Quandela a une place singulière sur le secteur quantique : la scaleup a la capacité de développer des ordinateurs quantiques reposant sur la lumière, les photons. Une approche différente d’autres startups françaises prometteuses comme Alice&Bob et Pasqal. Et le succès est au rendez-vous : Quandela est la première entreprise européenne à avoir vendu un ordinateur quantique à un client privé, à savoir OVHCloud, mais également à avoir pénétré le marché nord-américain, via le Canada. La pépite française envisage d’ailleurs de continuer son internationalisation avec une filiale aux Etats-Unis et en Corée du Sud.
Valérian Giesz a cofondé Quandela en 2017 avec Pascale Senellart-Mardon et Niccolo Somaschi, tous trois issus du Centre de Nanosciences et de Nanotechnologies du CNRS. Il est aujourd’hui Chief Operating Officer de l’entreprise, qui compte plus de 130 collaborateurs. Il livre à Maddyness ses meilleurs conseils pour faire décoller sa startup.
Maddyness : Quelles sont les trois questions à se poser avant de lancer sa startup ?
Valérian Giesz : Il faut déjà être sûr qu'on a une équipe qui tienne la route. Au moment de lancer sa startup, évidemment, on est un peu tout seul. Mais je pense que l'important est de trouver le ou les deux, trois bons partenaires pour se lancer.
Ensuite, il faut vraiment bien se poser la question ensemble de la direction et de la vision, sur lesquelles on construit la startup.
Enfin, il faut bien se questionner sur qui sont nos clients, quels sont leurs véritables besoins et comment y répondre. La solution technologique n'est pas toujours la meilleure.
Quels critères prioriser pour trouver son associé ?
Avec des associés, ce qui est important, c'est de pouvoir tout dire, autant le positif que le négatif. Et il ne faut pas qu'il y ait susceptibilité entre les gens. On est alors capable de se faire confiance et de se répartir les tâches avec confiance. Et ensuite, il faut quand même vérifier qu'en termes d'implication, on est sur la même longueur d'onde pour ne pas se retrouver dans un déséquilibre où il y en a un qui fait tout - ce qui n’est pas le cas chez Quandela, on est tous des gros bosseurs.
Quelle est selon vous l'erreur que font trop d'entrepreneurs ?
Au début, dans l'enthousiasme du lancement, l'erreur que font les entrepreneurs, c'est de parler plus qu'ils n'écoutent. C'est-à-dire qu'ils racontent leur projet plus qu'ils n'écoutent leurs clients. Évidemment, un entrepreneur doit être sûr de soi, avoir une vision forte et la porter. Mais il faut aussi que l'entrepreneur soit à l'écoute du marché, des tendances et qu'il sache se remettre en question sans pour autant remettre en cause sa vision tous les deux jours.
Comment identifier les meilleurs profils pour son équipe ?
C'est toujours la grande question ! Il faut avoir les meilleurs d'un point de vue tech, il faut avoir les meilleurs d'un point de vue opérationnel, il faut avoir les meilleurs d'un point de vue commercial. Mais le truc, c'est que quand on démarre, on commence de zéro. Et les meilleurs d'un point de vue opérationnel ou commercial ne sont pas forcément ceux qui sont les meilleurs au début. Donc, c'est une équation qui est très difficile.
Par exemple, ça ne sert à rien de prendre un directeur commercial qui vient d'un très grand groupe, qui a l'habitude de dérouler une roadmap commerciale avec 1000 personnes en dessous de lui, dans une startup à l'état zéro, parce qu’au début, il faut mouiller la chemise.
Je mise beaucoup sur le feeling, sur la capacité des gens à se parler et à s'adapter. Comment identifier les meilleurs ? En identifiant leur capacité à s'adapter dans un environnement ultra mouvant, parce que la startup va croître normalement avec une croissance à 10 000% par an et donc il faut que les gens sur lesquels on va s'appuyer puissent s'adapter très très vite à cet environnement.
A votre avis, quel est le bon moment pour lever des fonds ?
En général, le bon moment pour lever des fonds, c’est le moment où on n'en a pas besoin, évidemment. Parce que c'est toujours plus facile de lever, de convaincre, de rassurer quand on est dans une forte traction, avec pas mal de clients. L'erreur qui est généralement faite, c'est que quand on n'en a pas besoin, on n'y met pas d'effort. C'est-à-dire qu'on va d'abord chercher les clients.
Mais je pense que c'est aussi très intelligent d'aller chercher des fonds, de convaincre de nouveaux actionnaires, de nouveaux investisseurs qui soient financiers ou stratégiques au moment où on n'est pas proche d'un problème de trésorerie. Ça apaise, on peut avoir des discussions beaucoup plus sensées, profondes sur comment la technologie peut être déployée sur d'autres marchés, comment est-ce qu'on va travailler sur les prochaines étapes... Une levée de fond, ça se prépare, et il vaut mieux la préparer dans un moment calme.
Comment ne pas s'oublier lorsqu'on est entrepreneur ?
Chacun a ses petites routines. Moi, je continue de conserver des objectifs sportifs. J'imagine que pour d'autres personnes, ça peut être la musique ou pas mal d'autres choses. Mais en tout cas, il est très important, je pense, de garder une hygiène de vie, un équilibre personnel pour ne pas se cramer, pour ne pas se brûler les ailes au boulot. Et garder une lucidité dans le business, dans la conduite des affaires, qui est très importante.