Des millions de vues sur les réseaux sociaux et des milliers de commentaires pour la vidéo de son intervention relative à Mistral AI et à la taxe Zucman. Éric Coquerel, député LFI et président de la commission des finances à l'Assemblée nationale déclenche la colère et la stupéfaction de nombreux entrepreneurs et dirigeants de la French Tech sur les réseaux sociaux depuis 48 heures. Invité il y a deux jours sur le plateau de la chaîne BFM Business, l'homme politique est interrogé en fin d'interview par la présentatrice Hedwige Chevrillon.


Le débat porte sur la taxe Zucman, du nom de l'économiste français Gabriel Zucman. Celui-ci propose en effet de taxer à hauteur de 2% les patrimoines d'un montant supérieur à 100 millions d'euros. Ainsi, cette taxe, si elle était instaurée, pourrait s'appliquer aux fondateurs de licornes et de startups françaises, qui détiennent une part significative de leur entreprise. C'est notamment le cas des fondateurs de Mistral AI, valorisée aujourd'hui près de 12 milliards d'euros. Arthur Mensch, Timothée Lacroix et Guillaume Lample, les trois créateurs de la pépite française de l'IA générative, possèdent encore une part non négligeable, qu'on ne connaît pas précisément, de leur startup. Ce qui les assujettirait à cette taxe si elle était votée.

Or pour l'instant, Mistral AI ne réalise pas de bénéfices et les fondateurs ne sont "riches" que virtuellement puisqu'ils n'ont pas vendus leurs parts. La journaliste demande donc à Eric Coquerel, favorable à la l'instauration de cette taxe, ce qu'Arthur Mensch, qu'il a l'air de ne pas connaître, devrait faire pour s'en acquitter. Vendre et se séparer de son entreprise ?

A cette question, le député semble déconcerté et ne pas comprendre. Il donne l'impression de confondre le salaire de l'entrepreneur, la valorisation de son entreprise et son patrimoine. "Si son entreprise ne gagne pas d'argent, elle ne produit pas de patrimoine. Il ne paiera pas cette taxe, parce que cela ne concerne que les gens qui gagnent de l'argent", affirme Éric Coquerel. Or, cette taxe concerne bien le patrimoine des contribuables, soit la valeur totale de leur richesse, peu importe qu'ils "gagnent ou non de l'argent".

Une pluie de commentaires

Après ce passage, les réactions sur les réseaux sociaux se sont multipliées. Parmi elles, de nombreux entrepreneurs et dirigeants de startups fustigent cette intervention.

"Intervention lunaire d'Éric Coquerel, qui est PRÉSIDENT de la COMMISSION DES FINANCES (en charge du contrôle du budget de l'État français). Il démontre une incompréhension totale de l'économie et de la finance des entreprises. Dramatique pour l'avenir de la France" déplore sur X (anciennement Twitter) Éric Larchevêque, cofondateur de Ledger, spécialiste des cryptomonnaies. "Ne te fatigue pas, même en agrandissant la piste, on n'a jamais vu un âne réussir à décoller" commente sur le post de ce dernier l'entrepreneur Marc Simonicini, fondateur de Meetic et investisseur chez Daphni.

Alain Ciot, président et cofondateur de France FinTech, principal association du secteur en France, qualifie pour sa part "d'effrayant" sur Linkedin le passage du député. "Ce qui est inquiétant, ce n'est pas l'idée de taxer les gros patrimoines. Ce qui est inquiétant, c'est l'amateurisme complet des gens qui défendent cette idée, qui démontrent leur incompétence alors qu'on les élit pour justement comprendre les sujets afin de légiférer", dénonce sur le même réseau social Vincent Maillard, président et fondateur d'Octopus Energy France, producteur et fournisseur d’énergie verte.

A noter que pour garantir aux créateurs de startups de quand même pouvoir s'affranchir de cette taxe, même s'ils n'en n'ont pas financièrement les moyens, son initiateur Gabriel Zucman propose qu'ils cèdent à l'État leurs actions. Les entrepreneurs payeraient ainsi "en nature" l'impôt. L'État pourrait alors décider de conserver ou non ces parts d'entreprise dans son portefeuille.

Interrogé aujourd'hui sur la mise en place de cette taxe par la presse quotidienne régionale, le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu s'est dit prêt à travailler sur des « questions de justice fiscale », tout en demandant à faire « attention au patrimoine professionnel, car c'est ce qui permet de créer des emplois et de la croissance en France ».