Dans l’imaginaire collectif, les start-up incarnent la vitesse, l’agilité, la prise de risque. Les grands groupes, eux, sont souvent perçus comme lents, prudents, complexes. Deux mondes que tout semble opposer. Et pourtant, c’est de leur rencontre que naît l’une des dynamiques les plus fécondes de l’innovation contemporaine.

Chez EDF Pulse Ventures, le CVC du groupe EDF, nous avons fait le pari de cette alliance. Non pas pour absorber  les start-up, mais pour leur proposer de vrais avantages : un terrain d’expérimentation industriel, une crédibilité renforcée, et un accès à des marchés concrets. Car si les start-up ont besoin de financement, elles ont aussi besoin de maturité industrielle. Et c’est là que les grands groupes peuvent jouer un rôle décisif.

Prenons l’exemple d’Ekoscan, une start-up spécialisée dans le contrôle non destructif par ultrasons. En pleine crise liée à la corrosion sous contrainte dans le nucléaire, EDF Pulse Ventures a investi dans l’entreprise et sa technologie capable d’inspecter les tuyauteries sans arrêt d’exploitation. Au-delà du temps précieux que cela a fait gagner à EDF dans l’identification des pièces touchées par la corrosion, l’intégration de la solution d’Ekoscan à nos processus industriels lui a permis de prouver la fiabilité de sa solution, de mieux comprendre le fonctionnement des grands industriels, et de gagner ainsi en légitimité. Cette coopération a également favorisé le développement de nouveaux outils de mesure communs à Ekoscan et EDF. Nous sommes sortis cette année du capital de la société, mais notre collaboration avec la start-up continue : c’est la preuve que la valeur créée par notre partenariat dépasse largement le cadre financier.

Autre exemple : Siteflow, qui digitalise les opérations de terrain dans les industries sensibles. Dans certains cas, jusqu’à 70 % du temps des agents de maintenance dans le nucléaire est consacré à des tâches administratives manuelles. En intégrant Siteflow dans nos process, nous avons non seulement gagné en efficacité, mais également permis à la start-up de tester, ajuster et valider sa solution dans un environnement exigeant. Ce type de partenariat accélère la montée en puissance technologique et commerciale d’une jeune entreprise. Pour EDF, c’est un levier clair d’efficacité opérationnelle.

Ces exemples illustrent une réalité trop souvent méconnue : les grands groupes ne sont pas des freins à l’innovation, mais des catalyseurs de croissance. Ils apportent aux start-up ce que les fonds d’investissement ne peuvent leur offrir seuls : des cas d’usage réels, des retours d’expérience opérationnels, une marque forte, et un réseau de clients et partenaires. Ils leur permettent de passer du prototype à l’industrialisation, du pitch à la preuve de valeur.

Vers un nouveau rapport entre investisseur et start-up 

Bien sûr, cette relation n’est pas toujours simple. Elle demande du temps, de la pédagogie, et une adaptation mutuelle. Les start-up doivent comprendre les exigences de qualité, de documentation, de sécurité. Les grands groupes, eux, doivent apprendre à faire confiance, à accepter l’incertitude, à sortir de leurs schémas classiques. C’est un travail de fond, mais c’est aussi une transformation culturelle.

Chez EDF Pulse Ventures, nous jouons ce rôle d’interface. Nous ne nous contentons pas d’investir : nous accompagnons, nous connectons, nous facilitons. Nous aidons les start-up à naviguer dans la complexité d’un grand groupe, et nous aidons nos métiers à identifier les solutions les plus prometteuses. C’est ce positionnement, à la fois stratégique et opérationnel, qui fait la différence.

Alors, plutôt que de voir les grands groupes et leurs CVCs comme des mastodontes figés, voyons-les comme des accélérateurs de maturité. Et plutôt que de considérer les start-up comme des électrons libres, voyons-les comme des partenaires capables de transformer l’industrie de l’intérieur.

La question qui se pose désormais est simple : comment généraliser ces synergies ? Comment faire en sorte que chaque start-up à fort potentiel puisse bénéficier d’un accompagnement industriel structurant ? Et comment inciter les grands groupes à jouer pleinement leur rôle dans cette dynamique ?

Car l’avenir de l’innovation ne se joue pas dans la séparation des mondes, mais dans leur convergence.