À l’occasion d’un débat de trois heures avec les 150 membres de la Convention Citoyenne lundi, Emmanuel Macron a pris un engagement : la tenue d’un référendum sur l’introduction de la défense de l’environnement dans la Constitution. Une autre réponse est passée plus inaperçue mais elle n’engage pas moins le Président de la République dans son implication dans la lutte contre le réchauffement climatique et la réduction de l’empreinte carbone du pays. Et pour ce faire, il a utilisé le nom d’une startup française, Yuka:
« Un ‘score carbone’ pour évaluer l’impact environnemental des produits ? J’y suis favorable. Nous pouvons créer ensemble le @YukaApp du carbone ! »
Un « score carbone » pour évaluer l’impact environnemental des produits ? J’y suis favorable. Nous pouvons créer ensemble le @YukaApp du carbone !
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) December 14, 2020
Entre les cinq ans de l’Accord de Paris et la mise en place de cette Convention citoyenne, dont les recommandations semblaient être restées lettres mortes, le chef de l’État se devait donc d’agir pour souligner son engagement. Mais plusieurs startups n’ont pas attendu cette déclaration pour se lancer sur un sujet dont l’ambition demeure discutable.
On nous répète que le mode de vie français correspond chaque année à l’équivalent de l’exploitation des ressources de deux planètes Terre. Nous savons tous désormais que prendre notre voiture, manger des produits venant de l’autre bout du monde ou acheter des vêtements fabriqués au Bangladesh n’est pas « écolo ». Mais il est parfois difficile de connaître réellement l’impact de nos habitudes quotidiennes sur le climat.
Des startups et des associations se sont déjà lancées sur le sujet. Si Yuka permet de connaître le score qualitatif des produits et travaille depuis quelques temps sur un scoring environnemental, Karbon propose déjà un tel service. L’entreprise lilloise se fonde sur les données d’Agribalyse, d’Open Food Facts, d’Alkemics et d’Ethic Ocean pour analyser et calculer l’empreinte écologique de chaque produit. Sont pris en compte la quantité de carbone émise, la qualité de l’emballage, le respect des océans, l’impact sur la déforestation et l’obtention d’un éventuel écolabel. La société indique avoir déjà analysé la « qualité » écologique d’un million de produits. Et contrairement aux idées reçues, un produit bio n’est pas forcément bon pour la planète ! « La réglementation biologique aujourd’hui est totalement insuffisante » ,rappelait l’ingénieur agronome Christophe Brusset dans une interview en octobre dernier à Konbini.
D’autres entreprises et associations permettent également de mieux comprendre l’impact global de nos attitudes de consommation — alimentation, transport et voyage — sur la planète.
Ainsi, l’application Greenly, lancée en 2019 par Alexis Normand et Matthieu Vegreville, avec Arnaud Delubac, calcule le coût écologique de nos achats en se synchronisant sur nos relevés bancaires. Les algorithmes développées par la startup s’appuient sur les données de l’Ademe (Agence de la transition écologique) pour les produits de grande consommation et sur les rapports RSE des grandes entreprises pour les marques.
L’application Carbo fonctionne sur le même principe en utilisant les calculs de l’Ademe, de la Banque mondiale et de l’index Aland. Elle utilise deux autres critères supplémentaires : la catégorie des commerces visités (comme par exemple un supermarché bio ou un supermarché traditionnel) mais aussi le renseignement des préférences alimentaires de l’utilisateur (végétarien, végétalien…). Des associations ou des fondations comme celle de Yann Arthus-Bertrand (Good Planet) proposent aussi d’effectuer ce type de calcul.
L’enjeu ici n’est pas la culpabilisation mais bien la sensibilisation. Ces structures, startups comprises, ne font pas que constater mais proposent aussi des solutions (défis, alternatives, bons plans) pour modifier nos comportements et réduire notre impact sur la planète. L’arrivée d’un scoring « environnemental » pour les produits transformés pourrait être un bon point pour offrir plus de transparence aux consommateur·rice·s mais sans doute pas le seul levier à activer pour améliorer la situation.
Si le Président Emmanuel Macron a voulu montrer sa détermination à lutter contre le fléau qui nous guette depuis tant d’années, force est de constater que les startups et les associations ne l’ont pas attendu pour entamer ce combat, seules, sans un soutien très vigoureux du gouvernement. En revanche, avec cette annonce, l’État vise peut-être à encourager la transparence des grandes entreprises et des marques.