Après l’euphorie engendrée par l’engouement des consommateurs pour les solutions numériques en pleine crise sanitaire, le retour sur terre est difficile pour les acteurs technologiques. Ce n’est pas Nokia qui dira le contraire alors que le groupe finlandais vient d’annoncer 14 000 suppressions de postes. En France, les startups ne sont pas épargnées, bien que 92 % des jeunes pousses tricolores affirment vouloir continuer à recruter dans les douze prochains mois, selon le baromètre sur la performance économique et sociale des startups de France Digitale.

Face à un contexte économique difficile, sur fond d’inflation et de fortes tensions géopolitiques à l’international, certains startups, y compris des fleurons de la French Tech, ont choisi de réduire la voilure pour privilégier la trajectoire vers la rentabilité au détriment de l’hypercroissance à tout prix. Ainsi, un quart des startups françaises ont taillé dans leurs effectifs au premier semestre 2023, d’après le baromètre de l’emploi des startups en France de Numeum. C’est le mois d’avril qui a été particulièrement décisif avec la suppression de 3 467 emplois dans l’écosystème.

Malgré une embellie sur le marché de l’emploi dans la French Tech ces derniers mois, des coupes d’effectifs dans plusieurs startups sont à déplorer. Maddyness fait le point sur les entreprises qui ont licencié depuis le début de l’année.

Back Market

A peine le Nouvel An célébré, l’annonce des licenciements dans les rangs de Back Market avait fait l’effet d’une douche froide. Le spécialiste des produits reconditionnés a décidé de se séparer de 13 % de ses effectifs, soit 93 salariés parmi ses 700 collaborateurs dans le monde. Dans ce cadre, un plan de départs volontaires a été ouvert en France. Il concernait 63 salariés. Un an plus tôt, Back Market avait bouclé un tour de table de 450 millions d’euros sur une valorisation de 5,1 milliards d’euros.

PayFit

Le début d’année a également été marqué par une coupe de 20 % des effectifs au sein de PayFit. Ce sont près de 200 personnes qui ont été concernées par ce plan de suppression d’emplois parmi les 1 000 collaborateurs de la startup connue pour son logiciel de gestion de la paie et des ressources humaines. Dans ce cadre, l’expansion en Europe de l’entreprise dirigée par Firmin Zocchetto a été impactée avec la fermeture du bureau allemand et une réduction des effectifs au sein de la filiale espagnole. Quant à l’antenne italienne, elle avait été fermée dès 2021. Comme Back Market, PayFit avait levé des fonds en janvier 2022. La société avait bénéficié d’un financement de 254 millions d’euros dans le cadre d’une opération qui lui avait permis d’intégrer le cercle des licornes.

OpenClassrooms

Acteur majeur de l’edtech française, OpenClassrooms a connu un atterrissage brutal après avoir quadruplé ses ventes entre 2019 et début 2022. Face à une croissance qui a faibli au cours de l’année écoulée, la société, qui développe une plateforme d’e-learning, a annoncé un plan de départs volontaires pour se séparer d’un quart de ses effectifs. En réduisant sa masse salariale, OpenClassrooms espère assurer sa pérennité. La société avait profité de l’essor des cours à distance pendant la crise sanitaire, ce qui n’avait pas manqué d’éveiller l’appétit des investisseurs, à l’image du fonds de Mark Zuckerberg et sa femme. En avril 2021, l’entreprise avait ainsi levé 70 millions d’euros pour nourrir ses ambitions.

Ÿnsect

Drôle de mois d’avril vécu par les équipes d’Ÿnsect. Et pour cause, la société spécialisée dans la production de protéines naturelles d’insectes et d’engrais a bouclé un tour de table de 160 millions d’euros pour accélérer sa cadence de production. Mais dans le même temps, elle a décidé de supprimer des empois aux Pays-Bas, où elle a racheté la startup Protifarm en 2021, et mis en place un plan de départs volontaires en France. Ainsi, 35 postes opérationnels ont été abandonnés au pays de la tulipe et 38 salariés en France ont été concernés par un plan de départs volontaires. Néanmoins, une quarantaine de recrutements à des postes clés étaient prévus en parallèle pour le reste de l’année. A noter qu’Antoine Hubert, co-fondateur et CEO d’Ÿnsect, a choisi cet été de lâcher les rênes de la startup industrielle. Cependant, il reste dans l’entreprise en tant que Chief Innovation Officer.

Sunday

Chez Sunday, les années se suivent mais ne se ressemblent pas. Après des débuts spectaculaires, la société, spin-off de Big Mamma qui a lancé une solution de paiement par QR code en pleine crise sanitaire, a réduit la voiture. Partie rapidement à la conquête de l’Europe et du marché américain, l’entreprise, qui avait bouclé une série A de 85 millions d’euros en 2021 dans ce sens, s’est séparée de près de 90 collaborateurs il y a quelques mois, soit environ 20 % de ses effectifs. Plusieurs marchés auraient été fermés en parallèle, mais la société se montre très discrète depuis la révélation de ces licenciements.

Ledger

Année contrastée pour Ledger. Après avoir levé 100 millions d’euros en mars dernier, la licorne tricolore, spécialisée dans la sécurisation des cryptoactifs, a décidé début octobre de licencier 12 % de ses effectifs. Dans une lettre adressée à ses salariés, Pascal Gauthier, le patron de Ledger, a donné les raisons qui ont poussé la société à prendre cette décision. «Malgré tous nos efforts, nous devons continuer à prendre des décisions qui participeront à la pérennité de notre entreprise. La situation macroéconomique actuelle limite notre capacité à générer des revenus», a-t-il expliqué aux collaborateurs de l'entreprise, qui assure protéger plus de 20 % des cryptomonnaies et 30 % des NFT au travers de ses portefeuilles d’actifs numériques.

ManoMano

Coup d’arrêt pour ManoMano. Après avoir enchaîné plusieurs levées de fonds d’envergure, dont la dernière à l’été 2021 pour un montant de près de 300 millions d’euros, la licorne française, à l’origine d’une marketplace de bricolage et de jardinage, a choisi à la mi-octobre de réduire la voilure. Elle prévoit ainsi de supprimer au maximum 150 postes en France et 80 Espagne, soit 230 au total parmi les 900 collaborateurs de l’entreprise. ManoMano cite le contexte économique international difficile, la guerre en Ukraine, l'inflation, l'augmentation des taux d'intérêt ou encore le ralentissement des investissements dans la tech comme autant d’éléments qui l’amènent à se réorganiser.