6 mai 2020
6 mai 2020
Temps de lecture : 7 minutes
7 min
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Finance et assurance se préparent à une deuxième vague d'innovations de rupture

Maddyness et platform58, l’incubateur de la Banque Postale, présentent le panorama des pépites early stage de la Fintech et de l’Assurtech. La nouvelle vague de startups prouve qu’il reste encore beaucoup de besoins à couvrir dans un secteur qui a déjà connu bien des révolutions.
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Cest un marché qui a longtemps semblé verrouillé à toute disruption. Et pourtant, les secteurs de la finance et de lassurance font aujourdhui figures de pionniers en matière dinnovation. Les grands groupes traditionnels se sont adaptés et une première vague de startups Fintechs et Assurtechs ont réussi à se faire une place au soleil. Le Next 40 et le French Tech 120 témoignent dailleurs de la vitalité de ces verticales, avec quatre représentants dans lindice phare de la French Tech (Alan, October, Payfit et Younited Crédit) et six autres au sein du second (Fortia Financial Solutions, Lemon Way, Lunchr, Lydia, Qonto et Spendesk).

Autant de succès qui ont montré la voie à une nouvelle génération dentreprises, impatientes de confirmer quelles peuvent encore bousculer un secteur qui sest déjà réinventé. Lesquelles deviendront de futurs poids lourds du secteur ? Lesquelles ne parviendront pas à se faire une place au soleil ? Maddyness et platform58, l’incubateur de la Banque Postale qui offre un accompagnement sur-mesure à des jeunes pousses de la Fintech et de l’Assurtech, se sont associés pour recenser les startups early stage de lAssurtech et de la Fintech et mettre en exergue les verticales qui suscitent le plus l’engouement des entrepreneurs. Nous avons au total dénombré pas moins de 89 startups de moins de trois ans, encore non financées par des fonds dinvestissement.

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Pas de profil-type de startup à succès

Y a-t-il un profil-type de la startup sur laquelle miser pour dénicher une future licorne ? Pas vraiment. Certes, quelques grandes lignes se dessinent : une majorité des jeunes pousses du panorama sont situées dans la région parisienne (44% à Paris et 27% dans le reste de l’Île-de-France) ; ont été créées par un duo de fondateurs (50%) ; et présentent une équipe fondatrice 100% masculine (72%).

Mais le principal facteur de réussite réside ailleurs. Nous avons affaire à des profils de fondateurs ou de fondatrices de plus en plus matures aujourdhui, constate Fabien Monsallier, directeur de linnovation de La Banque Postale. Beaucoup de Fintechs sont aujourdhui créées par des non primo-entrepreneur·e·s, comme lont été Qonto, Alan ou Pixpay. ” Des talents qui bénéficient souvent dune première expérience totalement étrangère à la finance ou lassurance. Cela témoigne de l’évolution de la société : beaucoup de secteurs ont été bousculés par le-commerce et ses nouvelles normes en matière dexpérience client. Pourquoi la finance ou lassurance ne lauraient pas été ? Ces profils parviennent à trouver un angle dattaque, un vrai besoin auquel répondre grâce à un service qui relève ensuite de l’évidence.

L’évolution des technologies a également rendu les frontières entre les secteurs plus poreuses. Le secteur financier est plus accessible aujourdhui quil y a quelques années, relève Fabien Monsallier. Les barrières à lentrée sont moins nombreuses et il est plus facile de sadresser au milieu bancaire. ” De quoi susciter lintérêt des entrepreneurs… mais aussi de certains investisseurs quon aurait pu penser éloignés de la Fintech ou de lAssurtech, à linstar de Tencent, qui a pourtant récemment pris des participations au sein de Lydia et de Qonto.

