Il y a eu du bruit, des tribunes, des inquiétudes. Certains ont même cru que le régime des BSPCE allait perdre tout intérêt. La réalité est plus modeste : la loi de finances pour 2025 ne fait pas table rase, elle affine. Certes, quelques lignes bougent, et il faudra adapter certains réflexes. Mais pour l’immense majorité des salariés concernés, les conséquences restent limitées. Pour les startups et scale-ups, l’enjeu est clair : intégrer les nouveautés sans paniquer. Le principal changement tient à l’introduction d’une distinction entre gain d’exercice et gain de cession.
Le gain d’exercice est la différence entre la valeur des titres au jour de l’exercice des BSPCE et le prix d’exercice des BSPCE. Ce gain est imposé en fonction de l’ancienneté du salarié dans l'entreprise à la date de cession des titres (selon les modalités de l’ancien régime des BSPCE). Ainsi, dans l’hypothèse où le salarié a moins de 3 ans d’ancienneté, on applique le taux forfaitaire de 30%, auquel s'ajoutent les prélèvements sociaux au taux de 17,2 %, soit un taux global de 47,2%. Dans l’hypothèse où celui-ci a plus de 3 ans d’ancienneté, les taux de 12,8 % d'impôt sur le revenu (ou sur option, imposition au barème progressif de l’IR) et 17,2 % de prélèvements sociaux s’appliquent.
Le gain de cession est la différence entre le prix de cession des titres issus des BSPCE et la valeur des titres au moment de l’exercice des BSPCE. Ce gain est, en principe, imposé selon les règles des traitements et salaires (taux maximum de 45% auquel s'ajoutent les contributions sociales à hauteur de 10%), et par exception dans la catégorie des plus-values de cession (flat tax, 12,8% + 17,2) pour la quote-part du gain de cession inférieure à 3 fois la performance financière de la startup.
Pas hausse de la fiscalité pour les salariés
C’était l’inquiétude majeure : la réforme allait-elle entraîner une hausse de la fiscalité pour les salariés ? La réponse est (heureusement) non dans la majorité des cas.En effet, une grande majorité des salariés exercent leurs BSPCE et cèdent leurs actions au même moment, à l’occasion d’un événement de liquidité (exit, opération de secondaire). Dans ce cas, 100% du gain réalisé par le salarié sera considéré fiscalement comme un gain d’acquisition, tandis que le gain de cession sera nul, de sorte que la réforme est fiscalement neutre.
Par ailleurs, l’application du multiple de performance financière suppose (i) qu’il existe un lien entre le gain de cession et l’attribution des BSPCE étant précisé que la seule attribution aux salariés ou dirigeants n’est pas suffisante pour caractériser ce lien et (ii) que le multiple dégagé par le salarié cédant soit supérieur au multiple projet, ce qui, en pratique, ne sera que très rare.
En revanche, si le salarié choisit d’exercer ses BSPCE sans céder immédiatement ses titres et que les conditions d’application du plafond de performance financière sont réunies, la distinction prend tout son sens et peut devenir piégeuse. Un gain de cession pourrait être taxé jusqu’à 59%. L’exercice des BSPCE en cas de cession différée devient alors une décision à ne pas prendre à la légère.
PEA et apport à une holding : deux portes désormais fermées
Deux clarifications importantes sont également intervenues, souvent passées sous les radars mais aux effets réels : d’une part, les actions issues de l’exercice de BSPCE ne peuvent pas être placées dans un plan d’épargne en actions et celles y figurant, ne peuvent pas bénéficier du régime fiscal du PEA, empêchant tout espoir d’exonération d’impôt à l’issue de la période de blocage de cinq ans.
D’autre part, les actions issues de BSPCE ne peuvent pas bénéficier des régimes de différé d’imposition si elles sont apportées à une société. Le gain d’exercice sera imposable lors de l’apport, fermant la porte à réinvestissement via une holding personnelle et obligeant le décaissement de fonds propres (épargne ou emprunt) pour s’acquitter de l’impôt sans toucher de cash.
Un enjeu de conformité plus qu’un bouleversement
Pour les startups et scale-ups, le régime reste globalement inchangé et demeure très attractif, surtout par comparaison avec d’autres outils d’intéressement. La réforme n’a pas touché aux fondamentaux : simplicité d’attribution, absence de charges sociales pour l’entreprise, fiscalité allégée pour le salarié.
En revanche, la réforme implique un suivi plus rigoureux puisque la startup devra désormais documenter précisément la valorisation des titres de manière régulière afin de connaître la valeur d’exercice, qui conditionne la répartition entre gain d’acquisition et gain de cession ; en outre, la startup devra informer clairement le salarié sur les conséquences fiscales en cas d’exercice sans cession immédiate.
Autrement dit, il devient essentiel de formaliser un processus d’information et d’accompagnement des salariés, pour éviter toute mauvaise surprise. Rien d’insurmontable, mais un effort de pédagogie est requis.