4 mars 2024
4 mars 2024
Temps de lecture : 5 minutes
5 min
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Investissement : quelles sont les tendances en France et en Allemagne ?

Le fonds Iris a réalisé une étude comparative entre la France et l’Allemagne sur les investissements dans les startups. L'occasion de mettre en lumière les nuances qui existent des deux côtés du Rhin.
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Julien-David Nitlech, Managing Partner d’Iris. Crédit : Maddyness.

Entre la France et l’Allemagne, la bataille fait rage depuis plusieurs années sur la scène tech européenne. Grâce à sa montée en puissance au cours de la décennie écoulée, l’écosystème français a même réussi à s’imposer comme le premier d’Europe continentale au niveau des capitaux captés, comme en témoignent les 8,3 milliards d’euros levés par les startups tricolores en 2023. Ces dernières ont ainsi fait mieux que les jeunes pousses allemandes qui ont cumulé 6,6 milliards d’euros levés l’an passé.

Dans le détail, sur un marché du financement du capital-risque en berne depuis près de deux ans, la France a été confrontée à des baisses de 45 % du montant total des investissements dans les startups et de 17 % au niveau du nombre de levées de fonds en 2023 (1 038 opérations), selon une étude sur l’évolution des investissements entre la France et l’Allemagne en 2023 réalisée par le fonds franco-allemand Iris. En Allemagne, les reculs ont respectivement atteint 40 % et 25 % (964 opérations). «Ces courbes signifient que l’Allemagne suit un peu plus les marchés publics mondiaux, notamment aux États-Unis. En France, il y a une plus grande indépendance vis-à-vis de ces marchés, notamment du fait du financement public pour soutenir les startups. Néanmoins, la France suit le mouvement mais avec un léger décalage», analyse Julien-David Nitlech, Managing Partner d’Iris, auprès de Maddyness.

L’IA, star absolue

Sans surprise, l’engouement pour l’intelligence artificielle a été très fort des deux côtés du Rhin en 2023. Et si la France peut s’enorgueillir d’avoir une pépite comme Mistral AI, qui a connu un décollage express l’an passé avec une première levée de fonds de 105 millions d’euros en juin, puis une deuxième de 385 millions en décembre, l’Allemagne n’est pas en reste avec une startup comme Aleph Alpha, qui a levé un demi-milliard d’euros en novembre dernier. A l’arrivée, 6 des 10 plus gros tours de table en France l’an passé ont été bouclés par des startups spécialisées dans l’IA, contre 4 sur 10 en Allemagne. «Derrière les Gafam, on peut trouver des acteurs français comme Yann Le Cun (Meta, ndlr) qui sont à la pointe de ce qui se fait dans l’IA», observe Julien-David Nitlech.

En Allemagne, si l’enthousiasme autour de l’IA existe, son poids dans l’écosystème est cependant moins écrasant en France, avec des financements un peu plus diversifiés dans des secteurs comme le SaaS, la fintech, l’énergie verte ou encore la sécurité. Un horizon plus large encouragé par un niveau d’open innovation bien plus fort en Allemagne qu’en France. En effet, il n’est pas rare de retrouver des grands groupes comme SAP et Porsche derrière des tours de table majeurs outre-Rhin, quand ce sont plutôt Bpifrance et les fonds américains à la manœuvre pour les plus grosses levées de fonds dans l’Hexagone. «L’Allemagne dispose d’un tissu industriel et international beaucoup plus fort. Mercedes dans l’automobile ou SAP dans le software sont de bons exemples», relève Julien-David Nitlech. Avant d’ajouter : «En France, les corporates sont davantage dans l’apprentissage de l’investissement.»

«Il y aura beaucoup de fusions-acquisitions en France en 2024»

Parmi les autres enseignements de l’étude d’Iris, il ressort également que les startups allemandes les plus prometteuses rejoignent plus rapidement le cercle des licornes que les jeunes pousses françaises à fort potentiel. Ainsi, les premières citées ont besoin environ de 6,7 ans pour atteindre le milliard de dollars de valorisation, contre 7,4 ans pour les deuxièmes qui mettent essentiellement l’accent sur le B2B (63 %). «En France, il n’y a eu qu’une seule licorne en 2023 (Mistral AI, ndlr). En Allemagne, il y a une plus forte continuité avec un bassin un peu plus distribué et un financement plus internationalisé. Les sociétés allemandes partent également plus rapidement sur des cas pratiques», note le Maning Partner d’Iris. Ainsi, l'Allemagne hébergerait 50 licornes actuelles, contre 29 en France, même si ces chiffres sont probablement plus bas en réalité en raison de valorisations en chute libre à cause de la crise du financement de la tech.

Enfin, concernant les difficultés qui secouent la tech mondiale, Français et Allemands ne vont pas être épargnés. Néanmoins, c’est le timing de ces turbulences qui diffère légèrement d’un pays à l’autre. «Il va y avoir beaucoup de faillites en France cette année, ça va être colossal. Quant à l’Allemagne, c’est un marché qui s’adapte. La chute a été forte, avec beaucoup de faillites, mais celle-ci a déjà été absorbée. Dans l’Hexagone, les marchés sont davantage en transition. Mais globalement, il n’y a pas vraiment de tropisme régional ce sujet», estime Julien-David Nitlech. Et de conclure : «L’année va être passionnante dans les deux pays, avec beaucoup de fusions-acquisitions en France (704 en 2023, contre 647 en Allemagne) et un retour à du SaaS traditionnel en Allemagne, des groupes comme SAP par exemple. Outre-Rhin, l’année est déjà très équilibrée sur les financements et les exits, je suis assez curieux de voir comment les prochains mois vont se passer. Mais ce qui est sûr, c’est que l’IA écrase un peu l’innovation en ce moment.» Une tendance qui ne devrait pas s'estomper de sitôt, aussi bien en France qu'en Allemagne.

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