Notre système de santé est à bout de souffle. Difficulté d’accès aux soins, pénurie de médecins, hôpitaux en tension : les signes d’un épuisement généralisé s’accumulent. Un tiers des Français renonce aujourd’hui à se soigner, tandis que 40 % des professionnels de santé se déclarent en situation de burn-out post-Covid. Derrière ces chiffres alarmants, un constat s’impose : le modèle hospitalier, encore structuré autour d’un lieu central, ne répond plus aux attentes ni aux réalités du terrain. À l’heure où les besoins se diversifient et les ressources se fragmentent, il devient urgent de penser autrement l’organisation du soin. Et si l’IA et la digitalisation offraient l’occasion de repenser non seulement les outils, mais aussi les rôles ? Et si, au cœur de cette transformation, le patient devenait enfin un véritable partenaire du système de santé ?
L’IA comme catalyseur de transformation du système de santé.
Les Français attendent beaucoup des avancées technologiques en santé. Une étude réalisée par l’Institut Onepoint en collaboration avec l'institut de sondage Viavoice, indique que 90% des Français ont l’espoir que ces dernières transforment notre système de santé.
Cette enquête, qui sera publiée le 14 octobre à l’occasion de l’événement annuel de l’Institut Onepoint, montre que le développement de l’Intelligence artificielle apparait comme un atout. Cet outil ne doit cependant pas être considéré comme une solution miracle. L’IA constitue bien un levier puissant de transformation systémique, mais ne suffit pas à elle seule à résoudre la crise systémique que nous vivons.
En redéfinissant la manière dont on soigne, le moment où l’on intervient et la manière dont les acteurs interagissent les uns avec les autres, l’IA permet de sortir d’un modèle figé pour aller vers un système plus adaptatif.
Des outils innovants, comme la plateforme Aidy développée par l’institut Imagine, ou encore la solution Replico, illustrent ce potentiel. Ces solutions assistent les médecins dans le diagnostic, la préparation d’interventions complexes ou encore la personnalisation des traitements.
Mais au-delà de la performance technique, l’enjeu est de transformer la logique du soin : passer de la réparation à l’anticipation, du traitement à l’accompagnement. Bref, réinventer l’Art du Care.
Le patient partenaire de sa santé
Cette réinvention ne peut réussir sans une redéfinition du rôle du patient et à son engagement. Grâce aux objets connectés, aux applications de suivi et aux données de santé, chacun devient capable de participer activement à son propre parcours de soin. Tension artérielle, activité physique, sommeil, glycémie : autant d’indicateurs qui permettent de suivre son état de santé au quotidien et de repérer plus tôt les signaux faibles.
Le numérique permet ainsi de prolonger la relation thérapeutique bien au-delà du temps médical stricto sensu. Programmes d’éducation et de formation thérapeutique, plateformes de télé-suivi post-opératoire, carnets de santé intelligents ou refonte numérique du parcours de soin : toutes ces initiatives renforcent la continuité du soin, tout en redonnant au patient un rôle actif, informé, et responsabilisé.
Dans cette logique, la perspective de digitalisation du secteur de la santé peut agir comme un levier d’amélioration dans la continuité du soin, mais également en prévention. Informer et inciter le patient à agir avant la maladie est un enjeu crucial de la santé de demain.
Alors que plus d’un Français sur six ne se sent pas assez impliqué et responsabilisé dans son parcours de soin, le numérique apparait comme un levier d’intégration fort.
Réinventer l’art du Care : le pari de l’hôpital intelligent
L’hôpital ne peut plus être pensé comme le centre unique du système de santé.
Une vision alternative s’impose : celle d’un hôpital distribué, agile, interconnecté. Il s’agit moins de centraliser que d’articuler intelligemment les ressources, en s’appuyant sur les territoires, les plateformes numériques, les bases de données médicales et les dispositifs de proximité.
L’hôpital doit devenir un hub, le nœud d’un réseau de santé plus fluide et plus réactif. Ce changement de paradigme est déjà à l’œuvre dans certains établissements, comme le CHU de Nantes, qui explore de nouvelles formes de collaboration entre soignants, ingénieurs et acteurs du numérique.
À la clé : une réponse mieux adaptée aux besoins de santé publique, qui allie innovation et pragmatisme.
Pour une santé holistique
Le numérique ne sert pas seulement à optimiser l’existant : il permet aussi de repenser les frontières mêmes du soin. Santé mentale, bien-être, hygiène de vie, environnement : les déterminants de santé sont multiples et interdépendants.
Une approche holistique devient nécessaire pour prendre en charge la diversité de l’humain. Mais cette ambition soulève aussi de nombreuses questions : quelles garanties d’accès ? Quelle gouvernance des données ? Quelle éthique dans l’usage des algorithmes ? Qui décide du soin demain : le médecin, la plateforme, l’intelligence artificielle, le patient ? Ces débats doivent être pleinement assumés, car ils conditionnent l’acceptabilité de la transformation en cours. Une chose est sûre : la technologie ne pourra jamais se substituer à l’attention humaine, à l’écoute et à la relation de soin. En un sens, demain sera humain, en santé également.
Changer de cadre, pas seulement d’outils
La véritable révolution du système de santé ne sera donc pas simplement technologique, mais organisationnelle et culturelle. L’IA et la digitalisation n’ont de sens que si elles permettent de repenser les pratiques, les rôles et les relations de confiance entre les acteurs. Il est temps de bâtir une nouvelle alliance entre les professionnels de santé, les patients, les acteurs du numérique et la société civile.
Une alliance fondée sur la transparence, la co-construction et le sens du bien commun. C’est à cette condition que la technologie pourra contribuer à rendre la santé plus humaine.