La revanche du B2B

Du côté des services, cest le B2B qui simpose. Si les technologies pour les professionnels ont longtemps été dans lombre des géants du paiement, Lydia en tête en France, les entrepreneurs privilégient désormais les business B2B ou B2B2C, comme en témoigne la répartition dans notre panorama : plus de la moitié des startups (57%) se destinent prioritairement aux banques, assurances, courtiers ou aux entreprises, alors que 43% sadressent principalement aux particuliers. Cest dautant plus marqué dans lAssurtech où les deux tiers des startups sont B2B, contre à peine plus de la moitié pour les Fintechs. On voit de moins en moins de projets B2C”, atteste ainsi Paul Foucault, responsable du deal-flow de platform58. Les opportunités les plus évidentes en B2C ont déjà été prises et cest donc plus compliqué de trouver des modèles viables, dautant que la concurrence est forte. Laccès au marché est difficile avec des coûts d'acquisition client souvent élevés” , analyse-t-il.

Cest donc dabord une forme de pragmatisme financier qui impose aux entrepreneurs de se focaliser sur le marché des professionnels. Les startups parviennent mieux à commercialiser des services B2B, souligne Fabien Monsallier. Elles cherchent à travailler avec des clients rentables, pour elles-mêmes atteindre la rentabilité. ” Exit donc les activités sur-consommatrices de cash, comme les néobanques, bienvenue aux positionnements de niche qui permettent de combler les besoins quotidiens des pros. Pour cela, les entrepreneur·e·s nhésitent pas à exploiter les failles des secteurs financier et assurantiel. Le secteur bancaire sappuie encore beaucoup sur des processus manuels et le papier, note Fabien Monsallier. Nous voyons donc arriver beaucoup de startups en lien avec les sujets de la data, qui ont la capacité daffiner la prise de décisions ou l’évaluation du risque.

Serait-ce la fin pure et simple de lengouement pour les technologies B2C ? Pas tout à fait. Là encore, tout est affaire de positionnement. Il y a dix ans, on assistait à la première vague de Fintechs, dont beaucoup travaillaient dans le paiement, se rappelle le directeur de linnovation de La Banque Postale. Le financement a été très dynamique dans ce secteur et il a semblé plutôt bien couvert. Mais il connaît aujourdhui un retour sur le devant de la scène. ” Cest ainsi que des startups comme Spliiit parviennent à réinventer le paiement - la startup permet de partager à plusieurs le coût dun abonnement à différents services (médias, plateformes de divertissement ou logiciels). Même constat du côté de lAssurtech où les rares services B2C ont privilégié lhyper-spécialisation, à linstar de lassurance voyage dInsurly ou lassurance d’électronique ou électroménager dAio.

Des secteurs précurseurs

La crise actuelle pourrait cependant bien redessiner les contours des deux secteurs, comme le précise Xavier Gomez, directeur général dInvyo. " Cette crise va sûrement faire émerger de nouveaux acteurs afin de combler les manques et les besoins du marché. Un besoin de consommer autrement les services financiers émerge, favorisant de nouveaux services et la création de nouveaux modèles économiques. Lavenir nous dira si la crise du Covid-19 va bénéficier à de nouveaux acteurs et contribuer à améliorer lexpérience client. " Fintechs et Assurtechs sont en première ligne des entreprises mobilisées pour apporter leur aide aussi bien aux sociétés touchées qu’aux particuliers confinés qui doivent apprendre à consommer autrement.

Et si les pionnières de ces deux secteurs jouent évidemment les porte-étendards, les startups early stage ne sont pas en reste. Mais doivent pourtant composer avec un paysage financier en pleine recomposition. " Les VCs devront jouer leur rôle de dénicheurs de pépites et par conséquent accompagner ces, peut-être, futures licornes ", anticipe Xavier Gomez. Reste à savoir si cette deuxième vague dentreprises innovantes seront à la hauteur de leurs prédecesseuses. Et la définition du succès pourrait bien, elle aussi, évoluer après la crise. Comme le rappelle Paul Foucault, aujourdhui, on estime la réussite à laune des levées de fonds mais cela signifie simplement quune entreprise remplit les grilles de critères des VCs” . À ce jeu-là, les pionnières du secteur gagnent à tous les coups, comme en témoigne la méga-opération de Qonto qui a levé fin janvier plus de 100 millions deuros. Mais les investissements se tarissant avec la crise, les nouvelles venues pourraient bien faire bouger les lignes et réserver quelques surprises aux poids lourds qui conjuguaient jusqu’ici succès avec levée de fonds.

Maddyness, partenaire média de platform58, l'incubateur de la Banque Postale