C’est ce qu’on appelle la rançon de la gloire. Swile a beau n’être né qu’en 2018, la licorne de Loïc Soubeyrand est déjà mise dans le même panier que les poids lourds historiques du marché des titres-restaurant, comme Edenred, Up Coop et Pluxee. En effet, cinq acteurs du marché (Lucca, Worklife, Contakt, Coup de pousse et Ekip) se sont alliés pour lancer le «Collectif pour le rééquilibrage des commissions titres-restaurant». Ce dernier a vocation «à mettre fin aux pratiques opaques et aux déséquilibres d’un marché de 10 milliards d’euros dominé à plus de 95 % par quatre acteurs historiques», dont Swile.
S’il est flatteur pour la startup montpelliéraine, qui se dit désormais rentable sur une année entière, d’être mise au même niveau qu’un Edenred, les cinq sociétés du collectif estiment qu’elle participe à entretenir un «oligopole» qui «empêche l’apparition d’une saine concurrence». Trois reproches sont faits à Swile, Endenred, Up Coop et Pluxee : «des commissions devenues insupportables» ; «des rétro-commissions qui faussent le jeu de la concurrence» et «une opacité tarifaire assumée». «Sur un chiffre d’affaires annuel de 50 000 euros en titres-restaurant, un restaurant peut perdre jusqu’à 2 250 euros par an en commissions – une somme considérable pour un commerce de proximité où les marges sont très contraintes», souligne Gilles Satgé, porte-parole du collectif et dirigeant de Lucca.
3 mesures pour changer les règles du jeu
Dans ce contexte, Lucca, Worklife, Contakt, Coup de pousse et Ekip appellent à la mise en place d’un modèle bancaire alternatif qui serait ouvert et «assis sur les standards bancaires Visa, Mastercard et CB», pour mettre fin aux commissions dénoncées. «Ce modèle respecte les règles de la concurrence et permettrait de réinjecter près de 300 millions d'euros dans l'économie locale», assure Gilles Satgé.
Aux yeux des acteurs qui composent ce collectif, il est nécessaire de réformer le secteur autour de trois mesures majeures : «interdire les doubles commissions (bilatérales + frais de carte de paiement)» ; «interdire les rétro-commissions versées aux employeurs» et «rendre obligatoire la transparence tarifaire auprès des commerçants». Les acteurs en croisade contre les leaders du secteur estiment que cela favorisera l’émergence d’une libre concurrence. «Le titre-restaurant est un outil social précieux. Il est temps d’en finir avec un système qui enrichit quelques-uns au détriment de tous les autres. Le modèle bancaire ouvert est prêt. Il ne tient qu’au gouvernement de le rendre accessible à tous», conclut Gilles Satgé. Reste désormais à savoir si ce vent de soulèvement soufflera jusqu’à Matignon.