Alors que l’Europe s’arme pour réguler l’intelligence artificielle et le numérique, un actif stratégique reste trop souvent négligé : le patrimoine contractuel.

Les contrats sont les piliers de toute activité économique et forment la colonne vertébrale de nos échanges. Sans eux, impossible de protéger une innovation, de garantir un droit ou de structurer une relation commerciale. Ils forment en réalité la première brique de notre souveraineté économique et juridique.

Reprendre le contrôle du patrimoine contractuel : un enjeu de souveraineté

Pourtant, une majorité d’entreprises européennes gèrent encore leurs contrats sur des solutions hors de tout contrôle juridique européen. De fait, une grande partie du patrimoine contractuel de nos entreprises se trouve aujourd’hui exposé à des législations extraterritoriales qui permettent, dans certains cas, l’accès forcé à ces données sensibles.

Face à cette situation, les directions juridiques européennes doivent être à l’avant-garde de la protection de nos entreprises. Pendant longtemps considérés comme des fonctions défensives et réglementaires, les juristes ont su montrer année après année l’importance de l’anticipation et de la maîtrise des risques par les entreprises, avec un « ROI » de plus en plus visible. Elles doivent désormais reprendre le contrôle de leur patrimoine contractuel, en intégrant la souveraineté numérique au cœur de leurs pratiques.

Concrètement, cela signifie s’assurer que les contrats sont créés, hébergés et analysés sur des infrastructures conformes aux standards européens de sécurité, de confidentialité et de gouvernance des données. En maîtrisant mieux leurs contrats, les entreprises peuvent mieux cadrer l’impact des évolutions réglementaires sur leurs activités, accélérer leurs prises de décision et renforcer la confiance de leurs partenaires et investisseurs.

La souveraineté juridique est avant tout un levier d’innovation et de compétitivité pour les entreprises, car elle permet d’être au plus près des choix technologiques qui sont réalisés par les éditeurs et d’avoir des solutions adaptées à leurs contraintes locales.

Faire des directions juridiques les architectes d’une souveraineté numérique européenne

Mais cette mutation ne se fera pas seule. Les entreprises doivent s’équiper de solutions technologiques européennes, conçues pour garantir un ancrage souverain et une conformité continue. Les juristes doivent, eux aussi, élargir leur compréhension des infrastructures numériques sur lesquelles reposent désormais leurs décisions. Enfin, les pouvoirs publics doivent soutenir activement cette transition, en encourageant les technologies et entreprises qui incarnent cette vision d’une autonomie juridique européenne.

L’Europe a su bâtir un cadre réglementaire unique. Elle doit désormais le faire vivre à travers des outils européens.

Reprendre la main sur nos contrats, c’est protéger ce qui fonde la confiance et la valeur de nos entreprises. C’est aussi faire des directions juridiques un acteur central de la souveraineté et de la compétitivité européennes.