Le dernier rapport semestriel de Growth Capital et Italian Tech Alliance sur le capital-risque en Italie en atteste : un écosystème se structure, se stabilise, et s’ouvre progressivement à l’Europe.
Une dynamique soutenue, même sans méga-tours
Au premier semestre 2025, 210 opérations ont été recensées pour 545 M€ investis, un niveau conforme aux moyennes de 2023 et 2024, malgré l’absence de méga-tours. L’activité reste concentrée sur les premiers stades – pré-seed, seed et bridge – qui représentent 60 % des montants levés. Mais les séries A prennent désormais une place centrale, avec 29 levées représentant 222 M€, soit plus de 40 % des montants investis. Leur taille moyenne continue de croître, preuve d’une montée en puissance structurée du marché early stage italien.
Dans un climat européen encore fragile, cette stabilité relative interpelle.
Des secteurs profonds, alignés sur les grands enjeux continentaux
Ce qui distingue l’Italie n’est pas une course au volume, mais une concentration sur des verticales à fort enjeu : Life Sciences, Deeptech, FinTech, Smart City. Des secteurs critiques, souvent moins médiatisés, mais porteurs de vraies opportunités de croissance durable.
Bien que souvent en dessous des radars internationaux du fait de leur taille, les deals présentent un contenu technologique et un ancrage industriel qui en font des cibles crédibles pour les investisseurs paneuropéens.
Une ouverture institutionnelle assumée… et stratégique
Cette dynamique n’aurait pas émergé sans un cadre public structurant. CDP Venture Capital, l’équivalent italien de Bpifrance, joue un rôle moteur dans cette transformation. À travers ses fonds régionaux, thématiques et internationaux, CDP a apporté lisibilité, confiance et capital au marché.
Le programme FoF Internazionale incarne cette stratégie d’ouverture. Il vise explicitement à attirer des fonds européens pour accompagner les scale-ups italiennes dans leur développement. Plusieurs investisseurs transfrontaliers, notamment français, y ont déjà répondu, séduits par un cadre concret et de bonnes conditions de co-investissement.
Un climat en demi-teinte, mais des opportunités à saisir maintenant
Pourtant, le VC Index, baromètre semestriel du marché, reflète une ambivalence. ll s’établit à 4,8 en juin 2025, en repli par rapport à son pic de décembre dernier (5,6). Les indicateurs quantitatifs restent solides — taille des tours, présence d’investisseurs internationaux — mais le sentiment général se détériore.
Les startups comme les investisseurs anticipent un allongement des délais de levée, une pression accrue sur les valorisations, et une faible probabilité d’exit à court terme. Une prudence cohérente avec le climat global européen, mais qui ne remet pas en cause les fondamentaux du marché italien : un dealflow actif, des thèses sectorielles cohérentes, une architecture institutionnelle claire. Et surtout : les portes sont ouvertes. Les fonds européens, notamment ceux à la recherche de nouveaux relais de croissance, ont tout intérêt à s’y intéresser aujourd’hui.
L’Italie n’est plus une exception à la carte VC européenne, elle est une extension logique, pour qui pense l’investissement comme un projet continental.