Les corporate venture capital (CVC), soient les fonds d’investissement de grands groupes, se sont développés ces dernières années, et sont désormais structurés.
En investissant dans des startups prometteuses, ces fonds ne visent pas seulement un retour sur investissement, mais la création de synergies commerciales et technologiques capables d’enrichir directement leur panel de solutions pour apporter à leurs clients le meilleur de l’innovation européenne. Et pour les startups, cette alliance peut devenir un accélérateur de passage à l’échelle.
« L’idée est d’accélérer le développement des startups, en mettant le maximum de nos ressources à disposition. On les aide aussi à déployer leurs solutions à grande échelle. » En 2018, le groupe Sopra Steria a créé son Corporate Venture Capital (CVC) pour « accéder à des solutions innovantes de manière accélérée » et répondre ainsi aux enjeux présents et futurs de ses clients.
Depuis, le groupe a accompagné une dizaine de projets, du pre-seed à la série B, via des tickets de 250 000 à 1,5 million d’euros. « Nous sélectionnons de manière très précise les startups que nous accompagnons. Nous regardons celles qui développent des technologies comme l’IA, la réalité augmentée ou le quantique, au sein des secteurs liés à la souveraineté de nos clients comme la défense et sécurité, l’aéronautique, la cyber, les services financiers, le transport, et les secteurs publics.», souligne Clémentine Grossetete, portfolio et startup program manager de Sopra Steria Ventures. Nous avons par ailleurs besoin de cibler des startups qui ont déjà validé leur technologie sur un marché. » Car pour le groupe l’objectif est également de créer des synergies entre ses clients et les solutions innovantes. « Nos clients bénéficient d'un accès au meilleures solutions innovantes et européennes. Réciproquement, les startups peuvent adresser des cibles plus matures avec les ressources adéquates. »
« Favoriser l’accès à nos marchés à l’étranger »
Selon Aurélie Santune, directrice business développement et portefeuille d’Orange Ventures - CVC du groupe Orange - « Le rôle du CVC et notamment des operating partner est clé pour structurer des partenariats qui fonctionnent entre les start-ups et les grands groupes. C’est le tiers de confiance, qui en maîtrisant les enjeux stratégiques et les fonctionnements souvent très différents du corporate et de la startup, permet les conditions d’un succès pérenne. On donne les clés à notre portefeuille pour rapidement apprendre à gérer la relation avec un grand client. »
Au-delà d’ouvrir leur portefeuille client, les CVC permettent aux startups d’avoir accès à un écosystème de fournisseurs et de partenaires stratégiques. « Un autre élément clé pour notre portefeuille, en plus du business que nous pouvons leur apporter, est d’avoir accès à la richesse de notre écosystème de grands partenaires technologiques, autant d'acteurs clés pour développer leur activité, et accélérer significativement les roadmap produits », poursuit Aurélie Santune, qui accompagne majoritairement des startups européennes en série B, mais aussi des entreprises africaines, en amorçage, avec un fonds de 350 millions d’euros sur 5 ans.
« Un autre élément valorisé par notre portefeuille est de favoriser l’accès à nos marchés. Orange est par exemple présent dans 25 pays comme opérateur, en Europe et sur MEA. Ceci a permis à plusieurs de nos sociétés en portefeuille de s’internationaliser rapidement. C’est par exemple le cas de Batch, qui est devenu la plateforme d’engagement client sur l’ensemble de notre super app Max IT, dans plus de 18 pays. Nous travaillons également pour notre portefeuille à la construction d’offres communes paneuropéennes ».
Un passage à l’échelle accéléré
Dans le même temps, s’adosser à un groupe, c’est aussi bénéficier d’un effet de levier opérationnel : accès à des expertises métiers, des environnements de test, des données sectorielles, etc. « Les startups peuvent aussi demander conseils lorsqu’elles veulent lever des fonds, ou tester leur solution. Cela leur permet aussi d’être mentorées. Nous leur proposons d’ailleurs de co-créer une offre en trois mois, grâce à nos équipes métiers. L’objectif est de créer des synergies entre notre groupe et les startups tout en restant agiles. L’enjeu est d’atteindre le go to market en 5 mois et de trouver des clients pour tester la solution en 9 mois », souligne Clémentine Grossetete, qui précise que les startups accompagnées par un CVC peuvent également passer plus rapidement à l’échelle.
Sopra Steria a par exemple investi dans la startup XXII récemment, qui, grâce à l’IA, détecte des comportements atypiques via la vidéo surveillance, et permet ainsi de mettre en place les systèmes de sécurité adéquates. « La startup ciblait en premier lieu le retail mais avec nous, l’idée est d’adresser d’autres industries (transport, défense et sécurité, secteurs publics). Nos équipes se concentrent sur la meilleure manière d'adresser les nouveaux enjeux de nos clients en tirant avantage de la solution et les fondateurs peuvent se concentrer sur leur feuille de route stratégique ».
Une vision à long terme, plus qu’un simple investissement
Les CVC veulent s'inscrire dans une logique d’alliance durable avec les startups. Leur ambition dépasse l’horizon financier : ils cherchent à créer des relations collaboratives et mutuellement bénéfiques sur le long terme.
Lorsqu’une synergie s’avère fructueuse, elle peut déboucher sur une intégration plus profonde : verticaliser sa solution sur une industrie cœur ou déployer au niveau européen par exemple. Dans tous les cas, la jeune entreprise bénéficie d’un accompagnement sur-mesure pour tester, adapter et déployer sa technologie sur de nouveaux marchés.
En connectant les startups à des clients difficilement accessibles, en les aidant à structurer leur offre et à scaler plus vite, les CVC sont devenus un maillon essentiel de l’écosystème de l’innovation. Ils incarnent une nouvelle forme de compétition vertueuse, où l’agilité des startups et la solidité des grands groupes se rencontrent pour bâtir les champions technologiques de demain pour les clients.
