Le barreau de Paris poursuit sa montée en puissance dans l’intelligence artificielle. En effet, l’institution juridique annonce en exclusivité à Maddyness avoir noué un partenariat avec Mistral AI pour équiper ses salariés avec les outils de la première décacorne française. Les modalités financières de ce contrat n’ont pas été dévoilées.

Avec ce partenariat, l’object est de mettre Le Chat dans les mains des 250 salariés du barreau de Paris. Dans un premier temps, 100 d’entre eux seront des bêta testeurs pour tester l’outil et faire des premiers retours sur leur utilisation, avant un déploiement plus large en janvier 2026. «Tout ce qu’on avait fait jusque-là, c’était pour les avocats du barreau de Paris, mais pas pour les salariés. Ce partenariat avec Mistral AI est donc le dernier axe pour accélérer l’adoption de l’IA dans la structure», explique Pierre Hoffman, bâtonnier de l’Ordre des avocats de Paris jusqu’au 31 décembre prochain. «Nous avons été rassurés par la dernière levée de fonds de Mistral AI car elle confirme que cela reste un acteur européen. Et pour gagner la bataille de l’IA, il faut que des institutions comme le barreau de Paris montrent l’exemple en utilisant des solutions européennes», ajoute-t-il.

Hache de guerre enterrée avec Doctrine

Depuis son arrivée au poste de bâtonnier, Pierre Hoffman n’a pas perdu de temps pour faire passer un nouveau cap dans la transformation numérique du barreau de Paris. En octobre 2024, l’institution avait ainsi noué un partenariat retentissant avec Doctrine, startup française considérée comme le «Google du droit», pour équiper 14 000 avocats parisiens avec cette plateforme d’IA juridique qui agrège les décisions de justice.

Il s’agissait d’une sacrée avancée quand on sait que le Conseil national des barreaux et le barreau de Paris avaient déposé une plainte contre Doctrine en 2019, car les deux institutions estimaient que les données personnelles des avocats étaient manipulées à leur insu. Mais face à un rythme d’innovation qui s’est accéléré encore davantage avec l’IA, les temps et les mentalités ont changé. Et plutôt que s’opposer aux legaltechs tricolores, qui évoluaient la plupart du temps sur une ligne grise, le barreau de Paris s’est finalement décidé à épauler le secteur. «Nous nous sommes rendus compte qu’il y avait un écosystème legaltech assez riche. Dans ce cadre, notre rôle en tant qu’institution est de soutenir cet écosystème. Il faut qu’on soit un moteur de celui-ci», souligne Pierre Hoffman.

«Bâtonnier de l’IA»

Pour le bâtonnier de Paris, qui passera la main à Louis Degos dans deux semaines, l’alliance avec Mistral AI constitue ainsi un moyen de poser une brique complémentaire en matière d’IA. Et pour cause, le barreau de Paris avait déjà noué plusieurs partenariats pour équiper ses avocats d’outils d’IA, à l’image de celui conclu avec Lefebvre-Dalloz en octobre 2024 pour offrir à plus de 10 000 avocats parisiens un accès gratuit pendant 15 mois à un nouvel outil de recherches basé sur l’intelligence artificielle. Pour mettre en œuvre cette initiative, le barreau de Paris avait débloqué une enveloppe d’un million d’euros.

Aux yeux de Pierre Hoffman, il était temps d’accélérer le mouvement pour embrasser pleinement la révolution de l’IA. «Pour moi, l’IA c’est la priorité du bâtonnier. En campagne en 2023, j’ai vu la fracture numérique qui touchait  33 000 avocats du barreau. Car si les grands cabinets ont développé leur IA maison, 14 000 avocats seuls ou à deux n’ont pas d’outil dédié. L’enjeu au début de mon mandat a donc été de m’occuper de ces 14 000 avocats qui ne représentaient pas un marché suffisamment intéressant pour les grands éditeurs de logiciels. D’où l’intérêt des partenariats noués avec Lefebvre-Dalloz, Pappers, Doctrine ou encore Octolo, qui a été désignée meilleure legaltech 2025 par le barreau de Paris lors de VivaTech. L’idée est que chacun trouve l’IA à son pied», explique-t-il.

Pierre Hoffman s’apprête ainsi à quitter ses fonctions avec le sentiment du devoir accompli. «Ma plus belle satisfaction, c’est quand un avocat me remercie pour tout ce qui a été fait en matière d’IA», confie-t-il. Ce qui fait dire à certains collaborateurs de ce dernier qu’il est vu comme le «bâtonnier de l’IA» par les avocats parisiens.