« A l'heure où la digitalisation des opérations industrielles n’est plus remise en cause, les entreprises investissent massivement dans des technologies avancées comme l'intelligence artificielle et la gestion avancée des données », souligne Wavestone, dans son 8e Baromètre de l'Industrie 4.0 en France, réalisé en partenariat avec France Industrie et BPI France LeHub. Une étude qui révèle les tendances marquantes du secteur industriel. En matière de technologie, l’intelligence artificielle se place d’ailleurs « comme accélérateur de la performance industrielle. » Notamment dans la production, où elle a été intégrée à 14% et dans la chaîne logistique (7%).

« On sent clairement que les entreprises vont vers l’industrie du futur en se transformant numériquement. Pour réindustrialiser le pays, il est primordial qu’elles se modernisent. Il faut pour cela mettre davantage d’intelligence dans les usines qu’elles soit artificielle ou non », commente Jean-Philippe Thierry, directeur innovation et industrie du futur au sein de France Industrie.

« Accélérer la mise sur le marché de produits innovants »

Audrey-Laure Bergenthal, présidente de la startup Euveka, qui a mis au point un mannequin de couture robotisé, capable de s’adapter aux différentes morphologies des femmes, estime, de son côté, que «  l'IA révolutionne la production. » « Elle permet d’analyser de grandes quantités de données en temps réel et ainsi d'optimiser la production ou de prévoir les défaillances des machines. Cela améliore l’efficacité et la personnalisation des produits, pour répondre aux demandes changeantes des consommateurs et accélérer la mise sur le marché de produits innovants. »

Pour autant, l’émergence de cette technologie offre « de nouvelles portes d’entrées aux cyberattaques », souligne l’étude de Wavestone. Et bien que la cybersécurité soit devenue « totalement (ou presque) ancrée dans les mentalités, avec 97% des répondants déclarant intégrer des critères cybersécurité dans leurs initiatives 4.0 », un tiers des industriels racontent avoir déjà subi des dommages suite à une cyberattaque. « Elles sont quotidiennes en France, rappelle Jean-Philippe Thierry. Mais il existe des disparités en termes de défense, qui s’expliquent surtout par la taille des entreprises. » Car toutes n’ont pas les mêmes ressources financières ni humaines. Vincent Champain, vice-président chargé du numérique au sein de Framatome Group, note de son côté que « des comportements peu rigoureux en matière de phishing sont présents dans bien des entreprises. Pourtant, les managers estiment que le problème de la cybersécurité n’est pas le leur. »

57 % des industriels poussent des projets de décarbonation

Si elles engendrent un risque supplémentaire, les technologies 4.0 participent aussi à la décarbonation de l’industrie. « L’IA permet par exemple de produire de manière plus personnalisée, d’améliorer l’efficacité énergétique, avec moins de panne notamment, mais également de mieux maîtriser la consommation de matières premières », souligne le directeur innovation et industrie du futur au sein de France Industrie. C’est l’autre enseignement du baromètre de Wavestone :  les industriels ont « enfin enclenché leurs plans d’actions et s’arment d’outils aidant la décarbonation. »

Ils sont 57 % à avoir lancé des projets en ce sens et 76% disposent d'outils pour mesurer et superviser leurs émissions de carbone, ou sont en train de les mettre en place. Ces initiatives sont toutefois motivées principalement par des considérations financières et réglementaires. Et parfois bloquées par des freins. « Concernant l'objectif de la neutralité carbone 2050 pour l'industrie, dans certaines filières, on est bloqué par les lois de la chimie, les lois de la physique, mais on sait, grâce à l'innovation de rupture, dans le monde de la recherche et notamment dans la deeptech, qu'il y a des pistes permettant de casser ces plafonds de verre. Ce qui n'était pas possible aujourd'hui le sera demain », estime Vincent Moulin Wright, directeur général de France Industrie.

« 30% des collections finissent en déchets »

Pour Audrey-Laure Bergenthal, « la décarbonation est l'un des défis majeurs auxquels l'industrie est confrontée ». Dans le secteur de la mode, « 30% des collections finissent en déchets». Réduire cette quantité est d’ailleurs l’une des raisons d’être d’Euveka. « Notre objectif est de diminuer la quantité de retours et de minimiser la surproduction en offrant des outils qui aident à mieux anticiper les besoins des consommateurs. »

La dirigeante fait d’ailleurs partie des rares femmes à la tête d’une entreprise tech. Même si leur représentation a augmenté de 5 points entre 2021 et 2023, passant de 22 % à 27 %, selon le classement annuel Tyto Tech 500. « Les femmes continuent leur ascension parmi les personnalités les plus influentes de l'industrie technologique européenne », souligne l’agence.  Notamment grâce à « des initiatives visant à encourager et à soutenir les femmes entrepreneures dans le secteur industriel », estime la dirigeante d’Euveka, qui cite les programmes de mentorat, d'accès au financement et de réseautage spécifiques, comme le collectif Industri’ELLES. Pour autant, « il reste beaucoup à faire pour atteindre une parité totale. »