Dans deux mois, il sera (déjà) temps d’entamer une nouvelle année. Et comme d’habitude, la planète tech n’attendra pas longtemps pour relancer la machine après la trêve des confiseurs. Et pour cause, le CES de Las Vegas lancera une nouvelle année d’innovation du 6 au 9 janvier 2026.
Mais avant cela, la Consumer Technology Association (CTA), l’entité qui organise le CES, a réuni plusieurs acteurs européens de la tech et bien évidemment des startups à Amsterdam à l’occasion du CES Unveiled Europe. Au lendemain des célébrations pour fêter le 750e anniversaire de la capitale néerlandaise, Kinsey Fabrizio, présidente de la CTA, John T. Kelley, vice-président du CTA et directeur du salon américain, et Brian Comiskey, en charge de la veille technologique pour anticiper les tendances de demain, avaient donné rendez-vous à la Bourse d'Amsterdam (Beurs van Berlage) pour cette avant-première européenne du CES.
Celle-ci s’inscrit dans le cadre de la tournée mondiale des organisateurs du méga-salon américain pour prendre le pouls de la tech aux quatre coins du monde. Dans une période économique et politique agitée des deux côtés de l’Atlantique, c’est l’occasion de lancer un message d’optimisme et d’unité entre le Vieux Continent et les États-Unis. «Il y a plus de choses qui nous unissent par rapport à celles qui nous divisent», a ainsi souligné Kinsey Fabrizio en ouverture du CES Unveiled Europe.
IA agentique et IA physique toujours en force au CES
Après le discours de la présidente du CTA, Brian Comiskey a levé le voile sur les tendances qui auront le vent en poupe lors du prochain CES. Évidemment, il y aura une nouvelle fois beaucoup d’IA. Comme le méga-salon américain donne le tempo pour l’année à venir, il permet d’anticiper ce à quoi il faudra s’attendre dans les prochains mois. Dans ce sens, la keynote de Jensen Huang, le patron de Nvidia, avait marqué les esprits. Le dirigeant taïwano-américain avait ainsi déclaré que nous étions actuellement dans l’ère de l’IA agentique, ce qui s’était ressenti dans les allées du CES, et que nous basculerons bientôt dans l’ère de l’IA physique avec des robots qui vont s’immiscer dans notre quotidien.
Alors à quoi faut-il s’attendre avec l’IA pour ce CES 2026 ? «Je pense que l’IA agentique va toujours jouer un rôle majeur lors du salon. Ce que les agents de l'IA font, c'est qu'ils se transforment d'un outil en un collègue, qui peut gérer votre planning du jour, plutôt que simplement vous aider à répondre à un prompt ou à un e-mail. Les agents ont un pouvoir transformation que l’on ne voit pas ailleurs. L’autre grande partie du salon en 2026 sera dédiée à l’IA physique, et donc la robotique. La présentation dans ce domaine sera assez impressionnante, notamment avec les développeurs de robots humanoïdes comme Unitree et Enchanted Tools. On va voir de plus en plus des robots du quotidien qui sont plus efficaces et plus intelligents. Toujours dans l’IA physique, on aura aussi des entreprises qui développent des véhicules autonomes», indique Brian Comiskey. Avant d’ajouter : «Il y a quelques semaines, j’ai effectué mon premier trajet en Waymo (filiale de Google qui développe des robotaxis, ndlr) et c'était une expérience incroyable ! Je me suis senti en sécurité et un peu dans le futur d’une certaine manière.»
«Il y aura différentes vagues dans l’IA»
Plus globalement, le responsable de la veille technologique du CES estime que le potentiel de l’IA commence tout juste à être exploité. «L’IA est fascinante parce qu'il s’agit d’un secteur très varié. Évidemment, il y a des modèles de langage très innovants, mais l’enjeu désormais est de mettre en avant d’autres aspects, comme des modèles plus petits ou spécialisés, qui aident à améliorer des secteurs comme la santé, l’automobile ou l'agriculture. C’est ce qu’on appelle l’IA verticale et c’est important à mes yeux. Et puis il y a un autre élément différent, c’est tout ce qui tourne autour du search et de la gestion du savoir. Les applications de l'IA industrielle sont aussi très intéressantes», indique Brian Comiskey.
Néanmoins, avec des investissements toujours plus pharamineux, comme en témoignent les levées XXL d’OpenAI, Anthropic ou encore Mistral AI, première décacorne française, nombreux sont les observateurs à y voir une bulle qui pourrait éclater dans les prochains mois. «Je ne dirais pas nécessairement que c'est une bulle», estime de son côté Brian Comiskey. «Même si vous voyez des valorisations aussi hautes en ce moment, nous sommes prêts à de grandes transformations avec l'intelligence artificielle, même si ce sera difficile de mesurer vraiment leur impact d’ici trois mois ou dix ans. Je pense qu’il y aura différentes vagues dans l’IA et il n’est pas étonnant de passer par un cycle de hype normal. Il y aura probablement un moment où les valorisations pourraient être un peu corrigées», ajoute-t-il.
«Les voitures seront bientôt des smartphones sur roues»
Parmi les autres thématiques à l’honneur pour ce CES 2026, l’informatique quantique continuera à monter en puissance dans les allées du salon américain. «Le quantique est quelque chose que nous allons commencer à voir davantage. C’est un sujet à regarder sur le long terme. Si les années 2020 sont définies par l'intelligence artificielle, les années 2030 seront probablement définies par le quantique. Mais certains des défis que présente le quantique en termes de sécurité et de cryptage doivent commencer à être préparés aujourd'hui, sinon nous serons en retard. Donc vous allez certainement voir certaines discussions sur le sujet au CES», indique Brian Comiskey.
De retour en force l’an passé, les lunettes intelligentes devraient également s’afficher massivement durant ce CES 2026. Avec l’arrivée des nouvelles Meta Ray-Ban Display, l’engouement pour les lunettes connectées dopées à l’IA devrait encore monter d’un cran. De plus, la technologie arrive à maturation avec le développement de l’informatique spatiale, terme popularisé par le casque Vision Pro d’Apple. «Les appareils deviennent des plateformes», observe Brian Comiskey. Dans ce contexte, une part encore très importante du salon, surtout au Las Vegas Convention Center (LVCC), sera accordée à l’automobile, secteur transformé par les technologies visant à rendre les véhicules autonomes et propices au divertissement. «Les voitures seront bientôt des smartphones sur roues», estime le responsable du CTA. Enfin, la santé occupera une place majeure avec des innovations visant à allonger la durée de vie et à être en meilleure santé.
Depuis Amsterdam, l’équipe en charge du CES se montre donc optimiste et enthousiaste pour cette nouvelle édition. Dans la capitale néerlandaise, Kinsey Fabrizio, John T. Kelley et Brian Comiskey n’ont cessé de rappeler que les startups sont un moteur d’innovation très puissant qui dépasse le seul cadre des frontières et des gouvernements qui se succèdent. C’est avec cette dose d’optimisme que des milliers de startups du monde entier, dont une centaine de jeunes pousses françaises, partiront à l’assaut du «Strip» de Las Vegas dans dix semaines avec le rêve américain en tête.