«Go France !» Avec sa fameuse veste noire en cuir, Jensen Huang, le patron de Nvidia, a débarqué sur la scène du Dôme de Paris ce mercredi 11 juin sur les coups de 11h. Dans une salle qui attendait l’ingénieur taïwano-américain comme le messie, ce dernier a été acclamé. Il faut dire que son entreprise Nvidia s’est rendue incontournable dans le secteur de l’intelligence artificielle avec ses puces électroniques qui se vendent comme des petits pains. Fondateur de cette société valorisée autour des 3 500 milliards de dollars à Wall Street, Jensen Huang est par conséquent l’un des dirigeants les plus puissants du monde.

Après avoir séduit les États-Unis au CES de Las Vegas puis l’Asie au Computex, le patron de Nvidia a donc choisi Paris pour conquérir l’Europe. C’est d’ailleurs dans le cadre de VivaTech que se tient GTC, la conférence du groupe américain dédiée à l’IA, pour la première fois dans la capitale française. Durant sa prestation d’1h30, régulièrement agrémentée de petites blagues avec son humour légendaire, Jensen Huang a bien évidemment exposé sa vision dans l’IA. «Vous serez peut-être surpris que je parle d’IA», a-t-il lancé sous les rires d’une audience acquise à sa cause. «Je suis ravi que l'Europe fasse all-in sur l’IA !», a-t-il renchéri sous les applaudissements.

Un partenariat très attendu avec Mistral AI

Après avoir présenté l’écosystème tricolore qui collabore avec Nvidia, à l’image de startups comme Exotec, Photoroom, H ou encore Hugging Face, et de grands groupes comme BNP Paribas, Stellantis et L’Oréal, Jensen Huang a dévoilé ce que tout le monde pressentait depuis la veille et l’annonce d’une session de dernière minute avec le patron de Nvidia, Arthur Mensch, le PDG de Mistral AI, et Emmanuel Macron, à savoir un partenariat avec la pépite tricolore de l’IA.

Cette alliance vise à mettre sur pied une offre cloud dédiée à l’IA. Baptisée «Mistral Compute», cette infrastructure IA annoncée comme souveraine et particulièrement puissante sera dotée de 18 000 superpuces Blackwell, dont Jensen Huang n’a cessé de faire l’éloge durant sa keynote. Une manière pour Mistral AI d’élargir d’un cran sa palette en devenant un acteur à part entière de l’infrastructure IA qui intègre du cloud et de la puissance de calcul. «L’Europe a maintenant pris conscience de l'importance de ces usines d'IA, de l'importance de l'infrastructure d'IA, et je suis ravi de voir autant d'activité ici», s’est réjoui le patron de Nvidia. Avant d’ajouter : «En deux ans seulement, nous allons multiplier par dix la capacité de calcul de l'IA en Europe.»

Outre l’IA, Jensen Huang a également évoqué son appétit pour l’informatique quantique, un secteur d’avenir qui ne demande qu’à prendre son envol à ses yeux. «Il y a un point d'inflexion dans l'informatique quantique», a-t-il estimé. Avant de poursuivre : «Il est clair maintenant que nous pourrions appliquer l'informatique quantique dans des domaines qui peuvent résoudre des problèmes intéressants dans les années à venir.» Dans ce contexte, il a salué un écosystème «incroyablement riche» en Europe, indiquant au passage qu’il avait rencontré Pasqal, l’un des fleurons tricolores du quantique, ce mardi soir. Sur le Vieux Continent, Nvidia prévoit notamment de soutenir le développement de centres technologiques, notamment en Espagne, en Italie, au Royaume-Uni, en Finlande, en Allemagne ou en Suède, où un nouveau centre de recherche sur l'IA sera doté de puces de l'entreprise californienne.

Le premier cloud IA industriel au monde construit en Europe

Avec les perspectives offertes par le quantique et la révolution industrielle que constitue l’intelligence artificielle, Jensen Huang estime qu’on assiste à un changement de paradigme qui va contribuer à l’essor de nombreuses «AI Factory» partout dans le monde entier, citant l’exemple de l’infrastructure nécessaire pour l’application du plan Stargate aux États-Unis. «Stargate ne ressemble pas à un data center mais à une usine», a-t-il ainsi souligné.

Dans ce cadre, le dirigeant de Nvidia a ainsi annoncé la construction du premier cloud IA industriel au monde en Europe. Une manière de faire basculer le milieu industriel dans une nouvelle dimension, où les «Digital Twins», ces fameux jumeaux numériques qui permettent de virtualiser un objet physique ou un système utilisé dans le monde réel, sont amenés à se démocratiser aux yeux de Jensen Huang. «On peut tout transformer en Digital Twin désormais. Tout ce qui est physique sera construit de manière digitale à l’avenir», a-t-il assuré.

Cette démocratisation des jumeaux numériques devrait constituer un terrain propice à l’essor des robots humanoïdes, que ce soit dans les usines, les hôpitaux, les magasins ou même à domicile. Pour Jensen Huang, cette révolution robotique est imminente, puisque l’IA physique est la prochaine étape après l’IA agentique, vague de l’IA qui bat actuellement son plein. Dans ce contexte, le patron de Nvidia en a profité pour faire la promotion d’Isaac, la plateforme du groupe américain pour développer des robots humanoïdes.

Le robot «Blue» en clôture de la keynote

Cerise sur le gâteau, il a ramené sur scène «Blue», un robot développé en partenariat avec DeepMind et Disney Research dans le cadre du projet Newton. Celui-ci a interagi en temps réel avec Jensen Huang, suscitant l’admiration de l’audience. Si ce n’était pas la première fois qu’il était présenté au public, ce robot reste fascinant à voir en action. En tout cas, Paris est d’ores et déjà sous le charme du patron de Nvidia.

La «Jensen Mania» à VivaTech ne fait que commencer. Elle se poursuivra plus tard cet après-midi, aux côtés d’Emmanuel Macron et d’Arthur Mensch, toujours dans le Dôme de Paris.