« Toute sa vie est construite sur un sentiment d’insécurité », vociférait Sam Altman en réponse aux tacles répétés d’Elon Musk contre OpenAI. De son côté, Trump affiche fièrement son mugshot dans le Bureau ovale pour troller celles et ceux qui voudraient se moquer de son passage en cellule. Ados en crise ou dirigeants les plus puissants du monde ? Bonne question. Pendant ce temps, Ursula von der Leyen et Christine Lagarde dirigent avec discipline les institutions les plus influentes. En politique, ces comportements nous sautent aux yeux et nous semblent absurdes. Pourtant ils ne sont pas moins présents dans la vie économique. Alors, quand comprendrons-nous enfin que la rationalité et la pérennité de nos entreprises exigent plus de femmes au pouvoir ?

Femmes et pouvoir : place à la raison

L'argument selon lequel les femmes seraient trop émotives pour gouverner paraît désuet lorsqu'on constate l’emprise de l'ego et des pulsions sur les décisions de nombreux dirigeants masculins. Aujourd'hui, les femmes ne représentent qu'un tiers des talents en intelligence artificielle, selon LinkedIn. Pourtant, les compétences qu'elles apportent – notamment en matière de coopération, de communication et d'empathie – sont cruciales pour l'avenir du secteur.

L'IA est une industrie en pleine expansion, où l'inclusivité et la diversité jouent un rôle essentiel dans la conception d'algorithmes équitables et dans l'évitement des biais. Une étude du World Economic Forum montre que la mixité dans les équipes techniques améliore la qualité des décisions et réduit les biais systémiques présents dans les modèles d’IA. Des entreprises comme DeepMind et Hugging Face ont déjà pris des initiatives en faveur d'une meilleure représentation féminine dans leurs équipes de recherche.

Contrairement aux grandes entreprises soumises aux quotas de la loi Rixain (qui impose un minimum de 40 % de femmes dans les instances dirigeantes des entreprises de plus de 1.000 salariés d’ici 2030), les startups et scale-ups ne comptent pas attendre. De nombreuses jeunes entreprises tech adoptent proactivement des politiques favorisant le recrutement et la promotion des talents féminins. Par exemple, Anthropic, spécialisée dans l’IA responsable, met en place des initiatives pour attirer plus de chercheuses, tandis que Giskard, une startup française, s’engage sur la création d’IA éthique en intégrant des expertises diverses.

Pouvoir verrouillé, exercice perverti

Parler de plafond de verre depuis plus de 30 ans, c’est occulter une réalité plus profonde : ce n’est pas une simple barrière fragile, mais une structure de pouvoir bâtie sur des siècles de domination masculine. En verrouillant l’accès au pouvoir, les hommes ont fini souvent par en pervertir l'exercice. Loin du mythe du leader rationnel et visionnaire, nombreux sont ceux qui dirigent sous l'emprise de l'ego, de la susceptibilité ou du besoin de domination. Les dérapages récents de PDG de la tech, les crises politiques engendrées par des comportements impulsifs et les instabilités créées par des guerres d'ego en sont les illustrations frappantes.

Face à cela, il ne s’agit pas seulement d’équité mais de bon sens : ouvrir davantage les cercles du pouvoir aux femmes, c’est réintroduire des formes de leadership qui valorisent aussi la coopération, l’anticipation et la responsabilité. Loin d’être un caprice féministe, c’est une nécessité. Si nous voulons éviter de continuer à réparer les dégâts laissés par des dirigeants impulsifs et centrés sur eux-mêmes, il est temps d'ouvrir les portes du pouvoir aux femmes. Pas seulement pour le bien des femmes, mais pour le bien de tous.