Quel est le point commun entre Ferrero, Nestlé et McDonald’s ? Ces trois multinationales ont toutes été confrontées à plusieurs reprises à des scandales sanitaires en raison de contaminations bactériologiques dans leurs chaînes de production. Pour réduire la probabilité de tels incidents qui coûtent des millions d’euros aux entreprises (coûts de production, amendes réglementaires…) et engendrent une perte de confiance des consommateurs, la deeptech Spore.Bio a vu le jour en 2023.
La société annonce aujourd’hui une série A de 23 millions de dollars menée par le fonds Singular. Station F, First Kind, family office de la famille Peugeot, et Point 72 Ventures ont participé à l’opération, tout comme des investisseurs historiques, à l’image de LocalGlobe, No Label Ventures et Famille C, le family office de la famille Clarins. Cette levée de fonds intervient un peu plus d’un an après un premier tour de table en pré-seed de 8,3 millions de dollars annoncé en décembre 2023.
Des tests microbiologiques express pour repérer les contaminations
Fondée par Amine Raji, Mohamed Tazi et Maxime Mistretta, la startup s’attèle à améliorer le contrôle de qualité des produits sur les sites de production des industriels, notamment dans le secteur agroalimenaire, l’industrie pharmaceutique ou encore le domaine des cosmétiques. Pour cela, le trio de fondateurs a cherché à optimiser les tests microbiologiques qui prenaient jusque-là beaucoup trop de temps.
« J’ai travaillé chez Nestlé pendant six ans et j’ai vu les outils qu’on avait pour détecter les bactéries. Le principal, c’est la boîte de Petri et le gros inconvénient est qu’il faut attendre entre 5 et 14 jours pour avoir le résultat. C’est très long ! Entre la mise sur le marché des produits et le moment où l’on sait qu’ils sont contaminés une semaine plus tard, les dégâts peuvent être considérables », explique Amine Raji, cofondateur et CEO de Spore.Bio. Avant d’ajouter : « Un défaut de production génère en moyenne 10 millions d’euros de pertes. Et parfois, le scandale est tel que la marque disparaît. »
Une technologie qui est en train de sortir des laboratoires
Devant ce constat, l’entrepreneur français et ses associés ont mis au point une technologie pour détecter et quantifier les bactéries en quelques minutes. Cette solution repose sur des modèles de machine learning pour mesurer en temps réel la charge bactérienne des produits analysés, de manière à alerter rapidement les responsables qualité en cas de contamination. « Notre dispositif permet de voir les bactéries au niveau microscopique et nos modèles d’IA sont capables de reconnaître la signature spectrale des bactéries. Aujourd’hui, nous disposons d’une librairie de plusieurs centaines de milliers de bactéries », indique Amine Raji.
En 2024, la deeptech tricolore a validé ses premiers prototypes dans ses laboratoires parisiens. « L’idée était d’aboutir à une petite machine Nespresso pour la déployer dans les usines », résume le patron de la société. Cela a permis à cette dernière de décrocher des contrats avec plusieurs industriels pour déployer sa technologie dans plus de 200 usines, qui doivent être prochainement équipées en Europe, en Afrique et en Amérique du Nord. « Les États-Unis sont un gros sujet pour nous. L’enjeu est de taille là-bas alors que 2024 a été une année record au niveau du nombre de rappels de produits de grande consommation », note Amine Raji. Dans ce contexte, Spore.Bio envisage d’ouvrir un bureau outre-Atlantique.
En parallèle, la jeune pousse a noué un partenariat avec l’Institut Pasteur pour accéder à la plus grosse bibliothèque de bactéries au monde. Elle a également mis la main sur son concurrent Greentropism, « qui avait accumulé une grosse expertise dans le domaine de la détection de bactéries », pour se renforcer.
L’industrialisation en ligne de mire
Afin de continuer à monter en puissance, Spore.Bio entend s’appuyer sur son nouveau tour de table pour doubler ses effectifs, de manière à passer de 25 à 50 scientifiques et ingénieurs dans les prochains mois. La société compte également passer la vitesse supérieure au niveau de son industrialisation. « On entre dans une deuxième phase : du laboratoire à l’usine. On veut produire plusieurs centaines de machines », résume Amine Raji. Avant d’ajouter : « On veut avoir un impact mondial pour que beaucoup moins de personnes meurent d’infections alimentaires. »
Par conséquent, les dirigeants de la deeptech n’envisagent pas de vendre l’entreprise malgré des industriels spécialisés dans les boîtes de Pétri et les tests PCR qui ont exprimé des marques d’intérêt à son égard. « Nous voulons rester indépendants, on veut tracer notre route », assure le patron de Spore.Bio.