Les nouveaux Cassandre de la tech ne prédisent plus une simple transformation des métiers, mais une onde de choc brutale sur l’emploi qualifié, aux proportions inédites depuis la révolution industrielle et sa mécanisation. Ainsi, Jim Farley (PDG de Ford) prophétise que l’IA remplacera « littéralement la moitié des cols blancs » aux États-Unis. Dario Amodei (Anthropic) prévoit la disparition de 50 % des emplois débutants sous 5 ans, et un taux de chômage pouvant atteindre 20 %. Enfin, Tobi Lütke (Shopify) exige que toute nouvelle embauche soit justifiée par l’incapacité de l’IA à exécuter le travail.
Mais la vision n’est pas unanime. Certains, comme OpenAI ou Klarna, appellent à une lecture plus nuancée : l’impact sera progressif, les tâches se déplacent, certaines fonctions humaines reprennent de la valeur. Ce qui ne fait plus débat, c’est que les fonctions aux tâches automatisables sont en ligne de mire et doivent s’adapter dès aujourd’hui (par exemple marketing, comptabilité, codage…). L’automatisation pénètre les organigrammes : la compétence clé ne sera plus de savoir-faire, mais de savoir s’adapter aux nouveaux outils (numériques).
L’IA générative abaisse drastiquement les barrières techniques d’entrée dans de nombreux métiers comme :
- Codage : GitHub Copilot, Cursor ou ChatGPT permettent à des non-techs de coder.
- Comptabilité : Dext, Pennylane, Pilot divisent les effectifs par deux.
- Marketing : Jasper, Midjourney, Synthesia automatisent la création de contenu.
En conséquence : le niveau technique et le pedigree scolaire perdent de leur importance relative dans les décisions de recrutement.
Le nouveau critère de recrutement ? La capacité à interagir avec l’IA, à ajuster ses méthodes, à apprendre en continu. Demain, le collaborateur performant ne viendra plus seulement avec son PC, mais avec son savoir-faire en IA. « Bring your own AI » pourrait devenir une nouvelle compétence distinctive, la nouvelle norme sur son CV.
Et néanmoins dans un monde automatisable, l’humain reste l’avantage compétitif ultime : esprit critique, éthique, empathie, créativité, leadership.
Ainsi, ce n’est pas tant la fonction travail qui est challengée, mais plutôt la posture face au changement.
3 priorités pour les CEO
Le statu quo n’est plus une option. Les directions générales doivent engager dès à présent une stratégie « IA & Talents » structurée autour de trois priorités :
- Repenser les compétences critiques : en cartographiant les tâches automatisables vs. les compétences humaines irremplaçables.
- Adapter les process RH
- Évaluer le savoir-être, l’agilité, le potentiel d’apprentissage.
- Réduire le poids du CV au profit des tests d’aptitude, de logique et de raisonnements pour montrer l’aptitude au changement (exemple Unilever)
- Instaurer une posture d’apprentissage continu
- Proposer outils et formations IA à tous pour diffuser l’innovation horizontalement
- Identifier des super utilisateurs IA au plus près du terrain qui font de la veille
- Sensibiliser à la protection des données et à l’usage responsable.
L’IA n’est ni une mode, ni une menace, juste une nouvelle réalité opérationnelle.
Chaque CEO doit en faire un levier de transformation durable de son entreprise, en alignant vision technologique et politique RH. Ceci se fera par l’activation du facteur humain qui n’a jamais été aussi précieux pour réussir cette nouvelle transformation.