Pour un entrepreneur, rien n’est jamais acquis, et plus encore dans la période actuelle alors qu’il est plus difficile de lever des fonds depuis près de deux ans. Ce n’est pas François de Vitte qui vous dira le contraire, surtout qu’il a connu une époque où lever 10 à 20 millions d’euros était déjà un exploit dans un écosystème tech tricolore qui commençait sérieusement à monter en puissance.

Cet entrepreneur français est à l’origine de Popchef, une société pionnière dans le secteur de la Foodtech dans l’Hexagone puisqu’elle a fait le pari de se lancer dans la livraison de repas avant même l’arrivée de Deliveroo et Uber Eats sur le marché français. «Nous avons bloqué tous les Vélib’ du Sentier en 2015», se souvient avec le sourire François de Vitte, qui a fondé la société avec Briac Lescure. «Nous étions la première foodtech parisienne à nous lancer. Ça paraît dingue de se dire ça aujourd’hui ! Quand nous nous sommes lancés, il y avait beaucoup de scepticisme. J’ai même le souvenir d’un investisseur qui me disait que ça ne marcherait jamais. Aujourd’hui, qui peut dire que la Foodtech ne marche pas ? C’est un marché de plusieurs milliards d’euros», ajoute-t-il au micro de «Level Up», le podcast de Maddyness en partenariat avec BNP Paribas Banque Privée.

«Ce qui fait la différence, c’est la résilience»

Mais si Popchef avait rapidement vu juste sur le marché de la livraison de repas, la startup n’a pas pu lutter à armes égales face à l’armada financière mobilisée par Deliveroo et Uber Eats pour dévorer tout cru le secteur. Face à une concurrence particulièrement féroce, la société s’est retrouvée dans une position très périlleuse en 2017, une année où toutes les planètes se sont alignées dans le mauvais sens. «Nous n’avons pas réussi à financer notre croissance qui coûtait beaucoup d’argent. En 2017, nous voulions lever 10 millions d’euros, mais ça ne s’est pas fait. Nous avions eu aussi des discussions d’acquisition assez avancées avec un acteur industriel, mais celles-ci ont pris fin car le dirigeant s’est fait licencier. Or si le dirigeant change à ce moment-là, tout s’arrête car personne ne veut prendre le risque de mettre sa signature sur le dossier. Les nouveaux directeurs généraux ont un peu tendance à déconstruire ce que faisait celui d’avant», analyse François de Vitte.

Malgré le bord du précipice qui se rapprochait, l’entrepreneur français n’a pas baissé les bras et s’est souvenu d’une phrase de Marc Simoncini qui a résonné en lui : «Ce qui fait la différence, c’est la résilience.» Après avoir appris en plein voyage de noces que le processus d’acquisition n’aboutirait pas, le cofondateur s’est retroussé les manches avec son équipe pour sauver l’entreprise et un pivot vers le B2B s’est imposé, non sans douleur. «Passer de 35 à 6 salariés, cela a été extrêmement violent», reconnaît François de Vitte.

Aussi difficile fut-elle, cette restructuration a permis de mettre la société sur les rails d’une croissance durable avec son concept de cantine connectée à destination des entreprises. La startup a même levé 15 millions d’euros en mai 2022 pour monter en puissance sur le marché de la pause-déjeuner où l’on retrouve des acteurs comme Foodles. Un an plus tard, la société s’est également dotée d’un nouveau dirigeant, avec l’arrivée de Nathalie Guillet-Gérard au poste de CEO.

«Level Up» décrypte la stratégie des scaleups françaises

Près de dix ans après la création de Popchef, François de Vitte a pu tirer les enseignements de cette aventure entrepreneuriale à rebondissements. Comment se réinventer quand l’entreprise est au bord de la faillite ? Quelles sont les clés pour se distinguer sur le marché ultra-concurrentiel de la foodtech ? Comment parler à ses équipes d’une situation délicate qui aboutira à des licenciements ? Quand faut-il se doter d’un nouveau CEO pour mener l’entreprise dans sa prochaine phase de développement ? Autant de questions que le cofondateur de Popchef aborde sans détour dans ce troisième épisode de la saison 2 de «Level Up».