Des jeunes hommes blancs avec des chemises bleues ciel à en perdre la vue. Vous êtes bien à une conférence de tech française… Dans l’ombre des Futur en Scène et  autres VivaTech, des conférences plus intimistes ont montré cette année un visage différent de la tech et ont proposé des solutions pour rectifier le ratio. Le mot clé : l’inclusivité.

L’Inclusive Tech Summit, organisé par Paris Pionnières, et le Lesbians Who Tech Summit ont mis à l’honneur les habitants des DOM-TOM, les minorités ethniques, les lesbiennes, les queers et les bi, les profils atypiques, bref la diversité : "On ne peut pas parler de mixité sociale dans la tech si on ne mixe pas les entrepreneurs actuels, qui sont des gens très diplômés, avec d'autres profils" explique Caroline Ramade, la directrice de Paris Pionnières.

Lors de sa création en 2005, l’incubateur souhaitait accompagner les femmes, partant du constat qu’elles ne se pensaient généralement pas capable d’entreprendre. Douze ans plus tard, l’objectif n’a pas changé : l’incubateur veut passer de 8% de femmes dans la tech à 50% en développant une culture de l’entrepreneuriat féminin. Mais Paris Pionnière a désormais étendu sa mission et souhaite s’ouvrir à tous les groupes sous-représentés dans la technologie.

Inclusive Tech Summit

La diversité sociale en ligne de mire

Le 12 juin, l’incubateur a ainsi organisé chez Criteo une après-midi de conférence sur l’inclusivité. Si la majorité des panels et présentations étaient dédiées aux initiatives qui permettaient aux femmes de trouver leur place dans cette industrie, une partie avait pour sujet les inégalités sociales et été présentée par des intervenant-e-s travaillant avec des  entrepreneur-e-s des DOM-TOMS, des jeunes des quartiers populaires ou encore des personnes réfugiées.

Paris Pionnière n’entend pas s’arrêter là : "Il y aura toujours une femme dans les équipes, en revanche on va augmenter nos actions envers la diversité sociale" conclue-t-elle.

LWT Paris - Marine Rome

En terme d’ambiance, Lesbians Who Tech Summit détonnaient aussi. Des applaudissements pendant les talks, des encouragements lancés à travers la salle et des rires sincères. Les 150 personnes présentes, essentiellement des femmes queers, étaient contentes d’avoir trouvé une conférence qui leur parle. Abrité chez Google le 23 juin, le Lesbians Who Tech Summit avait pour objectif de donner de la visibilité à des spécialistes tech, des pontes dans leur domaine qui sont aussi des femmes lesbiennes out.

"En France, on manque de manière criante de role models [lesbiennes] et on est bien incapable de citer une femme lesbienne dans le monde de l’entreprise ou de la tech" explique Marine Rome, directrice de Lesbians Who Tech (LWT) à Paris. 

En aucun cas du communautarisme

Non, il ne s’agit pas de communautarisme, précise Marine Rome, mais de normaliser la présence de femmes LGBT+ dans le monde de la tech.

"Quand on fait une injonction à une personne de rester dans le placard, en lui demandant de ne pas parler de sa vie privée, de rester discrète, cela impact son bien-vivre. » estime Marine Rome. "Une entreprise n’a pas envie qu’une de ses employées aient la peur au ventre en arrivant à la machine au café. C’est dangereux pour les salariées et pour l’entreprise." Au contraire si les employé-e-s sont épanoui-e-s, elles et ils vont mieux travailler, s’investir plus, faire preuve de plus de créativité. Bref les entreprises ont tout à gagner à permettre à leurs membres LGBT de se sentir intégré-e-s.

La demande pour ce genre d’événements est telle que des femmes ont fait le déplacement de Belgique et des Pays-Bas pour l’occasion et ont posé un jour de congé. L’association organise aussi des meetups mensuels.

Les programmes de formation ne sont pas en reste. Côté informatique, l’école 42 et Simplon avait déjà misé sur la diversité. 42 en proposant une (non-)tarification et un processus d’admission qui faisaient tomber les barrières et Simplon en proposant des programmes ouverts en priorité aux personnes éloignées de l’emploi aux personnes réfugiées en passant par les personnes en situation de handicap.

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Cela bouge aussi du côté de l’entrepreneuriat innovant, dans quelques semaines, le programme French Tech Diversité annoncera sa première classe de 35 startups. Elles seront accompagnées pendant un an par différents partenaires dont fait partie Paris Pionnières.

"Le programme French Tech Diversité a été accueilli très chaleureusement par l’ensemble des parties prenantes de l’écosystème. Cet accueil est révélateur du quasi consensus sur le constat d’homogénéité et sur la nécessité de mener une action positive qui aura un impact durable pour l’écosystème", explique la responsable du programme Salima Maloufi.

Grâce au travail de sourcing des incubateurs, ambassadeurs et partenaires du programme, le programme a reçu 271 candidatures en un mois et demi. 230 ont été considérées éligibles, c’est-à-dire que les porteurs et porteuses de projets étaient bénéficiaires des minima sociaux, résidentes des quartiers de la politique de le ville ou bénéficiaires d’une bourse de l’enseignement supérieur sur critères sociaux.  

La semaine dernière, c’était au tour de Station F d’annoncer son "The Fighters Program for underprivileged entrepreneurs" qui offre à des personnes venant de milieux défavorisés, immigrantes et réfugiées, un accès gratuit à leur programme d’incubation.

Approches différentes, prise en considération de consommateurs et consommatrices habituellement ignoré·e·s, plus grande tolérance et ouverture d’esprit au sein des équipes, épanouissement des employé-e-s… Le monde de la tech a tout à gagner à être plus inclusif.