30 août 2023
30 août 2023
Temps de lecture : 4 minutes
4 min
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Pour les structures d’accompagnement des startups, l’heure de la consolidation a-t-elle sonné ?

Face à la multiplication des incubateurs et des accélérateurs en France, il est devenu difficile pour ces structures d'accompagnement des startups de tirer leur épingle du jeu. Des rapprochements dans le secteur semblent inévitables pour assurer leur pérennité.
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Station F peut héberger un millier de startups. Crédit : Station F/Patrick Tourneboeuf.

Il n’y a pas que les startups qui guettent les opérations de fusions-acquisitions. En effet, sur un marché qui retient son souffle face aux vents contraires de l’économie mondiale, ce sont l’ensemble des acteurs de l’écosystème qui sont concernés par les phases de consolidation. Dans ce contexte, les structures d’accompagnement des startups ne sont pas épargnées. La chute récente d’1Kubator, qui avait permis de donner naissance à 300 jeunes pousses et d’en accompagner plus d’un millier, est d’ailleurs là pour le rappeler.

Il faut dire que les incubateurs et les accélérations se sont multipliés comme des petits pains au cours de la décennie écoulée. Juste avant l’arrivée de la pandémie de Covid-19, le cabinet Roland Berger avait ainsi dénombré plus de 2 600 structures d’accompagnement pour les startups dans l’Hexagone en 2019, contre à peine 560 en 2009. De là à évoquer à une potentielle «incubaphobie» ou une «accélérophobie», il n’y a pas qu’un pas, et Maddyness avait d’ailleurs soulevé cette problématique au crépuscule de l’année 2019.

La peur du vide dans l’ombre de Station F

Mais après une période dorée, qui s’est inscrit dans le sillage de l’envol de la French Tech, cette profusion d’offre d’accompagnement dans l’écosystème français semble aujourd’hui en quête d’un nouveau souffle. Le marché est saturé et il est devenu difficile de tirer son épingle du jeu, et plus encore depuis l’ouverture en juin 2017 de Station F, campus XXL de startups qui fait office de vitrine de la French Tech à l’international.

Cette structure, initiée par Xavier Niel et dirigée par Roxanne Varza, était nécessaire pour offrir un rayonnement mondial à l’écosystème français. Et il faut dire qu’avec un millier de startups accompagnées sur les 34 000 mètres carrés de l’ex-halle Freyssinet, Station F est un sacré paquebot. Mais dans l’ombre de ce géant, les structures plus modestes jouent des coudes entre elles, voire parfois se cannibalisent, ce qui aboutit inévitablement à des faillites ou à des rapprochements pour se renforcer. Dès 2019, le cabinet Roland Berger dressait d’ailleurs un constat sans équivoque sur le secteur : «Le marché est saturé et la compétition est rude dans ce qui est devenu une jungle.»

Les incubateurs des grands groupes omniprésents et (trop) pesants

Pour ne rien arranger, les grands groupes ont été très nombreux ces dernières années à lancer leur programme d’accompagnement pour dénicher des pépites pouvant accélérer leur transformation digitale et s’affirmer comme des locomotives en puissance en matière d’innovation. Face à la vitrine médiatique qu’offre Station F, des entreprises comme Meta, Microsoft, Binance, Thales, LVMH, TF1 ou encore L’Oréal n’ont ainsi pas manqué l’opportunité de s’y implanter en épaulant des jeunes pousses, tandis qu’Orange propose son propre programme de développement avec l’Orange Fab, au même titre que Showroomprivé avec son incubateur Showroom Startups (ex-Look Forward), ou encore Airbus Scale, qui veut donner naissance à des spin-offs à partir de projets internes avec le programme Airbus Scale, en lieu et place de l’accélérateur Bizlab pour l’innovation dans l’industrie aéronautique et spatiale.

De quoi reléguer certaines structures à l’anonymat face à la puissance de communication de ces poids lourds dans leurs domaines respectifs. Et cerise sur le gâteau, certaines guerres internes, à l’image de celle qui secoue The Family, ex-incubateur star de la French Tech, se règlent devant les tribunaux, jetant encore davantage le trouble dans un écosystème des structures d’accompagnement qui doit, de surcroît, faire face à un changement de paradigme. Le robinet à cash ne coule plus à flot et cela se répercute sur le modèle de la plupart des structures qui se retrouvent ébranlées par la situation actuelle.

«Une clarification est nécessaire pour rendre l’écosystème plus lisible»

Dans ce contexte, la consolidation du secteur apparaît inévitable, voire même souhaitable, aux yeux de Clémence Boxberger, directrice générale de La Boussole des Entrepreneurs, une association qui aide les entrepreneurs à choisir la bonne structure d’accompagnement (incubateurs, accélérateurs…). «Une consolidation figure parmi les axes d’amélioration de l’écosystème avec des rapprochements de structures. Il y a un vrai enjeu sur la lisibilité de l’écosystème par les entrepreneurs. Une clarification est nécessaire pour rendre l’écosystème plus lisible et le faire monter en compétences», estime-t-elle. Avant d’ajouter : «Il y a une frontière entre fonds d’investissement et structure accompagnement qui n’est forcément très bien définie.»

Par conséquent, la situation actuelle devrait imposer une remise en cause de la proposition de valeur des incubateurs, accélérateurs et autres structures de l’écosystème. Car s’ils restent des endroits privilégiés pour tester de nouvelles innovations et leur appétence, tout comme leur résistance, au marché, ils sont contraints de revoir leur copie pour assurer leur pérennité. Dans cette perspective, les prochains mois seront décisifs.

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