« Je suis toujours officiellement dans cette période de pause », confie Xavier Fischer, fondateur de Datakalab. Après 8 ans à développer sa startup, Xavier Fischer l’a revendue à Apple. « Je voulais prendre du recul car, en tant qu’entrepreneur, il y a plein de stimulis différents. Je voulais pouvoir tirer les leçons de tout ce que j’ai vécu pendant 8 ans, voir ce qui a manqué, où j’ai été bon et où j’ai été moins bon », explique Xavier Fischer.
D’après une étude du cabinet de coaching 108 Milliards, 43% des entrepreneurs qui ont cédé leur entreprise ont « eu besoin d’un temps de recul », comme le fondateur de DatakaLab. La vente de sa startup peut être un moment difficile, d’après l’étude de 108 Milliards sur « ce que vivent vraiment les entrepreneurs après la vente de leur entreprise ». Pour 45% d’entre eux, la cession provoque « un vécu émotionnel plus rude que prévu », se manifestant par des sentiments de déception, de fatigue, d’anxiété ou de vide.
L’entourage joue un rôle fondamental dans l’exit
« Ce n’est pas un passage facile surtout quand on ne l’a jamais vécu», confirme Thomas Guyot, fondateur de Traace. C’est Tennaxia, une entreprise du même secteur, SaaS greentech, qui a fait l’acquisition de Traace, via le fonds de private equity Marlin. « Il y a beaucoup d’émotions dans ces moments-là, c’est important d’être bien entouré. » Le fondateur insiste sur le rôle majeur des avocats, « il faut choisir quelqu’un en qui on a confiance », mais surtout sur celui de son entourage proche. « Le fait d’avoir des amis proches, transparents sur comment aborder cette étape a été fondamental. »
Il y a un réel besoin d’accompagnement des entrepreneurs pendant le process mais aussi après. « 20 % font appel à un coach ou un psy, 30 % se confient à leurs proches, 32 % trouvent du soutien chez leurs pairs », soulignent le rapport de 108 Milliards. « Après l’acquisition, j’ai toujours essayé de développer des relations humaines fortes avec des gens de différents environnements, pas seulement dans l’écosystème startup », témoigne Xavier Fischer.
Pour certains entrepreneurs, acquisition est synonyme d’introduction dans un groupe plus grand. C’est le cas pour Thomas Guyot qui est devenu chief strategy officer de Tennaxia. « Plus on prend du temps pour s'intégrer à une nouvelle structure, plus on prend de risques. Nous aurions dû, en amont du process, commencer à travailler ce processus d’intégration. »
Pour Sacha Doliner, founding partner de la banque d’affaires Neumann et hôte du podcast Cash Out, bien s’entourer est effectivement très important. « Il faut choisir une banque d’affaires avec laquelle on est alignés, qui travaille dans une logique de long terme et saura jouer le rôle de coach tout au long du process. » En interne également, il faut être prêt à assumer ce processus. « Il est nécessaire d’avoir un bon directeur financier et un directeur général déjà en place », complète le spécialiste du M&A dans la tech.
Exit : seuls 10% des fondateurs perçoivent plus de 10 millions d’euros
En effet, à force d’être concentré sur la procédure qui peut s’étaler sur plusieurs mois, il y a un risque de « faire dérailler l’opérationnel, et de faire baisser les résultats… ce qui affaiblit la négociation », commente Sacha Doliner. « Il faut préparer des bonnes nouvelles à distiller tout au long de la négociation, lancement produit, nouveaux partenariats, bons chiffres. » Autre risque au cours des discussions selon le banquier, laisser trop sentir à un possible acquéreur qu’il est seul sur le dossier.
Les exits des entrepreneurs sont souvent plus faibles qu’on ne le croit. D’après l’étude du cabinet de conseil 108 Milliards, la plupart des entreprises sont valorisées (au moment de la vente) entre 5 à 20 millions d’euros, 40 % des fondateurs perçoivent moins de 1M€ à titre personnel, seuls 10 % dépassent les 10M€. Cependant, il faut aussi préparer l’après. « J’ai plutôt privilégié la sécurité, je pense que c’est bien que cela n’ait pas changé mon quotidien », témoigne Thomas Guyot. Certains choisissent d’investir dans une nouvelle voiture ou dans l’immobilier. Xavier Fischer, lui, s’est d’abord éduqué sur la question et sur le rôle réel de gestionnaire de patrimoine. Aujourd’hui, il investit environ 10% dans les startups.
« Il faut absolument préparer son post-exit et bien anticiper sa vie d’après », conclut Sacha Doliner. Vendre sa startup est un marathon plus qu’un sprint et « de véritables montagnes russes émotionnelles ». L’hôte de Cash Out insiste, « il faut se préparer à vivre le deal comme un sportif de haut-niveau : bonne nutrition, sommeil, sport, préparation mentale. »